La Résistance, carte maîtresse du Liban dans la défense de ses ressources gazières
Par Samer Zoughaib
«Israël» a franchi un nouveau pas dimanche 5 juin dans ses tentatives de s’emparer des ressources gazières du Liban. Mais la Résistance se tient prête à assumer ses responsabilités dans la défense des droits du pays.
Chassez le naturel il revient au galop.
«Israël» a confirmé dimanche 5 juin la justesse de ce proverbe en décidant de commencer l’exploitation du champ gazier disputé de Karish, au mépris des revendications du Liban et du processus de négociations indirectes pour la délimitation de la frontière maritime entre le Liban et la Palestine occupée sous l’égide des Etats-Unis.
En lançant d’une manière unilatérale le processus d’exploitation des ressources gazières dans une zone contestée, l’entité sioniste montre une nouvelle fois sa nature expansionniste et agressive. Une entité qui, après s’être emparé d’une terre ne lui appartenant pas et d’en avoir chassé le peuple palestinien, son propriétaire légitime, s’emploie à prendre possession des richesses et des ressources naturelles de ses voisins.
L’arrivée dimanche de l’unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FPSO) de l’entreprise grecque Energean Power aux abords du champ de Karish montre la détermination israélienne à créer un fait accompli, comme l’a dit le Premier ministre libanais Najib Mikati. Cette démarche est sans doute motivée par les plans des Etats-Unis et des pays européens d’accélérer le processus de production et d’acheminement du gaz en Méditerranée orientale pour essayer de trouver un substitut au gaz en provenance de Russie.
Michel Aoun : Une «provocation» et un «acte hostile»
«Israël», l’Egypte, Chypre, la Grèce et la Jordanie ont accepté de coopérer à ce projet mais pas le Liban. L’exploitation du gisement de Karish s’inscrit donc dans le cadre d’une vaste stratégie portant sur le réagencement du marché mondial du gaz dans le but de réduire la dépendance de l’Occident au gaz russe.
Le niveau officiel «israélien» s’est abstenu de commenter directement les développements en cours. Ce sont les médias et les analystes qui ont pris soin de faire parvenir les messages que le commandement politique et militaire souhaite relayer.
La presse et les «communicants» «israéliens» ont ainsi évoqué de présumés plans pour assurer la protection de la plateforme de forage contre toute éventuelle attaque.
Ce que l’on sait pour l’heure c’est que la plateforme flottante est effectivement arrivée aux abords de la partie du champ disputé de Karish, située à 90 kilomètres des côtes de la Palestine. Elle n’a pas commencé les travaux de forage, ce qui ne veut pas dire que ceux-ci ne débuteront pas dans les jours qui viennent.
La ligne 29, que l’armée libanaise estime être la frontière maritime du Liban, traverse presque en son milieu le gisement disputé. Entamer l’exploitation dans ce secteur est une «provocation» et un «acte hostile», comme l’a souligné dimanche le président de la République Michel Aoun. Le chef de l’Etat rappelle dans un communiqué avoir envoyé «il y a plusieurs semaines» une lettre aux Nations unies dans laquelle il est rappelé que le champ gazier de Karish se trouve dans la zone contestée et que Beyrouth «tient au respect de ses droits sur ses ressources offshore». Dans cette missive, «le Liban demandait au Conseil de sécurité de réclamer à «Israël» de ne pas forer dans les zones controversées, ce qui pourrait constituer une menace pour la sécurité des deux pays».
Nagib Mikati a de son côté accusé l’entité sioniste de chercher à provoquer «une nouvelle crise» avec le Liban, en «empiétant sur ses ressources offshore» et en cherchant à «imposer un fait accompli». «Cela est extrêmement dangereux et pourrait créer des tensions dont personne ne peut prévoir les répercussions. Nous mettons en garde contre les conséquences d’une telle procédure avant la fin de la mission du médiateur américain Amos Hochstein, dont la reprise est très importante», a déclaré M. Mikati. «Nous appelons l’Onu et toutes les parties concernées à comprendre la situation et obliger l’ennemi israélien à arrêter ses provocations», a-t-il ajouté.
Mobilisation politique et diplomatique au Liban
Ces prises de positions officielles libanaises sont intervenues après d’intenses concertations menées par le président Aoun avec le commandant en chef de l’armée, le général Joseph Aoun, à qui il a demandé de «lui donner toutes les données précises officielles afin de prendre les mesures nécessaires.»
«Israël» profite non seulement de la partialité du médiateur américain Amos Hochsteinm qui est d’origine «israélienne» mais aussi de la confusion qui règne entre les dirigeants libanais au sujet du processus de négociations indirectes et des demandes libanaises.
Après «l’erreur» commise en 2009 par le Liban, qui a estimé dans un accord signé avec Chypre que sa frontière maritime passe par la ligne 1 –ce qui lui fait perdre d’importants secteurs de sa zone d’exclusivité maritime-, Beyrouth a revendiqué la ligne 23, qui passe plus au sud. Mais la délégation militaire libanaise chargée des négociations est allée au-delà, en affirmant que la frontière maritime passe en réalité par la ligne 29.
Le président Aoun a appuyé cette revendication mais s’est abstenu de signer le décret 6433, amendant le tracé de la frontière maritime libanaise.
Cette question est entrée dans le bazar interne, donnant lieu à des surenchères, ce qui a affaibli la position des négociateurs libanais. Cela a offert à l’ennemi et à son protecteur américain une brèche qu’ils essaient d’exploiter à fond.
Le Liban doit définir clairement ses droits
La carte la plus efficace et la plus forte que détient le Liban dans cette confrontation ayant pour enjeux ses ressources en hydrocarbures reste, sans conteste, la Résistance.
Le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, a maintes fois répété que la Résistance est prête à assumer ses responsabilités dans la défense des droits maritimes du Liban, comme elle le fait pour ses droits terrestres. Il a cependant précisé qu’il revient à l’Etat de déterminer l’étendue de ces droits.
En février dernier, le président du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammed Raad, avait martelé qu’«Israël» ne pourra pas exploiter son gaz offshore tant que le Liban ne pourra pas en faire de même.
Dans cette vaste confrontation qui se profile à l’horizon, le Liban officiel doit d’abord unifier sa position, ce qui semble être sur la bonne voie.
Selon des sources informées, Beyrouth a sollicité l’intervention rapide du médiateur américain pour relancer le processus de négociations indirectes et stopper les velléités «israéliennes». Si la réponse de Washington tarde à venir, le président du Parlement Nabih Berry a demandé une réunion urgente du gouvernement pour approuver les amendements au décret 6433.
Dès lors, l’Etat aura clairement défini la limite et l’étendue des droits du Liban, ce qui permettra à la Résistance d’accomplir sa mission aux côtés de l’armée eu du peuple.