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Lorsque le Hezbollah et le CPL décident de renouer leur dialogue...

Lorsque le Hezbollah et le CPL décident de renouer leur dialogue...
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Par Fouad Karam

Le Hezbollah, dans une délégation de haut niveau, regroupant le chef du bloc de la résistance Mohammed Raad et les députés Ali Ammar et Hassan Fadlallah, a repris le chemin de Rabié. La démarche avait été préparée depuis quelque temps déjà, dans le plus grand secret pour éviter qu’elle ne soit court-circuitée. En effet, les parties ravies du désaccord survenu entre le CPL et le Hezbollah, depuis la fin du mandat du général Michel Aoun et l’appui du Hezbollah à la candidature du chef des Maradas Sleiman Frangié pour la présidence de la République, étaient nombreuses et elles font de leur mieux pour rendre toute reprise de dialogue entre les deux formations difficile, sinon impossible.

Pourtant, des deux côtés, en dépit d’une certaine déception et peut-être même d’une grande frustration, la volonté de renouer est restée présente. Mais il fallait trouver justement le bon moment et le bon scénario. Le Hezbollah avait donc pris la décision depuis un moment déjà, mais il attendait de passer à l’action que la rencontre puisse être fructueuse. De son côté, le CPL était convaincu que le Hezbollah ne pouvait pas accepter «d’enterrer» l’entente de Mar Mikhaël -conclue le 6 février 2006 et qui a tenu bon pendant des années, en dépit des critiques, des pressions et de la véritable guerre qui a été menée contre elle, à la fois par des parties libanaises qu’internationales, les Américains en tête-, sans rien faire pour tenter de la réanimer. Il attendait même une visite d’une délégation du Hezbollah à Rabié chez l’ancien président de la République Michel Aoun pour les fêtes de fin d’année. Mais elle n’a pas eu lieu en raison probablement des tensions entre les partisans des deux camps. Mais dans leurs réunions closes, les responsables du CPL étaient convaincus qu’en dépit des divergences et des reproches, le Hezbollah restait un des interlocuteurs libanais les plus fiables et les plus sérieux.

La guerre de Gaza et les menaces proférées par les responsables israéliens à l’encontre du Liban ont fourni l’occasion idéale pour renouer le dialogue entre les deux anciens alliés.

En effet, quoi de plus logique et de plus normal que de parler ensemble des menaces qui pèsent sur le pays et des moyens de les neutraliser ? Cette démarche est même devenue nécessaire après les déclarations de l’ancien président de la République à une chaîne libanaise sur son opposition au principe de l’unité des champs de bataille, développée par «l’Axe de la résistance» et au fait d’ouvrir un front de soutien à Gaza à partir du Liban. Le Hezbollah était ainsi convaincu que les déclarations de l’ancien président Michel Aoun étaient dictées par son souci de préserver le Liban mais en tant qu’ancien militaire, il comprendrait la situation sur le terrain ainsi que le plan et les objectifs du Hezbollah.

De son côté, dès qu’il a appris l’intention d’une délégation du Hezbollah de lui rendre visite, le général Michel Aoun a accueilli favorablement l’idée. Le rendez-vous a été fixé d’un commun accord et il n’a pas été révélé à la presse avant sa tenue. Selon des sources proches des deux parties, la rencontre était cordiale et les discussions franches. La délégation du Hezbollah a fait un exposé de la situation à Gaza et au Sud du Liban depuis les 7 et 8 octobre (dates du Déluge d’Al-Aqsa et de l’ouverture du front au Liban). Elle a aussi précisé les raisons qui ont poussé le Hezbollah à ouvrir le front à partir du Liban ainsi que les détails de ses attaques contre des cibles essentiellement militaires israéliennes. La délégation du Hezbollah a rappelé que l’équation de la dissuasion établie au Liban depuis la guerre de 2006 a tenu bon pendant des années et nul n’avait alors protesté contre la non-application totale de la résolution 1701 qui avait mis un terme à la guerre. Ce n’est que lorsque les «Israéliens» font des tentatives pour briser cette équation et ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs que des parties internationales évoquent l’application «totale» de la résolution 1701. Au cours des 18 dernières années, il y a eu, selon le ministère libanais des Affaires étrangères plus de 30 000 violations israéliennes de cette résolution et aucune partie internationale n’a ouvert la bouche. C’est dire combien les demandes actuelles sont tendancieuses et visent à servir les intérêts des «Israéliens», pour qu’ils puissent se sentir rassurés au sujet du front du Liban et se consacrer ainsi à réaliser leur plan à Gaza. Toujours selon le Hezbollah, l’ouverture du front du sud aurait donc deux objectifs, celui de soutenir Gaza et il n’est pas question de le transformer en front ouvert et principal et celui d’empêcher les «Israéliens» de modifier l’équation de la dissuasion en programmant des attaques contre le Liban sans craindre la moindre riposte.

Selon les sources précitées, la conversation était donc ciblée, sérieuse et pratiquement technique. En même temps, il y avait réellement un grand respect des deux côtés et une volonté réelle de rapprocher les points de vue.

En effet, des deux côtés, il y a un sentiment que cette période de froid n’est pas dans l’intérêt des deux parties et surtout pas dans l’intérêt du Liban. Sans le dire vraiment, les interlocuteurs semblaient conscients de la nécessité de maintenir leur relation, tout en essayant de trouver de nouveaux terrains d’entente et peut-être même de revoir certains points de l’entente de Mar Mikhaël. Les divergences entre le Hezbollah et le CPL existent, elles portent essentiellement sur des points internes, comme la gestion du pouvoir, ce que le CPL appelle l’édification de l’Etat et la lutte contre la corruption. Alors que pour le Hezbollah, les vrais problèmes du Liban viennent des «Israéliens» et du blocus qui a été imposé à ce pays par les Etats-Unis. Sur ces sujets, les débats peuvent être longs et les points de vue qui semblent opposés peuvent devenir complémentaires. Mais en cette période particulièrement délicate pour le pays et pour la région, l’unité interne doit être la priorité et le CPL et le Hezbollah peuvent en donner le meilleur exemple...

Après la rencontre de Rabié peut-on donc dire que la relation a été rétablie entre les deux anciens alliés, le Hezbollah et le CPL ? Les sources proches des deux parties précisent que le chemin pour arriver à un tel résultat est encore semé d’embûches, dont notamment le dossier présidentiel, mais un grand pas a été accompli...En tout cas, il semble que les deux parties ne soient pas opposées à l’idée de reprendre le dialogue.

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