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A Washington: un double piège tendu à l’Eglise, les patriarches l’avortent

A Washington: un double piège tendu à l’Eglise, les patriarches l’avortent
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La conférence de Washington pour «défendre les chrétiens», à laquelle ont pris part les patriarches du Levant, a constitué un bon début pour la naissance d'un lobby oriental chrétien dans la capitale américaine. Pourtant, on a l'impression que certains ont tenté de tendre un traquenard à cette conférence, dont le timing a coïncidé avec l'annonce, par Washington, de la mise en place d'une coalition mondiale de lutte contre «l'Etat Islamique». Un piège perçu aussi dans les discours de certains participants, ayant rendu hommage à «Israël».

Comme si c'étaient deux conférences tenues à Washington, il y a quelques jours, sous le thème de «la défense des chrétiens». Dans le même moment et lieu. La première, publique, marquée par les discours des prélats de l'Eglise et leurs positions humaines globales. La secondeversion, minée par des calculs et des agendas, derrière les rideaux épais de la salle des conférences. C'est ce que dévoilent les constats de plusieurs participants, ainsi que plusieurs informations encore non publiées. Mais le plus dangereux réside dans l'impression selon laquelle la deuxièmeversion de la conférence, a constitué un guet-apens ou une embuscade tendue à la première, à l'Eglise levantine et aux chrétiens du Liban et de la région.

Dans la première impression autour de la conférence, des propos sur la positivité du A Washington: un double piège tendu à l’Eglise, les patriarches l’avortentprojet et sa dimension historique. On y a applaudi un exploit. Pour la première fois, une conférence ecclésiastique organisée à ce niveau. Cinq patriarches et des représentants des chefs des autres églises, ainsi que plus de mille participants, réunis dans la capitale américaine Washington.

17 membres du Congrès, dont la star, Ted Cruz. Un entretien officiel à la Maison Blanche, débuté avec Suzanne Rice et clôturé d'une demi-heure avec Barack Obama.Tous les détails de ce jour furent exceptionnels, ce qui justifie l'éloge et la gratitude.

Dans les milieux des organisateurs, on parle d'un budget de cinq millions de dollars, réservé à l'évènement. Une démarche sans précédent au niveau des chrétiens du Levant dans la capitale américaine. On affirme que ce qui y a été réalisé, a constitué un bon début, qui nécessite dorénavant un genre d'institutionnalisation permanente afin d'engendrer, pour la première fois, le concept tant rêvé d'un lobby levantin chrétien à Washington. Pourconfronter les lobbys ennemis et frères. Un premier pas sur une voie estimée une exigence par les conférenciers, vu la nature de la conjoncture, et jugée possible, grâce au potentiel perçudurant ces trois jours à Washington... ci-dessus, un aperçu concis sur la premièreversion de la conférence.

Par contre, plusieurs participants ont détecté dans la seconde des signes assez négatifs et dangereux. Ils disent qu'une embuscade maligne a résidé dans la tenue de la conférence dans la capitale américaine, dans ce moment politiquedélicat, pour les pères de l'Eglise, comme pour leurs partisans et pays. Ils affirment que tout connaisseur de la politique américaine, pas nécessairement de ses coulisses, tire cette conclusion. Que signifie que l'Eglise levantine se rende dans le Congrès américain, juste avant quelques semaines des électionspartielles prévues novembre prochain ? Que signifie que cette même Eglise se rende à la Maison Blanche, le jour de la commémoration du 11 septembre et simultanément avec la déclaration, par le président américain, de la guerre contre «l'État Islamique» ?

En réponse à la première question, les participants à la conférence et les experts en matière de chaos américain, indiquent que la visite du Congrès, en ce jour, est similaire à une visite en Israël. Ils précisentmême, qu'écouter les propos desmembres du Congrès, candidats d'un nouveau mandat, équivaut à écouter des propos des faucons sionistes les plus extrémistes. Et ce pour une simple raison : on est en pleine campagne électorale. C'est le moment propice pour courtiser le lobby sioniste à Washington, afin d'obtenir son soutien financier, médiatique et politique. Chaque membre du Congrès,candidat aux élections de novembre, est en ce moment la voix d'«Israël». Une voix encoreplus aigüe que celle de Sharon et de Netanyahu et de ceux décédés avant le premier ou pas encore nés, ces démons du projet sioniste.

Ici, à Washington, ce n'est pas une question de conviction intellectuelle. C'est une simple incarnation de la théorie du marché. Dans le marché du Congrès à l'heure actuelle, la demande sur les produits sionistes bat son plein. Celui qui veut promouvoir sa candidature ici, en ce moment, doit se présenter en tant que pro-sioniste invétéré. A la manière d'un flash publicitaire «extrême show» : vous avez trente secondes pour annoncer au consommateur que vous êtes le plus apte à répondre à ses désirs. Trente secondes publicitaires égalisentsoixante jours de performance politique. Donc, vous n'avez, dans ces instants limités, que le choix d'exagérer, comme moyen de délivrer le message, suivant la rhétorique électorale sioniste...

Dans le Congrès américain, ce 10 septembre, le phénomène fut apparent, flagrant, choquant. 17 sénateurs, une exception ou deux, ont prononcé des discours démagogiques, populistes et pire encore. Des stars dans leur majorité, des surenchères pour provoquer l'acclamation et un clin d'œil malin à la sortie de l'estrade. Un des députés américains, est venu, les muscles tordus, les cheveux coupés à la Marines. Un jeune homme sorti de l'adolescenceil y a quelques années. Il s'est empressé d'expliquer. Le fameux type avait guerroyé en Irak. Il est fier d'avoir défendu les Etats-Unis, leur démocratie, leurs libertés et leurs valeurs...et puis d'évoquer l'Irak à l'heure actuelle, pour annoncer qu'il ressent une grandejoie voire une extase. «Les criminels de «Daech» sont en train de frissonner de frayeur dans leurs trous et caves, après avoir entendu le rugissement de nos chasseurs»...on l'acclame avec enthousiasme. Les visages du patriarche Rahiet des autres prélats se crispent. Ils perçoivent le piège doux. Les discours se poursuivent.

Un autre héros des guerres américaines prend la parole. Il monte sur la tribune de la défense des chrétiens pour prononcer un discours plus explicite. Il relate ses exploits historiques. En 1988, il a sauvé 14 chrétiens incarcérés (comme il le prétend) dans une prison de Damas. Le patriarche Lahham ne fait pas attention aux détails de ce discours. Le député américain estépargnédu courroux. Ce député poursuit. Il a contribué au sauvetage du médecinsoudanais, Mariam Ibrahim, accusée d'apostasie, de la peine capitale... De cette manière, le néo Cow-boy a tracé les limites de la bataille, du nord de l'Afrique vers le Levant, afin dedéfendre les chrétiens. C'est de la sorte une néo-Croisade. On a donc besoin d'une Eglise. Le visage du patriarche Rahise crispe davantage...les indices de la crise se sont succédés dans les discours hollywoodiens des sénateurs du Congrès. Un de ces derniers a révélé à l'auditoire, avoir lu les derniers mots écrits par John Kennedy dans le discours que ce président n'avait pas prononcé dans ce jour noir du 22 novembre 1963. Le président martyr lui avait confié ces mots, à lui et aux générations qui croient encore en son charme : «Dans cette Nation, et cette génération, notre destinée, pas notre choix, est d'être les gardiens de la liberté dans le monde !»

Le point culminant du spectacle fut dans les propos simples, spontanés, de l'un des membres du Congrès : «l'armée américaine de l'air sera dans quelques jours prête à protéger les chrétiens et les minorités religieuses en Irak et en Syrie. En fait, nous avons besoin de ceux qui connaissent bien nos ennemis. Nous avons besoin de ceux qui comprennent leur langue et leur mentalité. Pour cette raison, je demande à ceux qui maitrisent la langue arabe et qui comprennent la mentalité de ceux-là, de contacter la CIA !». Oui, la même. L'Agence Centrale des Renseignements. Ce type propose aux conférenciers de s'enrôler comme agents et espions à la solde de la CIA. Les visages des prélats s'assombrissent encore plus. Sachant que la question est ici normale. A l'entrée de Langley, on a inscrit une devise anglaise célèbre : «Vous connaissez le Droit...». Tout est bon pour l'exploitation. Pour ce, la citation de John Kennedy fut orpheline durant le carnaval, contrairement aux expressions tirées de la Bible. Tous les prophètes, les psaumes, les évangiles, les livres de sagesse furent cités ce jour-ci sur la colline du Capitole. Ainsi que toutes les techniques bonnes à l'éblouissement. C'était le début de l'embuscade. Les patriarches ont compris. Ils se sont immunisés. Ils ont commencé à se préparer au jour suivant.

Entre le premier et le second jour de la conférence, le temps était interminable. Les indices inquiétants se multipliaient. Les maitres de la conférence ne voulaient pas des paroles concernant le Liban. La priorité est pour la région. Irak et Syrie. Pourquoi ? LesAméricains le veulent. Nous devonsexécuter leur volonté. Une des religieuses, militante humanitaire en Syrie, a été menacée d'être chassée de la conférence si elle prenait la parole. Un de ceux qui ont haussé le ton contre le discours sioniste de Ted Cruz durant le dîner, fut interdit d'entrer dans la salle de laconférence, le jour suivant. Un des adjoints des patriarches en fut informé. Il a retiré son permis d'entrer et l'a donné au banni. «Prends ma photo, mon nom et mon identité. Tu me représente dans la conférence. Si on t'oblige de sortir, je sortirai, ainsi que les prélats !».

Il ne manquait pas que le communiqué-scandale, publié par les organisateurs autour de l'imbroglio provoqué par Ted Cruz. Un communiqué qui évoque «la présence de quelques voix hostiles à Israël dans la salle». Et puis l'arrivée d'un diplomate israélien à l'hôtel dans la soirée, pour semer la confusion. Mais il s'est rapidementavéré que ce diplomate est venu pour assister à une autre cérémonie, organisée dans le lieu cette nuit-là...

Si le premier piège consistait à cerner les chrétiens de l'Orient dans le contexte d'un discours américain, sioniste par excellence, sur fond électoral et si le piège du Congrès visait à exploiter le sang de la liberté en Orient, en faveur de quelques voix dans les urnes d'Oklahoma ou d'Iowa, le second piège avait une dimension exécutive. Il fallait que l'Eglise du Levant assure la couverture à la décision de guerre américaine. Cette dernière qui consiste à mener des raids aveugles contre les pays de la région, et leurs populations. En d'autres termes, les pères de l'Eglise devaient se rendre, mandatés par les leurs et par les conférenciers, chez la conseillère de la Sécurité Nationale dans la Maison Blanche. D'y entrer par une porte étroite. Sans accueil officiel. Ils devaient se rendre au siège du commandement de la Planète par la porte des visiteurs ordinaires. Il fallait qu'ils attendent plus de dix minutes près du check-point. Que l'on examine leurs passeports et que leurs noms soient cités sur la longue liste des visiteurs en ce jour historique du 11 septembre, et ce, sous le soleil brulant. Qu'ils attendent encore et encore, puisque le nom d'un des prélats comprenait une lettre latinedifférente de celle inscrite sur la liste du garde. Ils ont attendu, patienté. Debout. Les prélats se sont résignés face au message. Ils se sont obstinés. Tenaces et persévérants. Transcendants. Puis ils sont entrés pour renverser la table par un message écrit, signé par tous les pères de l'Eglise, sans exception aucune. Ils ont été le porte-voix : «Nous voulons que vous soyez des artisans de paix, non des artisans de guerre». Ensuite, un fleuve des paroles : «Nous sommes les fils de cette terre, sa population autochtone. Nous ne sommes pas un pont, ni un porte-avion sur le territoire de nos patries, ni des diasporas étrangères, ni des colons, ni des dhimmis».

Les prélats ont avorté la double embuscade. La conférence de Washington a pris fin. Demain, la guerre pourrait éclater. Peut-être pas. Mais la paix est encore insaisissable. Une illusion. Un mirage. Pourquoi ? On en parlera.

Article paru dans le quotidien libanais Al-Akhbar, traduit par l'équipe du site

 

 

 

 

 

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