Fatima et Hamza... La tragédie de deux enfants fuyant la mort à Ghouta

Fatima ne peut pas oublier l’image du corps de son père recouvert de sang, ni le gémissement de sa mère, qui a été forcée de laisser seul son petit Hamza quand elle a été touchée d'une balle mortelle. Même la nuit, rien ne peut empêcher l'horreur des scènes mortelles au long du passage sécurisé créé par l'armée arabe syrienne pour la fuite des civils des zones contrôlées par les terroristes à l'est de Ghouta. Fatima, une petite fille de dix ans, était incapable de faire quoi que ce soit. Elle tenait fermement le bras de son frère Hamza, ils rampaient le long des vergers jusqu’au poste de contrôle de l'armée syrienne le plus proche, qui a été alerté de la présence des deux enfants, l'un des officiers s’est alors précipité pour les sauver alors que ses collègues ont ouvert le feu pour sécuriser leur passage.

La décision fatale

Fatima raconte au site al-Ahed, comment son père a pris la décision de prendre sa famille et de fuir vers la zone de sécurité créée par l'armée syrienne pour les civils. L'homme a vite compris que les groupes armés ne leur permettront pas de s’enfuir et les forceront à rester, comme ils ont fait avec beaucoup d'autres civils qui ont été abattus ou mis en prison. Il a choisi la tombée de la nuit pour se lancer dans la tâche la plus dangereuse de sa vie. L'homme porta sa fille Fatima alors que sa femme portait Hamza. Ils se précipitèrent vers le chemin de la liberté qui n’était pas loin d’eux, ils devaient traverser un court chemin entre les vergers. Mais les traitres ont pu les repérer et leur tirèrent dessus comme punition pour avoir pris la décision de s’enfuir. A ce moment, le destin de Fatima s’est bouleversé, cette petite a dû prendre le rôle d’un adulte, de devenir père, mère et la sœur à son petit frère bouleversé par ce qu'il vient de vivre. Après avoir entendu les gémissements de sa mère mourante  et la chahada qui sortait avec peine de la bouche de son père mourant, Fatima a pris la main de son frère et l’a conduit tout droit vers la liberté, traversant les vergers sous le coup de feu, jusqu’à leur arrivée au point de contrôle le plus proche de l'armée syrienne, qui a alerté l'un de ses membres d’un possible mouvement suspect dans les vergers, «Ce sont deux enfants, protégez mon passage pour que je puisse avancer vers eux» cria l’officier choqué. Ainsi, les deux enfants effrayés ont pu franchir le pas vers la liberté sauvés par l’armée qui s’est précipitée à leur secours.

* La mère des martyrs embrasse les orphelins

L'armée syrienne transportait Fatima et son frère Hamza vers un foyer. Hamza était sous le choc, et sa sœur Fatima qui s’était rendu compte de la situation de son frère nous a suppliés de ne pas lui poser de questions sur la mort de ses parents. Cette scène s’était gravée dans l’esprit des enfants qui pleuraient en permanence. Des soldats ont essayé de soulager les deux petits, en les dorlotant et leur achetant des friandises, en attendant l’arrivée de la «Mamie Oum Mohammed» qui a pris en charge la tâche la plus dure  de soulager la douleur émotionnelle de Fatima et Hamza. Oum Mohammed est une dame de Diabians dans l'est de Ghouta, son mari et ses trois enfants sont tombés en martyre alors qu’ils se battaient aux côtés de l'armée arabe syrienne, ce qui l’a encouragé à embrasser Fatima et Hamza puisqu’elle connaissait bien la douleur qu’ils ressentaient.  Elle les a conduits dans une chambre dans le centre d'hébergement, «après s’être douchés, je leur ai ramené de nouveaux vêtements puis, nous avons tenu de longues conversations afin de ne pas les laisser glisser dans le silence de leurs souvenirs douloureux», a-t- elle expliqué au site al-Ahed

Une autre dame qui attend depuis longtemps à la porte du passage sécurisé, la sortie de ses quatre filles mariées, coincées à Ghouta. Elle a trouvé consolation en s’occupant des deux petits orphelins. «Je crains beaucoup pour mes filles, j’ai surtout peur de la famine, les terroristes ont confisqué la nourriture et n’en donne qu’à ceux qui combattent avec eux contre l'armée syrienne, a-t-elle déclaré. Avant d'ajouter: «Je souhaite que mes filles réussissent à sortir, mais pas de la manière dont sont sortis Fatima et son frère Hamza.»

Les deux petits pris en charge par des enfants

L'abri était plein d'enfants qui ont fait leurs efforts pour soulager Fatima et Hamza. Ahlam prit la main de Fatima, la serre dans ses bras et dit: «Elle est comme ma sœur.» Fatima sourit à cette affection et cet amour qu’elle reçoit mais ne quitte pas son frère des yeux, le petit de son côté a été entouré d’enfants qui essayaient de le distraire. Nous demandons à Fatima de la situation à Ghouta, notamment celle des civils, s’ils essayaient de fuir ou pas, elle répond sans hésitation: «Oui, beaucoup de personnes ont essayé de fuir avant nous mais les terroristes les empêchaient en leur tirant dessus, tout le monde a faim bien que les terroristes aient une nourriture abondante, ils la distribuent uniquement aux familles de ceux qui combattent avec eux, Ils ont soulevé les barricades pour empêcher les gens de sortir et ont jeté certains d'entre eux en prison.»

Les sourires timides de Fatima ont rapidement disparu lorsque Hamza s’est mis à hurler appelant sa mère. Fatima qui s’était précipité vers lui, essayait de le calmer en lui disant «Ne sois pas triste mon amour, maman est au ciel.»

Après avoir traversé le chemin de la mort laissant derrière elle ses parents, tués par les terroristes, Fatima serre fort son frère, espérant de lui procurer un sentiment de sécurité et de confiance après l’épisode tragique qu’il a vécu. A eux deux de franchir leur avenir incertain comme ils ont franchi le chemin de la mort.

Source : Al-Ahed, traduit par l’équipe du site