Discours du secrétaire général du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah sur les frontières maritimes
Au nom de Dieu
Mon discours ce soir est consacré à un seul sujet qui concerne le dossier du pétrole et du gaz et le tracé des frontières maritimes ainsi que l’importante échéance qui nous attend.
Ces quelques jours, le Liban est entré dans une nouvelle phase très importante avec l’arrivée du bateau grec ayant pour mission de forer et de prospecter. Ces derniers jours, il y a eu beaucoup de commentaires et de spéculations au sujet du rôle de ce bateau ; les opinions étaient contradictoires. Certains estimaient que la mission du bateau était la prospection alors que pour d’autres, il s’agit carrément d’extraire le gaz et le pétrole, considérant que les Israéliens ont atteint la dernière étape et qu’après l’extraction, il ne leur restera plus qu’à exporter et vendre leur gaz et leur pétrole. Le bateau s’est installé tout près du champ de Karish, situé sur la ligne 29, donc dans la zone controversée entre le Liban et l’entité israélienne. A travers cette démarche très avancée, l’ennemi israélien est en train de dire aux Libanais et au monde que dans très peu de temps ( certains parlent d’un à trois mois. Il faut que les spécialistes donnent leur avis sur la question), il commencera à extraire le gaz et le pétrole du champ de Karish. Le bateau se transformera ainsi en plateforme pétrolière et gazière et il fera donc le nécessaire pour le stockage et la transformation pour que le pétrole et le gaz puissent être transportés. Il dit aussi que c’est son droit naturel et il est indiscutable.
Après l’annonce de ce développent sur le terrain, il y a eu des déclarations et des communiqués qui expriment la position de l’Etat libanais. Le président de la République a ainsi déclaré que toute activité de la part des Israéliens dans la zone controversée constitue une provocation et un acte hostile. Le président du Conseil a été dans le même sens assurant que « toute tentative de créer un fait accompli dans la zone conflictuelle est très dangereux et le Liban s’accroche à ses droits… ». De même, le président de la Chambre a déclaré que le Liban ne peut pas rester les bras croisés face à ces abus…
Donc, nous sommes face à un développement nouveau, une réalité nouvelle et une étape nouvelle. Ce qui s’est passé au cours des derniers jours est une agression et une provocation contre le Liban. Il s’agit de mettre le Liban dans une situation difficile qui l’oblige à faire son choix clairement et définitivement. Quand nous parlons d’une zone controversée, nous exprimons ainsi le point de vue de l’Etat libanais et des responsables. Car, en ce qui nous concerne, en tant que parti et que résistance, nous ne parlons pas de frontières, ni de ligne 23 ni de ligne 29, ni même de zone controversée.
Les Libanais se trouvent ainsi devant une grande question : comment doivent-ils se comporter et que doivent-ils faire ? Ce développement coïncide avec le souvenir du déclenchement de l’invasion israélienne du Liban en juin 1982, qui a permis aux Israéliens d’envahir tout le Sud, le littoral, la Békaa Ouest, Rachaya et une grande partie du Mont-Liban jusqu’à la capitale, Beyrouth. A cette époque, l’invasion avait placé le Liban devant de grands défis et des développements dangereux. Je l’évoque aujourd’hui, car nous sommes désormais face à une échéance qui doit devenir une grande cause nationale, quel que soit le qualificatif qu’on lui donne. Lorsque nous parlons des frontières maritimes, des eaux territoriales, de la zone économique, des ressources libanaises en pétrole et gaz, cela signifie qu’elles appartiennent à tout le Liban. Chaque Libanais doit se sentir concerné, indépendamment des détails et des qualificatifs, indépendamment de la région dont il vient, de sa religion, de sa confession et de sa ligne politique. Quelles que soient les divisions qui séparent les Libanais, cette affaire doit être celle de tous les Libanais qui considèrent qu’ils appartiennent à cette patrie et sont attachés à sa souveraineté et à ses intérêts. Nous devons commencer par là. C’est cette cause qui doit être présente et qui aurait dû l’être depuis longtemps. Pourquoi disons-nous qu’il s’agit d’une cause nationale ? D’abord parce que ces ressources sont très grandes, pour le Liban, en tout cas. Certains parlent d’au moins 200 milliards de dollars, d’autres vont jusqu’à 300 milliards de dollars et d’autres encore parlent de 500 milliards et même plus. Nous sommes donc face à un trésor enfoui dans les eaux territoriales libanaises et ce trésor appartient à tous les Libanais. Que personne ne dise que telle partie appartient à telle localité ou à tel groupe. Ce trésor est celui de tous les Libanais. Ensuite, ce trésor est le seul espoir qui reste de sauver le Liban et de le sortir de sa situation difficile, de lui épargner l’effondrement qui le guette. C’est le seul espoir aujourd’hui de traiter la situation économique, sociale, financière et monétaire. C’est le seul espoir pour des lendemains meilleurs. C’est cela l’importance de ces ressources aujourd’hui et c’est pourquoi il s’agit réellement d’une cause nationale.
Nous devons donc nous fixer un objectif à la hauteur de cette cause. Nous ne voulons pas parler en tant que parti ou revenir à la division politique entre 8 et 14 Mars, entre anciens et nouveaux, système ou non, pouvoir et opposition. Ce sujet doit être au-dessus de tous ces calculs. Dans cette cause nationale, quel doit être l’objectif ? D’abord il faut protéger ce trésor inestimable, ensuite il faut l’extraire et enfin, il faut l’exploiter d’une façon maximale pour pouvoir accomplir les étapes de prospection, de forage, d’extraction et d’exploitation, pour traiter les nombreuses crises dans lesquelles se débat le pays. C’est cela l’objectif de la cause nationale.
Cette cause fait face à une série de dangers. Le premier, et cela n’est pas nouveau, depuis qu’il a commencé à être question des ressources pétrolières et gazières du Liban, et du tracé des frontières, les Américains et les Israéliens n’ont cessé de vouloir priver le Liban d’une importante superficie et de fixer les frontières bien en deçà de ce qu’elles sont. C’est le débat au sujet des fameuses lignes et du tracé des frontières…Ce que disent les Israéliens, les Américains… et les Libanais. Le premier danger est donc d’arracher au Liban une importante superficie qui renferme des ressources importantes.
Le second danger c’est celui d’empêcher le Liban de faire de la prospection et ensuite d’extraire ses ressources lorsqu’il les découvrira. Pour l’instant, le Liban est interdit de le faire. Nous devons le savoir et les Libanais doivent trouver un moyen de régler cette question. Des compagnies ont été empêchées de se présenter, alors que le Liban a ouvert à plusieurs reprises et pour des périodes assez longues la voie en lançant des appels d’offres. D’autres se sont présentées, ont obtenu l’adjudication mais ne peuvent pas entamer le travail. Il ne s’agit pas là d’un problème technique, mais bel et bien politique. Les Américains et les Israéliens ont menacé ces compagnies, même celles qui sont censées travailler dans les zones non conflictuelles. Si elles veulent entamer les travaux, elles sont menacées de sanctions. Si on prend l’image générale dans le bassin méditerranéen, je ne suis certes pas un expert, mais je vois et j’entends dire que Chypre que Chypre, la Grèce, la Turquie, l’ennemi israélien ont le droit d’entamer les travaux, l’Egypte aussi… Tous ces pays ont le droit, sauf le Liban et la Syrie. Pour la Syrie, il y a la loi américaine Cesar, mais sur le Liban il n’y a pas publiquement de sanctions, seulement celles-ci le touchent indirectement. Toute compagnie qui viendrait entamer les travaux dans les eaux libanaises est menacée de sanctions. C’est donc le second danger. C’est-à-dire que si nous protégeons notre trésor, celui-ci doit quand même rester dans les fonds marins et dans le sous sol et nous ne pouvons pas en profiter.
Le troisième danger c’est le fait de vider les champs libanais de leurs ressources. Tous ces Etats ont commencé à extraire le gaz et le pétrole, les Israéliens s’approchent du champ de Karish, de la zone controversée et du champ de Cana et d’autres. Si le Liban continue à prendre son temps dans les négociations, un, deux, ou même 5 ans, cela signifie qu’il n’extraira pas son trésor. Qui le fera ? Ces Etats. Si nous devons attendre que le Liban soit autorisé à extraire le pétrole et le gaz, peut-être qu’à ce moment, il n’y en aura plus. Ou bien, il n’y aura plus que des miettes. C’est le troisième danger : vider les champs présents dans nos eaux ou qui nous entourent. Le Liban a déjà perdu de longues années. Je ne veux pas entrer dans les détails. Mais aujourd’hui, le temps presse. Nous n’avons plus que quelques semaines, voire deux ou trois mois avant que le bateau grec ne commence à extraire le gaz et le pétrole du champ de Karish. Lorsque cette extraction commencera, les choses seront plus difficiles et plus dangereuses concernant cette échéance qui attend le Liban.
Face à tous ces dangers, tous les Libanais devraient éprouver un sentiment de responsabilité nationale, morale, religieuse et humaine et entamer le travail. Nous sommes face à une cause qui n’est pas moins importante que celle de la libération de la bande frontalière. Nous souvenons tous qu’après l’invasion de 1982, une résistance formée de groupes multiples a émergé, dans toutes les régions et les cités où il y avait une occupation. Cette résistance a contraint l’ennemi à se retirer partiellement en 1985, créant en même temps, ce qui a été appelé la bande frontalière. Les nouvelles générations ignorent peut être cet épisode. En 1985, les occupants israéliens se sont retirés d’une partie du Sud et de la Békaa Ouest et d’autres régions qu’ils avaient envahies, laissant ce qu’ils ont appelé la Bande frontalière comme une ceinture de sécurité pour eux. A cette époque, une grande cause nationale qui s’appelle la libération de cette « ceinture de sécurité » s’est posée. C’était le projet de la résistance dans toutes ses factions. Pendant 15 ans, au cours desquels de nombreux sacrifices ont été consentis ( je les ai évoqués au cours des derniers jours), la résistance s’est donc battue jusqu’à la libération qui a eu lieu en 2000. Le peuple libanais, la résistance, l’armée, bref toutes les composantes ont beaucoup supporté pour paver la voie de la libération. Il y a eu des souffrances, des martyrs, des blessés, des exactions, des prisonniers etc.
Aujourd’hui, cette grande cause nationale qui s’appelle les eaux territoriales et la zone économique, le pétrole et le gaz n’est pas moins importante que celle de la libération de la bande frontalière. La responsabilité n’est pas non plus moins importante. Plus même, cette cause devrait être un catalyseur pour pousser tout le peuple et l’Etat à assumer la responsabilité plus que lors de la libération de la bande frontalière. Le catalyseur pourrait se résumer ainsi : Dans le cas de la bande frontalière, certains pouvaient penser que les principaux bénéficiaires de la libération de cette zone sont les habitants de Bint Jbeil, de Hasbaya, de Marjeyoun, de Jezzine et des localités le long de la ligne de front au Sud. Mais dans le cas des ressources pétrolières et gazières, le bénéficiaire c’est tout le peuple libanais, non les habitants d’une région en particulier. Cela devrait être un bon motif pour que tout le monde assume la responsabilité.
Je voudrais aussi attirer l’attention sur un point précis. Dans le cas de la libération de « la ceinture de sécurité », le temps n’est pas un facteur important. Si cette libération tarde, un deux ou dix ans, la terre restera. Il faut profiter de l’expérience du passé et en tirer les leçons. C’est le cas notamment des fermes de Chebaa et des collines de Kfarchouba. Par contre, concernant les ressources en pétrole et gaz dans les eaux de la zone controversée, le temps compte énormément. Chaque jour qui passe, surtout dans le retard que nous avons pris est une menace pour nos ressources. Dans le dossier de la libération, le temps n’est pas aussi nocif, il peut même être un atout et jouer en faveur de la résistance, car la résistance ne mène pas une guerre classique. Il s’agit d’une guerre destinée à miner l’ennemi et cela prend du temps.
Le sujet d’aujourd’hui est donc différent. Il faut prendre cela en considération. Si nous considérons donc que cette cause nationale a trois violets : la protection de nos ressources, l’extraction de nos ressources et le fait d’en profiter, il faut le faire au plus vite, surtout en raison de la terrible situation économique, financière et sociale du pays. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe de prendre notre temps. Si on peut donc se procurer un milliard de dollars dans un an, ou six mois, c’est le devoir de tous les responsables et de tous les Libanais de travailler pour l’obtenir. C’est une question vitale pour le Liban et pour son peuple. Notre objectif à tous doit être au service de cette cause nationale. L’objectif direct doit être d’empêcher l’ennemi d’extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish et empêcher que son activité commence, et peut-être qu’elle l’av déjà fait. Il faut suivre les activités du bateau de façon discrète et à travers les renseignements. Il se peut qu’il ait déjà commencé à installer les tuyaux. Je ne connais pas les détails techniques d’une telle opération. Mais il faut empêcher l’ennemi d’accomplir toute action qu’il pense entreprendre avant l’opération d’extraction des ressources du champ de Karish.
A ce sujet, je voudrais encore dire que le lieu où le bateau s’est ancré importe peu. Car, ces derniers jours, nous avons entendu beaucoup de commentaires et d’indications, contradictoires sur ce sujet du genre : le bateau s’est arrêté au nord de la ligne 29, non à son sud, tout près ou encore il l’a dépassée. Le sujet est entré dans le bazar des surenchères, en particulier à l’égard de la résistance. Le problème n’est donc pas si le bateau s’est arrêté au Nord ou au sud de la ligne 29. Ce qui compte c’est qu’il se soit ancré à proximité du champ de Karish qui fait partie de la zone controversée, la ligne le coupant en son milieu pratiquement. En fait, il s’agit d’une ligne virtuelle qui est sous la mer et par conséquent, comme le champ est un tout, ce que l’on peut extraire d’une partie du champ appartient à sa totalité. Ce qui est extrait de ce champ est dont un sujet de controverse et fait partie de la totalité de la controverse. De toute façon, pour nous, il s’agit des eaux palestiniennes et des ressources palestiniennes. En tout cas, il n'est donc pas important de dire de quelle partie l’ennemi va commencer à extraire car ce champ est un tout et il se situe dans la zone controversée. L’ennemi s’approche de l’extraction alors que le Liban est interdit de le faire, non seulement dans cette région, mais aussi dans les blocs non controversés. C’est pourquoi l’objectif doit être d’arrêter le travail du côté de l’ennemi.
Que possède le Liban dans cette confrontation ? D’abord, il possède le droit. Il s’agit ici de droits naturels juridiques. Je le répète, nous autres, nous ne mêlons pas des lignes , ni du tracé. Certains disent à ce sujet qu’ils ne comprennent pas la position du Hezbollah. Nous avons pourtant déjà expliqué nos raisons et notre position, en précisant que dans ce dossier, nous nous tenons derrière l’Etat. Maintenant si ce sujet est évoqué en Conseil des ministres ou au Parlement, nous pourrons revoir cette position. Il ne s’agit donc pas d’une position rigide et fermée. Si donc ce sujet est évoqué au Parlement ou en Conseil des ministres, il se peut que nos ministres et nos députés aient une opinion sur la question. Je souhaite que ceux qui nous pressent de donner une opinion attendent un peu. Certes, nous ne nous laisserons pas entraîner dans une étude globale, mais il se peut qu’en se basant sur certaines études, on puisse aller vers une ligne qui pourrait compliquer encore plus la situation et la position de l’Etat. Nous voulons donc rester éloignés et depuis 2000, nous avions dit que le tracé des frontières relève de la responsabilité de l’Etat. C’est à lui de l’assumer.
Revenons donc à ce que possède le Liban dans cette confrontation. D’abord, le droit. Ensuite, le mobile et le besoin. Ce qui rend sa responsabilité encore plus grande. Car il a un droit, il en a besoin et il n’est pas pressé, il pense qu’il a le temps et qu’il n’est pas nécessaire de provoquer un problème dans la région pour cela. Pourtant, il est devant des échéances dangereuses dont nous avons déjà parlé, notamment la situation économique et l’effondrement du pays.
Troisièmement, il possède la force, sous le titre de l’armée et de la résistance. Le commandement de l’armée peut parler de la force de celle-ci et de ce qu’elle peut faire. Mais concernant la résistance, permettez-moi de vous dire puisque nous parlons d’une confrontation nationale, qu’elle dispose d’une capacité matérielle, militaire, sécuritaire, logistique et humaine en mesure d’empêcher l’ennemi d’extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish. Comment ? Cela fait partie des détails techniques. Mais sachez que nous avons cette capacité.
Aujourd’hui, vous avez entendu l’ennemi dire qu’il a envoyé des sous-marins et des navires de guerre et qu’il a même installé un bouclier d’acier dans la mer, à proximité des frontières nord de la Palestine et qu’il est ainsi prêt à faire face à tout danger qui le menacerait. Mais moi je vous dis que toutes les mesures de protection de l’ennemi ne parviendront pas à protéger cette plateforme pétrolière qui s’appelle le bateau grec, ni à permettre à l’ennemi d’extraire les ressources du champ de Karish. Je ne tiens pas là un langage destiné à relever le moral ou à provoquer les émotions. Il y a quelques jours, nous avions une réunion avec les frères et j’ai vérifié tout cela soigneusement. Nous nous engageons devant le peuple libanais à dire que la résistance est en mesure militairement et matériellement d’empêcher l’ennemi d’extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish controversé. Toutes les mesures de l’ennemi ne parviendront pas à protéger ce bateau, cette plateforme maritime et cette opération. Les Israéliens ont commencé à menacer et à dire : nous ferons ceci et cela, nous ne laisserons pas une pierre sur l’autre au Liban… Nous sommes habitués à ce genre de propos. Ils ne sont pas nouveaux. En tout cas, les dirigeants israéliens savent parfaitement que dans toute guerre avec le Liban, ils risquent de perdre bien plus que le Liban. Ils le savent dans les détails et dans les chiffres. Je peux même dire que s’ils vont vers une telle option et s’ils accomplissent une telle sottise, cela aura des conséquences pas seulement stratégiques sur l’entité, mais elles seront aussi existentielles. On ne sait même pas si le problème restera limité au Liban. C’est pourquoi ces menaces ne devraient effrayer personne au Liban.
Le Liban possède donc une série d’éléments de force très importants. Il faut leur ajouter un autre élément très important que nous devons travailler à former : la responsabilité du peuple libanais auquel je m’adresse aujourd’hui. La force de la position populaire est un facteur très important. Certains ont déjà exprimé leur position, parfois avec enthousiasme, parfois avec calme et responsabilité et parfois encore dans le cadre de la surenchère. Par exemple, certains ont dit : que fait la résistance ? Pourquoi elle ne bombarde pas ? Certes, ce genre de propos ne nous dérange pas. Au contraire. Critiquez-nous, demandez-nous d’agir, accusez-nous, cela ne nous dérange pas. Le Liban a aujourd’hui besoin d’une grande position populaire unifiée. Certaines forces politiques sont restées silencieuses jusqu’à présent, comme des blocs parlementaires et des députés. Ici, je ne parle pas de la réaction et de comment régler ce problème. Je parle ici de l’essence de la cause. J’ai déjà dit et j’y reviens : la libération de la bande frontalière n’a jamais fait l’unanimité nationale. IL y avait des parties qui avaient une vision différente au sujet de la présence de l’ennemi dans cette bande et de celle de l’ALS d’Antoine Lahad. Dans l’affaire actuelle où est le problème ? Il s’agit d’une grande cause nationale dont les bénéfices iront à tous les Libanais. Il s’agit des ressources de tous les Libanais. Si l’ennemi voit qu’il y a une unanimité, ou en tout cas qu’une majorité écrasante des Libanais, notamment les forces qui se disent souverainistes veulent défendre et protéger les ressources du Liban et y sont très attachées, s’il voit qu’il y a une position unifiée et une détermination quasi-unanime, croyez-moi, il refera ses calculs. Il changera sa position, car il se retrouvera face au peuple, alors qu’en général, il mise sur les divisions internes et sur la possibilité d’isoler la résistance ou des régions du pays. C’est en cela qu’il considère que le Liban est faible. Mais lorsqu’il verra en face de lui un peuple uni, avec ses députés, ses forces politiques, ses ministres, ses responsables, ses élites, tout le monde uni dans une position ferme, claire et collective, il changera. Il est certain que cette unité est l’un des points forts du Liban.
Ce sont donc nos points de force. Nous ne sommes pas faibles. Le Liban n’est plus celui de 1982, lorsque les Israéliens pouvaient l’envahir et piller ses ressources avec arrogance et agressivité sans qu’il puisse faire quelque chose. Non, le Liban n’est pas faible.
Sur le plan des options, l’Etat dit actuellement qu’il veut poursuivre les négociations. Nul ne peut refuser. Certes, certains ont peut-être une position de principe à l’égard des négociations ou même à l’égard du médiateur américain qui est certainement partial et injuste puisqu’il est favorable à l’ennemi, mais l’Etat veut négocier. Selon la Constitution, la responsabilité de la négociation relève des prérogatives du président de la République, qui est connu pour sa fermeté, sa force, son courage et sa détermination. C’est lui qui a dit à plusieurs reprises : vous pouvez m’éliminer mais vous n’aurez pas ma signature ! C’est cela son histoire et son passé. L’Etat veut donc aller vers les négociations, dimanche, lundi ou mardi, à ce qu’ils disent. Il y aura certainement une position libanaise unifiée, en tout cas j’espère que ce sera le cas. Je ne veux pas entrer dans les détails de la position sur laquelle ils pourraient s’entendre, mais il est certain que s’ils le font, cela donnera plus de poids à la position libanaise. De même, la position populaire donnera plus de force au négociateur libanais. L’heure n’est donc pas aux surenchères, aux accusations et à la volonté de marquer des points les uns sur les autres. Ce n’est même pas le moment d’ouvrir les dossiers, notamment celui de ce qu’a fait l’Etat au cours des dix dernières années. Si vous l’ouvrir, faites-le, mais pas maintenant. Le moment actuel est celui de la solidarité, de l’unanimité et de la coopération. Il faut se présenter aux négociations en rangs unis. Lorsque le chef de l’Etat et le négociateur officiel sentira que l’Etat est derrière lui, la résistance, l’armée et le peuple, lorsqu’il sentira que personne ne compte le poignarder, dans le dos, dans le cœur ou encore dans la main, sa volonté, son moral, sa fermeté seront plus solides dans la défense des droits du Liban. C’est normal, tous les humains sont ainsi. Il faut donc que tous soient à la hauteur de cette grande bataille nationale. Nous devons tous sortir des petites considérations, et des petits intérêts, villageois, confessionnels, politiques, nous devons sortir des petits enjeux car cette bataille concerne le sort du pays, son avenir et ses ressources qui appartiennent à tout le peuple libanais.
L’autre point, c’est le réalisme des pronostics. Nous ne devons pas donner aux gens des espoirs irréalistes. Nous devons profiter des expériences passées. Notamment lorsqu’en 1982, l’ennemi a envahi le Liban, il a été question du tracé des frontières terrestres. Pourtant, celles-ci l’étaient déjà. Il y avait une résolution internationale à ce sujet qui datait de 1978, le 11 mars 1978. Dans cette résolution adoptée par le Conseil de sécurité de l’ONU, il était dit qu’il fallait respecter totalement la souveraineté du Liban et son indépendance dans ses frontières reconnues internationalement. Ce qui signifie que les frontières terrestres étaient délimitées. Il se peut qu’il y ait des conflits sur certains points, mais les frontières sont délimitées. Dans la même résolution, le Conseil de sécurité demande à Israël de se retirer immédiatement de tout le territoire libanais et de cesser toutes les opérations militaires contre la souveraineté du Liban.
Cela se passait en 1978. Mais au lieu de s’exécuter, Israël a envahi le Liban en 1982 et ses troupes ont atteint la capitale Beyrouth. C’est pourquoi aujourd’hui ceux qui réclament l’amendement du décret 6433 pour confirmer la ligne 29, je sais qu’ils sont sincères et qu’ils font cela par amour de leur pays, je ne veux donc pas discuter ce point, si c’est utile ou non. Je voudrais juste rappeler que même si cela devait arriver, cela ne signifierait pas que le dossier est clos et que les droits du Liban sont consacrés. Le président de la Chambre a ainsi déclaré que si nous n’aboutissons pas à un résultat dans les négociations, le gouvernement devrait se réunir, amender le décret 6433 et l’envoyer aux Nations Unies. C’est bien, mais cela ne signifiera pas que c’est réglé. Cela peut faire partie de la bataille, mais cela ne signifie pas que l’affaire est réglée. Il y avait des frontières reconnues internationalement et la résolution 425 de l’ONU et malgré cela, l’invasion de 1982 a eu lieu. Nous sommes face à un ennemi qui ne reconnaît pas la loi internationale ni les résolutions de l’ONU. Il n’en fait qu’à sa tête et ne croit qu’à la logique de la force. Dans ce cas comment faut-il l’affronter ? Jusqu’à présent, il n’a répondu à aucune injonction. La seule pression efficace a été celle de la résistance, des attaques soutenues et de la guerre d’usure. C’est ce qui l’a poussé à un premier retrait en 1985 puis au retrait total en 2000. Après cela, il s’est aussi retiré de Gaza, non pas grâce aux résolutions internationales ou par respect du droit international. C’est pourquoi, pour nous, indépendamment de ce que nous pensons de la ligne 29 et de nos frontières et du fait que si nous l’adoptons nos ressources et nos droits seront préservés, il vaut mieux ne pas avoir de grandes attentes.
J’en arrive au point le plus important qui porte sur la résistance. Cette option existe aujourd’hui chez l’Etat libanais, chez le peuple et chez la résistance bien sûr. Je dois d’abord préciser qu’une des raisons de son existence et de sa légitimité, c’est qu’elle contribue à protéger le Liban. Nous parlons toujours de l’équation tripartite « armée-peuple-résistance ». Nous mettons l’armée en premier. Ces derniers jours, certains qui ont des positions connues à l’égard de la résistance et de ses armes ont dit qu’ils n’avaient aucun inconvénient à ce qu’il y ait une opération militaire contre le bateau pour empêcher les Israéliens d’extraire le gaz et le pétrole, à condition que ce soit l’armée qui la mène. Pour nous, nous y sommes favorables, nous sommes derrière, à côté et même devant elle. Pour nous, ce qui compte, c’est qu’une telle opération soit menée. Nous ne tenons pas à nous mettre en avant. . La résistance considère que sa mission principale est de contribuer à protéger et à défendre le pays, sa souveraineté, sa terre, ses eaux territoriales, sa dignité, ses ressources, sa sécurité etc. c’est la nature de nos responsabilités et notre devoir moral, national, humain, religieux et jihadiste. Ensuite, la résistance a des moyens, elle est forte et elle ne peut pas rester les bras croisés face au pillage des richesses du Liban et à la destruction du principal espoir du peuple libanais. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et nous ne le ferons pas inchallah.
Pour la résistance, toutes les options sont ouvertes. Ils disent : « présentes sur la table ». Oui, c’est le cas, sans hésitation. Lorsque l’ennemi menace de déclencher une guerre, il doit savoir que la résistance ne craint pas celle-ci. Nous avons toujours dit que nous ne voulons pas la guerre, mais aujourd’hui, notre objectif, c’est le pétrole et le gaz du Liban pour que le pays puisse rester. Nous ne voulons pas la guerre, mais nous ne la craignons pas. A notre avis, le peuple libanais devrait clairement dire aux Israéliens et à ceux qui sont impliqués avec eux dans cette agression qu’il faut arrêter cette activité. En tout cas, je le dis, moi, au nom de la résistance et de ce que je représente.
Hier, ils ont publié un communiqué qui constitue un indice important. Certes chacun peut le lire de son point de vue. Mais toujours est-il que les ministres de la guerre, de l’Energie et d’autres, dans le gouvernement de l’ennemi ont déclaré dans un communiqué que le bateau grec n’a pas dépassé la ligne controversée et il veut extraire dans la zone israélienne du champ de Karish. Ces propos en réalité ne changent rien, puisque comme nous l’avons dit, il s’agit d’un même champ, un champ commun. Toute action d’extraction dans le champ de Karish doit s’arrêter. Par conséquent, l’ennemi et son gouvernement doivent attendre les négociations, comme le fait le Liban. Ensuite, le bateau grec et ses propriétaires doivent savoir qu’ils sont des partenaires dans l’agression qui se déroule actuellement contre le Liban et dans cette provocation adressée au Liban. Les propriétaires du bateau et la compagnie qui en a la charge doivent le retirer immédiatement, car cela pourrait avoir des conséquences. Ceux qui ont décidé d’envoyer le bateau dans la zone controversée et qui ont accompli cette provocation doivent assumer la responsabilité de leur action. Ce sont qui devront assumer la responsabilité des conséquences que leur acte pourrait avoir sur le bateau et son équipage. Nous suivrons les développements de près avec les parties concernées. Certes, nous ne sommes pas partie dans les négociations et nous n’avons rien à y voir. Ces négociations relèvent de la responsabilité stricte de l’Etat, du chef de l’Etat en coopération avec les responsables et les parties concernées au sein de l’Etat. Le Hezbollah n’est pas partie dans cette négociation. IL n’en est pas un partenaire et ne sera pas à la table des négociations. Certes, il suit les développements. L’ensemble du peuple libanais attend l’Etat, ce qu’il fera, ainsi que le président. En tant que résistance, nous avons le droit de recueillir les informations nécessaires au sujet de chaque option qui sera choisie. Nous suivrons la situation heure par heure, jour par jour et nous adopterons la position selon ce que nous aurons recueilli. Dans ce contexte, il faut aussi régler la question des compagnies chargées de la prospection. Nous avons des blocs qui ont été confiés à des compagnies, lesquelles ne sont pas venues. Les blocs ont été attribués mais les compagnies ne sont pas venues. L’Etat a prolongé les délais mais il faut que cette question soit réglée. L’Etat ne doit plus donner des délais supplémentaires. Il faut pousser ces compagnies à exécuter les contrats signés avec le Liban, Total et d’autres. Cela nous mène à l’idée de faire des pressions politiques sur les Américains et les Israéliens, sur l’Occident et sur tous ceux qui menacent les compagnies et les empêchent de faire le travail de prospection et d’extraction. Le temps passe, un deux, trois ans quand comptent-elles commencer à faire le travail ? Quand comptent-elles commencer à prospecter, à forer et à extraire ? Quand le gaz sera épuisé ?
Je voudrais encore développer un point. Lorsque nous étions pendant la période des élections, et que nous parlions de la crise économique terrible, nous avons abouti à la conclusion que ce dossier est devenu d’une priorité absolue. C’est pourquoi nous avons pris la décision, qui a filtré dans la presse, de constituer un dossier et une équipe chargée de le faire pour envoyer un message clair et fort, moral et politique, sur l’importance que nous accordons à cette question. Comme nous l’avions promis dans nos meetings électoraux, nous avons donc formé une équipe chargée de suivre ce dossier dans tous ses aspects et ses détails, les ressources maritimes et terrestres, ainsi que les ressources en eaux. Ce dossier sera discuté au sein du Hezbollah et avec les autres parties. Nous tiendrons des conférences, des réunions et des débats sur ces questions et dès que nous aurons des résultats et des conclusions nous les soumettrons aux responsables et au gouvernement. Nous voulons être un facteur d’aide, dans tout ce dossier et dans tous ses aspects. Cela fait partie de nos responsabilités, tout ce qui a trait aux ressources et aux frontières avec la Palestine occupée, les points que l’on dit conflictuels et même les fermes de Chebaa, les collines de Kfarchouba et la partie libanaise de la localité de Ghajar.
Il faudra évidemment recueillir les informations et les données, faire des études et collaborer avec des institutions, des partis, des députés, des ministères, des administrations pour aboutir à une vision claire et pouvoir présenter des propositions et en discuter avec les autres, car il s’agit d’une affaire nationale, non partisane.
Chaque jour je lis une lettre ouverte qui m’est adressée, des congrès et des conférences sont organisés, on s’adresse à nous, on nous critique aussi, pas de problème. Mais désormais, nous avons une instance en charge de ce dossier. Cette instance devra prendre des initiatives et ne pas se contenter de recevoir les suggestions. Tous ceux qui ont des propositions, des idées, des suggestions sur ce dossier peuvent les soumettre à cette instance et nous avons choisi l’ancien député, sayed Nawaf Moussawi pour en prendre la charge. Tout le monde le connaît, il n’est donc pas nécessaire que je parle de lui. Il a toutes les compétences et les qualités requises pour se charger de ce dossier. Il possède la culture, l’expérience, les compétences et le sens des responsabilités nécessaires pour cela. Il a aussi une longue expérience dans le débat et la discussion, dans le cadre des commissions parlementaires notamment. Il devrait donc commencer à assumer cette responsabilité officiellement au cours des prochains jours. Il sera donc prêt ainsi que son équipe pour prendre la charge de ce dossier.
Un dernier mot encore : dans cette bataille nationale, que disent les Américains et les Israéliens au peuple libanais ? Il s’agit d’une zone controversée, vous n’avez pas le droit d’ouvrir la bouche. Nous voulons extraire les ressources et nul n’a le droit de dire un mot. Même dans les zones non controversées, chez vous, il n’ y a ni prospection, ni forage, ni extraction. Autrement dit, nous voulons vous faire mourir de faim...
Est-il besoin que je vous rappelle à quel point la livre s’est effondrée ? Est-il besoin que je vous dise ce que sont devenus les salaires des officiers et des soldats ainsi que des fonctionnaires ? Que font aujourd’hui, un, deux ou 3 millions de Livres ? Combien coûte le pain ? L’abonnement de générateur ? Oui, ils nous poussent vers la faim, vers la famine, pas vers la guerre interne. Inchallah il n’y aura pas de guerre civile au Liban, nul ne sera autorisé à en déclencher une. Mais lorsque la faim se répand de la sorte, il y a un grand danger pour la sécurité civile. Ce qui peut être pire que la guerre civile. Lors de la guerre civile, il y a des lignes de démarcation, mais au-delà, il peut y avoir des zones sûres, mais lorsqu’il n’y a plus de sécurité sur le plan social, tout le monde se retrouve menacé, et dans une situation précaire. Donc, les Etats-Unis et les Israéliens, à travers la politique suivie envers le Liban veulent nous mener vers la faim et vers l’effondrement. Mais nous avons un autre choix qui nous permet de ne pas avoir faim et de ne pas nous effondrer. Il y a peut-être un risque, une aventure aux résultats incertains, mais selon les données régionales et internationales et dans l’examen des points de force et des éléments de faiblesse, il apparaît que le Liban est fort, il est même plus fort qu’il ne l’a été dans le passé, alors qu’Israël n’est plus aussi fort que par le passé. Israël a beaucoup de points faibles. S’il y a donc une position unifiée, officielle et populaire, avec les éléments de force que le Liban possède, si l’ennemi comprend qu’il s’agit pour le Liban d’une bataille nationale et que tout le monde insiste pour préserver les droits du Liban et pour les protéger, nous sortirons certainement vainqueurs . Nous n’aurons même pas besoin de nous lancer dans une aventure ou de déclencher une guerre. Les Libanais sont face à un grand défi qui est lié à leur sort. Il ne s’agit pas d’une question de frontières ou d’un puits de pétrole ou de gaz. Il s’agit du sort du Liban, sur le plan économique, social, politique et sécuritaire. Serons-nous à la hauteur de ce destin ? De cette responsabilité ? Allez en paix.