Yémen: Les armes occidentales alimentent le conflit
Par Simon Petite
L'Arabie saoudite et les Emirats font la guerre grâce aux énormes commandes passées auprès des Etats-Unis et des Européens
Pourquoi les médias occidentaux parlent-ils beaucoup moins du Yémen que de la guerre en Syrie? Pour de nombreux critiques, ce serait à cause des ventes d’armes à l’Arabie saoudite et ses alliés du Golfe engagés dans le conflit chez leur voisin. Un raccourci mais qui repose sur une réalité irréfutable. Pour les marchands de canons, le Golfe persique est un eldorado.
Selon l’Institut de recherche international sur la paix de Stockholm (SIPRI), qui fait autorité sur les flux de matériel militaire, le flot d’armes vers le Moyen-Orient a doublé entre la période 2008-2012 et la période 2009-2013. Dans le même temps, tous les autres continents ont connu une stagnation ou une baisse des importations d’armes. Dans le monde, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont respectivement le second et le quatrième plus important client de l’industrie d’armement. Les rebelles houthis, eux, sont soumis à un embargo de l’ONU sur les armes, qui n’est pas hermétique.
Etats-Unis en tête
Rien à voir avec le volume de livraisons d’armes en faveur des belligérants saoudiens et émiratis. Avec 3,4 milliards de dollars de livraison en 2017 (le double de l’année précédente), les Etats-Unis sont, sans surprise, le premier pourvoyeur d’armes à Riyad, toujours selon le SIPRI. Ils sont suivis par le Royaume-Uni (436 millions) et l’Allemagne (105 millions). Contrairement aux deux premiers, Berlin a décidé de suspendre ses ventes d’armes à Riyad après l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Quant à la Suisse (44 millions d’exportations de matériel de guerre en 2016, selon le SIPRI), elle vient de renoncer à assouplir l’exportation de matériel militaire vers les pays en guerre.
Suite à l’affaire Khashoggi, le débat sur l’exportation d’armes a pris de l’ampleur, mais les principaux pourvoyeurs d’armes de la pétromonarchie refusent de revoir leur politique. Les milieux proches de l’armement font valoir que d’autres Etats, comme la Russie ou la Chine, profiteraient de l’aubaine. L’exemple de l’Espagne illustre les réticences des Occidentaux à se passer des marchés du Golfe. En septembre dernier, le nouveau gouvernement socialiste annonçait renoncer à plusieurs contrats avec Riyad. Il a fait machine arrière par peur de perdre des emplois.
Source : www.letemps.ch