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Liban: Attention à l’instrumentalisation de la colère des jeunes

Liban: Attention à l’instrumentalisation de la colère des jeunes
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   Par Samer Zoughaib

La colère exprimée par les jeunes qui ont manifesté dans le centre-ville de Beyrouth contre l’incurie de la classe politique est parfaitement légitime et reflète un ras le bol général. Mais les craintes d’une instrumentalisation et d’une récupération par des acteurs locaux et externes de ce mouvement de protestation sont réelles. Voilà pourquoi.

Pour être honnête, le mouvement de protestation qui occupe le pavé à Beyrouth depuis bientôt trois semaines est légitime. Il intervient dans un contexte de blocage des institutions, de difficultés économiques et de dangers sécuritaires, représentés par la menace terroriste aux frontières orientales du Liban. Il est l’expression du ras le bol d’une jeunesse longtemps marginalisée,Liban: Attention à l’instrumentalisation de la colère des jeunes
dégoutée par la corruption qui mine la vie publique et par le clientélisme et le népotisme, qui caractérisent le système politique. Un système verrouillé par le confessionnalisme et dominé par les mêmes visages, depuis des décennies.
Ceux qui dirigent et profitent de ce système depuis un quart de siècle sont connus de tous. Usant de réflexes communautaires, ils ont instauré des mécanismes qui leur ont permis de piller les biens publics à travers des transactions douteuses et des monopoles, qui ont généré des milliards de dollars. Il est étonnant que ces parties, responsables des malheurs vécus aujourd’hui par cette jeunesse, ne sont nulle part clairement dénoncées lors des manifestations. Comme s’il existait une volonté de les laisser dans l’ombre, pour ne pas leur demander des comptes et leur faire assumer la responsabilité des méfaits et autres crimes qu’ils ont commis.

Qui finance le mouvement?

L’écrasante majorité des jeunes qui descendent dans la rue est certainement mue par de bonnes intentions et par une réelle volonté de changement. Mais il est légitime de se demander s’il n’existe pas des meneurs ou des groupes occultes qui tirent les ficelles et qui tentent d’orienter la colère de la jeunesse dans une direction bien déterminée, sans pour autant que les manifestants ne soient conscients de ces tentatives de manipulation, d’instrumentalisation et de récupération. Cette question se pose avec autant d’acuité que certains slogans laissent perplexes, notamment ceux qui sont véhiculés par le collectif fictif appelé «Tous c’est-à-dire tous» (kellon ya3ni kellon), et qui rejoignent ceux du groupe «Dans la rue» (3a chare3). Ces slogans injustes et illogiques placent indistinctement dans un même sac tous les hommes politiques du Liban, accusés de corruption, sans aucun égard pour ceux parmi eux qui sont connus pour leur honnêteté et leur dévouement à leur patrie.
Cette généralisation est tout sauf innocente. Elle permet de mêler le nom du leader de la Résistance, sayyed Hassan Nasrallah, à tous les responsables politiques du pays. Cette manœuvre est clairement apparue dans des émissions télévisées en directe et dans les déclarations de plusieurs militants des collectifs participants aux manifestations. Leurs propos affichent une volonté délibérée et artificielle d’inclure le nom de sayyed Nasrallah aux côtés de personnalités connues pour être des symboles de la corruption et de la mauvaise gouvernance.
Il devient légitime, dans ces circonstances, de se demander qui se tient derrière ces agissements?
Dans ce contexte, le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, a posté un tweet assez significatif: «Les investigations ont montré qu’un pays arabe joue un rôle efficace et négatif pour encourager les casseurs». Dans une interview à la chaine de télévision saoudienne Al-Arabiya, il a réitéré les mêmes accusations, ajoutant que ce pays «finançait» le mouvement de protestation.   

Une générosité suspecte

Ces propos à peine voilés rejoignent des informations selon lesquelles l’ambassade des Etats-Unis et le centre de recherche animé par Azmi Béchara pour le compte du Qatar jouent un rôle de premier plan dans les tentatives de réorienter le mouvement de protestation dans des directions servant des agendas bien précis. Cela leur permettrait d’isoler les militants honnêtes et patriotes, issus des mouvances de la gauche, du parti communiste, du groupe de l’ancien ministre Charbel Nahas et de l’ancien député Najah Wakim, qui souhaitent maintenir le cap afin que leurs revendications soient satisfaites, sans dévier des constantes nationales.
La couverture extrêmement généreuse des événements par certains médias, connus pour leurs liens financiers avec des pays du Golfe, est plus que suspecte. Surtout que ces médias accueillent sur leurs plateaux certaines figures du mouvement de protestation connues pour leur hostilité viscérale à l’égard de la Résistance.
Le mouvement de protestation est légitime et doit se doter d’un commandement formé de militants sans arrière-pensées politiques et sans agendas étrangers. Il doit œuvrer pour une véritable réforme du système qui commence, de l’avis de tous les experts et analystes, par l’élaboration d’une loi électorale moderne et réellement représentative. Si ce mouvement ne parvient pas à s’organiser, à se purger de ses éléments subversifs et à bien ordonner ses priorités, il se transformera, alors, en une simple «révolution de couleur», qui mettra le pays sur un tout autre chemin que celui auquel aspire l’écrasante majorité des jeunes libanais.

Source: french.alahednews

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