L’OTAN à la croisée des chemins
Par Antoine Charpentier
Le 7 novembre 2019, le président de la République française Emmanuel Macron a déclaré au journal Économist que l’OTAN traverse actuellement une phase de «Mort cérébrale», ce qui a ravivé la crise au sein de l’organisation atlantique. Depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir aux États-Unis les situations ne cessent de se compliquer entre Européens et américains, sur fond d’une crise qui ne dit pas son nom. Ces luttes mettent en cause les fondamentaux de l’OTAN.
Toutefois, le président Macron n’exprime pas uniquement son point de vue au sujet de l’OTAN, mais également la préoccupation de l’Europe d’un OTAN soumis totalement aux États-Unis qui prennent de moins en moins en compte leurs intérêts dans le monde. Donald Trump ne cesse de réclamer aux Européens l’augmentation de leur participation financière. Il ne cherche qu’à faire supporter aux Européens une charge économique conséquente afin de soulager les États-Unis.
La France commence à se rendre compte que l’OTAN d’aujourd’hui n’est plus celle de 1949. De ce fait, toutes continuations dans le processus d’aliénation n’est plus bénéfique pour son avenir politique, économique et militaire. Cependant, Emmanuel Macron essaye encore une fois de se donner une posture internationale, une illusion d’être le nouveau de Gaulle, sans pour autant sortir la France du commandement de l’OTAN.
Actuellement, les politiques étatsuniennes réduisent la France et avec elle l’Europe à des États vassaux. D’où l’inquiétude croissante des européens surtout après l’arrivée au pouvoir du président américain Donald Trump.
Afin de comprendre le fond du message du président Macron à propos de l’OTAN, il est nécessaire de mettre en perspective le mécontentement des Européens, notamment des Français de l’opération dite «Source de Paix» lancée par la Turquie au nord de la Syrie, visant entre autres les kurdes très proches de la France. Une opération d’une telle envergure, portant des enjeux cruciaux pour le camp occidental a été prise entre deux membres de l’OTAN, en l’occurrence les États-Unis et la Turquie, sans aucune consultation avec les alliés, par conséquent les Européens.
Une seconde clé d’analyse se traduit par le mécontentement français et européen de l’affrontement qu’orchestre les États-Unis, par le biais de l’OTAN contre la Russie. Ceci la mettra dans une très mauvaise posture. Cependant, lorsque les États-Unis décideront d’entrer en guerre contre la Russie, ce sont les Européens qui payeront le plus lourd tribut. Il convient de préciser que l’Europe supporte déjà une énorme charge à cause de la volonté des États-Unis d’encercler militairement la Russie depuis son territoire.
Il existe une stratégie tacite de l’OTAN en Europe, donc peu reprise dans les médias, fondée sur le principe du clientélisme vis-à-vis de certaines petites nations européennes, telle que la Roumanie, la Bulgarie, la Pologne ou encore les pays Baltes qui sont en même temps frontaliers ou dans la zone stratégique de la Russie à l’est de l’Europe. Les nations européennes évoquées ci-dessus sont également membres de l’Union européenne. De ce fait, cette stratégie de l’OTAN dominée par les États-Unis entrave sérieusement l’évolution de l’Union européenne indépendamment de l’hégémonie américaine, sabotant par le fait des éventuels rapprochements avec la Russie.
Les Européens ont bien compris que la protection de l’OTAN ne peut pas leur être durable. Ils ont évoqué à plusieurs reprises ces dernières années, l’idée de former une «Armée Européenne». Ceci leur permettrait de se dégager de l’emprise de l’OTAN et avoir une politique indépendante dans le Monde. Cependant les divisions entre les Européens ne permettent pas encore l’éclosion d’un tel projet. La chancelière allemande Angela Merkel a vivement réagi aux déclarations d’Emmanuel Macron à propos de l’OTAN. L’Allemagne souffle le chaud et le froid, jouant sur plusieurs tableaux à la fois. Elle approfondi ses relations avec la Russie, s’insurge dans les coulisses contre les politiques étatsuniennes en Europe, mais en même temps désapprouve le président de la République, laissant la France trépigner seule.
Donald Trump n’est pas resté sans réagir aux déclarations d’Emmanuel Macron. Il a déclaré que: «Personne n’a besoin de l’OTAN plus que la France». Cependant, la France est la seule nation européenne à avoir la dissuasion nucléaire, donc dans l’idéal, elle n’a pas besoin de l’OTAN, elle pourra s’en passer, si elle le décidait. La France franchira-t-elle le pas?
La France perçoit sérieusement le danger qui guette l’Europe. Elle commence à se diriger vers l’est, s’ouvrant sur la Russie et la Chine. La France constate que les des États-Unis l’ont poussé à sortir de plusieurs régions et pays à la fois, donc de plusieurs marchés économiques, notamment au Proche-Orient, tels que l’Iran, la Syrie et sa reconstruction, l’Irak et son pétrole, ou encore le Liban où la France lutte pour maintenir sa présence.