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Le discours de sayed Nasrallah sur Karish confirme la force du Liban

Le discours de sayed Nasrallah sur Karish confirme la force du Liban
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Par Fouad Karam

Tout le monde attendait le discours du secrétaire général du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah jeudi soir. Pas seulement au Liban, mais chez les Israéliens aussi. Ce rendez-vous qui avait été décidé à la hâte en raison des développements dans le dossier des ressources gazières et pétrolières au large des côtes libanaises et palestiniennes, devait être déterminant pour la suite des événements. Chacun retenait donc son souffle pour savoir si on était à la veille d’une guerre, surtout en cette période complexe dans la région et dans le monde.

Le Hezbollah avait d’ailleurs frappé fort sur le plan de la communication en fixant le rendez-vous du discours du sayed à jeudi à 20h35. La précision était voulue pour adresser un message fort aux Israéliens en leur rappelant l’épisode marquant pendant la guerre de juillet 2006, qui s’était déroulé à 20h35 précisément, lorsque sayed Nasrallah était apparu sur toutes les chaînes de télévision pour dire aux téléspectateurs: Regardez vers la mer, vous verrez le navire de guerre israélien «Saër» en train de brûler, atteint par un missile lancé par le Hezbollah. Non seulement la synchronisation entre les paroles et les actes avait été particulièrement impressionnante ce jour-là, mais de plus, c’était la première fois que le Hezbollah utilisait des missiles sol-mer contre la flotte militaire israélienne qui, jusque-là se déplaçait en toute liberté dans les eaux de l’Est du bassin méditerranéen.

Le fait de choisir ce même timing était donc un moyen de faire comprendre que l’expérience du navire «Saër» peut être rééditée. Les Israéliens avaient bien compris le message caché et ils ont donc suivi attentivement le discours.

Les Libanais aussi, d’autant qu’ils se sentent un peu perdus dans ce dossier, en raison notamment du cafouillage officiel et des polémiques médiatiques et politiques internes à ce sujet. Justement, ceux qui attendaient de sayed Nasrallah qu’il prenne position dans les sujets internes, ont été déçus. Le secrétaire général du Hezbollah a rappelé que la formation qu’il dirige se tient derrière l’Etat et ne veut en aucune manière participer au processus de négociation. Par contre, le sayed a été très ferme sur un point précis: il n’est pas question de laisser les Israéliens et les sociétés qui travaillent pour eux piller les ressources pétrolières et gazières du Liban sous n’importe quel prétexte. Surtout que dans toute la région, a dit sayed Nasrallah, seuls le Liban et la Syrie sont interdits d’exploiter leurs ressources… par les Etats-Unis. De fait, la Syrie qui se remet d’une longue guerre meurtrière n’a pas encore accès à certains de ces champs pétroliers encore occupés et pour ses ressources maritimes, elle est sous le coup de la Loi César américaine qui interdit à toute partie de conclure des contrats avec le régime syrien sous peine de faire l’objet de sanctions. Le Liban, quant à lui, n’a toujours pas pu entamer les travaux de prospection dans les blocs éloignés de la zone controversée avec les Israéliens, pour diverses raisons aussi peu convaincantes les unes que les autres et ce qui ressort finalement, c’est que les Compagnies internationales (comme Total) qui ont pris des contrats dans certains blocs ont soudain arrêté les travaux sur injonction américaine.

Il est ainsi clair que les Américains qui ont beaucoup d’influence au Liban et dans la région ont décidé d’empêcher le Liban de profiter de ses ressources tant qu’il n’en cède pas la plus grande partie aux Israéliens et cesse, à travers le Hezbollah, de constituer une menace pour ces derniers.

Toutefois, aujourd’hui, il ressort du discours du sayed que cette équation de faiblesse a totalement changé. Le Liban a les moyens d’empêcher les Israéliens d’exploiter les ressources du champ de Karish en frappant le bateau grec Energean Power, ainsi que la plateforme pétrolière et gazière qu’il a l’intention d’installer sur les lieux. Le Liban est en état d’alerte a précisé sayed Nasrallah et les tromperies ne passeront pas. Comme par exemple le fait de dire que le bateau est installé à des dizaines de kilomètres de la zone controversée alors qu’il peut forer en profondeur et toucher ainsi aux ressources libanaises, tout en ayant l’air d’être loin. Le secrétaire général du Hezbollah a aussi clairement affirmé que le champ de Karish est considéré comme faisant partie de la zone économique libanaise. A partir de là, que les Libanais discutent avec l’émissaire américain Amos Hocshtein qui doit arriver lundi à Beyrouth, mais en sachant qu’ils sont en position de force. En effet, d’une part, le monde occidental a besoin du gaz existant dans les eaux de l’Est du bassin méditerranéen, depuis la guerre en Ukraine et pour cela, il faut que la stabilité règne dans cette région. Or, la résistance est prête à frapper et elle est à la fois puissante et bien organisée, disposant de missiles précis et efficaces. Les Israéliens et derrière eux les Américains, ne peuvent donc plus agir comme ils le veulent, sans tenir compte du Liban, uniquement soucieux de leur propre profit.

Le discours de jeudi soir était donc un modèle de subtilité, de mots bien pesés et en même temps il a adressé des messages clairs à tous ceux qui sont concernés par ce dossier à l’extérieur et à l’intérieur. A l’extérieur, sayed Nasrallah a bien précisé que la résistance est prête à frapper si on touche aux ressources libanaises et à l’intérieur, il a rappelé que le Liban est fort grâce à son armée, son peuple et sa résistance. Il ne doit donc pas craindre de réclamer ses droits et en même temps, la résistance ne compte pas intervenir directement, elle se tient derrière l’Etat.

Au Liban donc de saisir cette chance. Il a déjà réussi à pousser l’émissaire américain, qui avait suspendu sa médiation parce qu’il jugeait que la position du Liban n’était pas assez sérieuse, à revenir sur place pour reprendre sa mission. Il lui reste maintenant à adopter une position ferme. C’est une question nationale qui ne supporte pas les surenchères et les zizanies habituelles. Il y va de l’avenir du pays et de l’intérêt des générations futures.

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