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Tout savoir sur Davutoglu, ingénieur de la Turquie moderne

Tout savoir sur Davutoglu, ingénieur de la Turquie moderne
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Qui a ébauché les tactiques de la Turquie moderne? Qui est l’ingénieur des relations étrangères au sein du parti au pouvoir en Turquie? Les responsables turcs tentent-ils de renouveler l’empire ottoman? Et Quelle sera la stratégie turque sur l’avenir des relations internationales? Le rapport ci-dessous fournira des réponses pertinentes à ces questions.

La Turquie était un Etat marginal au sein de l’Otan, durant la période de la guerre froide. Ce pays limitrophe de l’Union Soviétique, a été le premier à appliquer la doctrine Truman, luttant contre le communisme. Ce genre de suivisme à l’occident était bien perçu par les élites ministérielles turques. Un fait qui a paré à ce pays et à la partie sud-est de l’Europe les griffes du communisme durant 44 ans, en contrepartie de l’argent et des armes.

Au début des années 90 du siècle dernier, le mur de Berlin s’est effondré entrainant la chute de l’Union soviétique. C’est alors que Samuel Huntington, Francis Fukuyama et Robert Kaplan, principaux théoriciens de la politique d’endiguement (containement), tout comme des conseillers, des diplomates et des experts en sciences politiques, ont commencé à écrire les ouvrages de l’après-guerre froide, comprenant des idées confuses.

Durant cette même période, un chercheur dans les Relations Internationales a émergé sur la scène turque, en élaborant une carte de route, à partir d’une nouvelle vision géopolitique du monde.

Biographie de Davutoglu :


Ahmet Davutoglu est né le 26 février 1959. Il a effectué ses études secondaires dans le Lycée d’Istanbul pour garçons, et a été diplômé en Sciences politiques et économiques de la faculté d’Economie et de Gestion de l’université Bogazici. Il a obtenu la maitrise et puis le doctorat de la faculté des Sciences politiques et des Relations Internationales de la même université.

En 1990, il a occupé le poste d’enseignant assistant dans l’Université Islamique Internationale de Malaisie, où il a fondé la faculté des sciences politiques qu’il a présidée en 1993, obtenant le titre de professeur universitaire.

De 1995 à 1999, Davutoglu a enseigné à l’université de Marmara et travaillé dans l’institut des études du Moyen Orient et dans l’institution d’Assurance et des Banques. De 1998 à 2002, il a enseigné dans la faculté militaire.

A la suite des élections de novembre 2002, il devint conseiller du Premier ministre turc et grand
Tout savoir sur Davutoglu, ingénieur de la Turquie moderne représentant du 58e gouvernement turc. Un rôle qu’il a joué plus tard au sein de deux gouvernements.

De 1995 à 2004, Davutoglu fut nommé doyen de la faculté des relations internationales de l’université Bilkent d’Istanbul et membre du conseil administratif.

Il a publié plusieurs ouvrages en langue arabe et anglaise sur la politique étrangère de Turquie. Ses écrits ont été traduits à plusieurs langues, dont le japonais, le portugais, le russe, l’arabe, le persan et l’espagnol.

En 2009, il fut nommé ministre des Affaires Etrangères du 60e gouvernement turc.
Davutoglu est marié et père de trois fils. Il maitrise la langue anglaise, arabe, allemande aussi bien que le turc.

Ses principaux ouvrages sont : «L’influence de la vision du monde islamique et occidental sur la théorie politique», «La profondeur stratégique», et «Les crises du monde». Il prétend avoir bravé le feu lors de l’incendie de sa demeure pour sauver les brouillons de son ouvrage «La profondeur stratégique» qu’il estime être le fruit de sa vie politique.

La théorie de la politique étrangère turque durant le mandat de Davutoglu

La politique étrangère turque était toujours liée au nom de Davutoglu durant la gouvernance du parti «Justice et Développement». Il avait exposé sa politique étrangère dans plusieurs ouvrages, y compris «La profondeur stratégique» en 2001. La mise en œuvre de ses théories a abouti à l’ouverture de la Turquie dont le rôle diplomatique s’est accru notamment au Moyen Orient. Ces théories ont bien sûr subi de sérieux défis et on peut considérer que la question syrienne en était des plus importants, ce qui l’a confronté à des critiques sur la scène turque.

Les politiciens turcs tiennent-ils à ressusciter l’empire ottoman?

En dépit du fait que certains estiment que la théorie de Davutoglu est équivalente au terme «Néo-ottomanisme», mais ce terme sera largement utilisé pour qualifier la politique étrangère turque. L’ottomanisme est un mouvement politique et libéral apparu au XIXe siècle et visant à créer une identité nationale civile ottomane pour englober les différentes identités ethniques, linguistiques et confessionnelles. Le terme Néo-Ottomanisme a été récemment utilisé pour qualifier la politique étrangère de Turgut Ozal, ancien président de Turquie défunt en 1980. Une politique quasi-semblable aux concepts prônés par la théorie de Davutoglu et appliquée dans un contexte régional de conflit au Moyen Orient; En fait, le site géographique de Turquie l’oblige de communiquer d’une manière permanente avec tous les pays ayant fait partie de l’empire ottoman.

Quelles sont les lignes directrices de la politique étrangère turque selon Davutoglu?

La géopolitique est un mot clé dans la pensée stratégique de Davutoglu, mais elle est complétée par d’autres éléments telles «la force douce» dans le règlement des dilemmes et la promotion du mode de solution «win-win» (gain). Il a signalé dans son ouvrage «La profondeur stratégique» que la Turquie jouit d’un site géographique et d’une histoire qui lui permettent d’être classée parmi «les forces centrales». 

Il estime que la Turquie ne doit pas se contenter d’un rôle régional aux Balkans ou au Moyen Orient car elle ne représente pas uniquement une force régionale mais plutôt une force centrale. Pour cette raison elle doit jouer un rôle stratégique dans différentes régions, en harmonie avec son importance stratégique et mondiale.

Selon Davutoglu, la Turquie est un pays actif au Moyen Orient, aux Balkans, au Caucase, en Asie Centrale, en mer Caspienne, en Méditerranée, au Golfe persique et en mer Noire. De ce fait, user de son pouvoir dans toutes ces régions lui assurera un rôle stratégique dans le monde. Cependant, Davutoglu n’appuie pas l’idée d’une Turquie pont entre l’Islam et l’occident, car cela réduira son rôle comme outil de promotion des intérêts stratégiques d’autres pays.

Deux raisons pour la réussite de Turquie selon la théorie de Davutoglu :

Le ministre turc des Affaires étrangères considère que deux conditions sont nécessaires pour la réussite de Turquie dans l’extension stratégique dans le monde. La première est relative à la scène interne, alors que la seconde concerne la relation de Turquie avec les pays du voisinage. Sur le plan interne, la Turquie doit trouver une solution à la question kurde et établir un pont entre les éléments laïques et islamiques de la société.

Tout savoir sur Davutoglu, ingénieur de la Turquie moderneDavutoglu veut résoudre les deux questions précitées sur des bases libérales. Il estime que la Turquie est capable de régler l’affaire des kurdes d’une manière équitable qui préserve les droits des minorités et d’établir une unanimité sur la laïcité entre toutes les composantes de la société turque.

Au plan international, Davutoglu indique que la Turquie doit développer ses relations bilatérales avec les pays du voisinage. Il expliquait que le concept de «zéro problème avec les voisins», a découlé des efforts de la Turquie durant les dernières décennies pour ancrer le principe du dialogue et de la discussion avec son voisinage, voir même pour édifier des relations privilégiées afin de parvenir à un leadership régional et à un rôle sur la scène internationale.

La Turquie guidera-t-elle la région?

Les partisans de la théorie de Davutoglu sur les relations étrangères de Turquie veulent la transformer en étoile scintillante dans la région, la présentant comme chef du «printemps arabe». D’ailleurs Davutoglu avait lui-même déclaré que «la Turquie orientera et guidera le évènements au Moyen Orient en tant que leader et serviteur».

Cependant, le développement des évènements de Syrie et d’Irak affirme que le «printemps arabe» pourrait se transformer en hiver pour Davutoglu et ce avec la poursuite des problèmes en Irak, notamment avec l’affaire de Tarek Hachémi, des ingérences turques sur la scène irakienne, et de la question des kurdes opposants à l’Etat turc et résidant en Irak. D’ailleurs il n’est plus secret que Davutoglu s’est rendu en Irak où il a rencontré les responsables de Kurdistan d’Irak sans coordination avec les autorités irakiennes. Un fait qui a été vivement critiqué par le gouvernement Maleki et a reflété les problèmes existant entre la Turquie et ses voisins du sud, sans qu’il n’y ait encore de méthode claire pour les résoudre.

Concernant la Syrie, Davutoglu avait parié sur la chute rapide du président syrien Bachar Assad. Un pari dont les dangers s’amplifient jour après jour, après plusieurs années de relations privilégiées avec la Syrie, en application à la politique de «Zéro problèmes avec le voisinage, durant lesquelles on disait que Bachar Assad tentait d’appliquer le modèle de la gouvernance turque en Syrie.

La Turquie, et afin de préserver ses intérêts avec les deux parties du conflit en Syrie, aurait pu jouer le rôle de médiateur, et être acteur actif dans cette crise. Mais il semble que Davutoglu a été dupé par les rapports des services de renseignements occidentaux et israéliens et de certains pays arabes, estimant que la défaite de Bachar Assad serait imminente. Mais la crise syrienne s’est progressivement transformée en bourbier pour les politiques étrangères turques.

La Syrie est-elle désormais un bourbier pour les idées politiques de Davutoglu?

La crise syrienne a rapidement renforcé les relations d’Iran avec ses voisins d’Orient et a exacerbé les tensions. Certains même ont affirmé que la crise en Syrie reflétait un conflit stratégique entre l’Iran et la Turquie sur la scène syrienne.

Par conséquent, la méthode de Davutoglu fondée sur le concept «zéro problème avec les voisins» et caractérisée par l’antagonisme, a essuyé un revers, qui menace désormais le leadership régional turc, ainsi que l’avenir de la politique étrangère de ce pays.

Les rumeurs circulant ces jours-ci sur la destitution de Davutoglu par Erdogan en cas d’échec de ses théories sont-elles bien fondées? Et ses théories seraient-elles un fiasco?
Qui vivra verra.



Source: le quotidien iranien Al-Mashreq
Traduit par: moqawama.org 

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