Le Golfe à l’ombre de la normalisation: la résistance est toujours là
Par Latifa al-Husseini
Pas de position unanime dans le Golfe, sur la légitimation de la normalisation des relations avec l’ennemi. Les régimes suivent une voie, alors que l’opinion du peuple est ailleurs. Le milieu populaire propice aux sionistes n’existe point, alors que les activités de soutien des causes islamiques centrales sont présentes.
Les plateformes de médias sociaux reflètent les tendances des gens, qu'ils rejettent ou soutiennent la normalisation.
La grande majorité des citoyens du Golfe, jugent qu’«Israël» est un ennemi. Selon eux, pas de neutralité à l’égard de la Palestine, ni de paix avec celui qui usurpe les droits de son peuple, de sa terre, ses lieux saints et son patrimoine.
Les Émirats seraient actuellement la scène la plus ouverte aux délégations sionistes, qui s’infiltrent dans la profondeur de l’État. Le rythme de la normalisation est rapide. Empressement dans l’élaboration des accords communs et «agilité» dans la tenue des rencontres bilatérales, une fois sur le territoire du Golfe, et une fois dans les territoires occupés.
Cependant, la position officielle ne s’applique pas sur le peuple émirati. L’image ne suscite point la frustration ni la déception, mais plutôt l’optimisme, même si après un certain temps.
Les Émirats... premier champ de normalisation dans le Golfe
Concernant les démarches inédites entreprises par Abu Dhabi dans le but de consolider l’alliance avec les sionistes, le chef de la ligue émiratie de la lutte contre la normalisation, Ahmad Al-Chiba Al-Noueimi, a qualifié la conjoncture de son pays de «douloureuse», affirmant que la ligue accompagne et surveille ce qui a lieu, et enregistre les effets de la normalisation, ainsi que tous les accords et le nombre des visites sionistes et de certains émiratis pro-sionistes au territoire occupé.
Al-Nouaimi a affirmé que les populations refusent cette orientation des autorités, se basant sur la surveillance des réactions du peuple émirati, bien conscient de l’importance de la cause palestinienne.
Il a ajouté lors d’une interview accordée à AlAhed que les citoyens bien instruits aux Émirats sont nombreux et comprennent parfaitement que cette politique s’oppose aux valeurs et arabité de leurs pays.
Cependant, il se dit préoccupé de l’avenir des générations futures.
«Les gens ont grandi dans le contexte de la cause palestinienne, comprenant son histoire et son lien avec notre foi, notre humanité, nos sociétés, notre arabisme et tout ce qui touche à notre identité», a-t-il expliqué, exprimant son inquiétude pour la prochaine génération, soumise à de nouveaux programmes d’enseignement et à des fausses informations dans les médias, qui diabolisent le peuple palestinien et embellissent l'ennemi sioniste, le qualifiant parfois d'angélique.
Selon Al-Nouaimi, les gouvernements du Golfe vont dans la mauvaise direction, menée par les gouvernements des Emirats et de Bahreïn, à l'exception du gouvernement koweïtien qui soutient la cause palestinienne, tandis que les gouvernements restants se situent dans la zone grise. «Ce plan ne peut aboutir car les peuples s'y opposent, ce qui constitue un très grand défi pour les gouvernements qui se tiennent à l'écart de la volonté des peuples, d'autant plus que le fossé se creuse avec leurs citoyens».
Pour lui, le résultat de la normalisation est tranché. Il a estimé que ses résultats ne seront pas bénéfiques pour les relations de ces Etats avec leurs populations. Pour cette raison, il formule un conseil aux gouvernements ayant encore renoncé à la normalisation, pour bien comprendre quelles en seront les résultats.
On compte donc sur les populations.
Al-Nouaimi a affirmé que le peuple émirati dira son mot et se tiendra en face de son gouvernement, pour exprimer le refus de la normalisation.
Il a affirmé que la position du peuple doit être claire à l’égard de cette cause décisive pour la Nation arabe, même pour l’État émirati ayant toujours soutenu les causes islamiques, conformément à la Constitution de l’État, qui va à l’encontre de la normalisation, jusqu’au moment où le gouvernement a modifié cet article de la Constitution, sans se baser sur une loi. Un fait qui doit pousser le peuple à refuser la politique adoptée actuellement.
Il a considéré que «le gouvernement actuel ne prête pas attention au peuple et essaie de fermer les yeux sur l'environnement qui rejette la normalisation». Par conséquent, il est probable que les EAU subiront de grandes pertes en raison de leur insistance sur la normalisation et la signature de traités qui approfondiraient les racines de l'entité usurpatrice dans la région sur le plan économique, social, éducatif, et religieux, surtout que le gouvernement se dirige vers la soumission totale aux ordres de Tal Aviv, avant de les appliquer.
Est-il possible de freiner la normalisation en vigueur aux Émirats ? Du point de vue d'Al-Nouaimi, il y a deux façons d'y parvenir : soit le problème se termine par une pression du peuple émirati sur le gouvernement pour décourager ces pratiques, soit ce dernier subit une vague de prise de conscience, qui est actuellement exclue en raison de la corruption.
S'appuyant sur l'activité de l'association qu'il dirige, Al-Nouaimi a révélé avoir reçu des menaces et des messages de faux comptes tentant de fragiliser sa volonté. «Ces tentatives pour nous effrayer ne réussiront pas, même si l'affaire va plus loin, parce que la question est une question de principe et de croyance», a-t-il expliqué.
Bahreïn, même course vers l’humiliation
A Bahreïn, le spectacle n'est pas très différent. L'ampleur de la soumission aux ennemis de la nation est déchirante. C'est comme si un marathon était organisé pour obtenir le meilleur prix pour «entrer dans le giron d’Israël» ! Une fois par l’ouverture d’une ambassade de l’ennemi, une autre fois par la signature d’accords sécuritaire, puis par l’accueil de militaires sionistes, arrivant enfin à l’infiltration du Mossad dans les organismes étatiques.
Face à cette scène, l’Association bahreïnie de lutte contre la normalisation s’est mobilisée pour suivre le rythme de ce qui se passe. Depuis sa création en 2002, elle a pris conscience du danger qui pesait sur le Royaume.
Abdelrasoul Ashour, membre de l'association, présente, à travers AlAhed, une approche du mal que vit aujourd'hui son pays en raison du traité d'humiliation signé avec Al-Khalifa.
Ashour a prévenu que «l'entité sioniste, surtout après les percées qu'elle a faites suite à la signature de plusieurs accords avec le gouvernement de Bahreïn, est devenue une menace globale pour tous ceux qui vivent sur cette terre, d'autant plus qu'elle utilise toutes les méthodes pour décomposer la société».
Ashour a expliqué que «la normalisation en soi, est pour l'entité sioniste une exigence stratégique liée à son avenir et à son existence de manière forte ; elle vise donc à atteindre plusieurs objectifs, dont, contrôler le sort des pays de la région en contrôlant les questions vitales de ces pays, y compris l'économie, après qu'«Israël» se soit rendu compte que le contrôle militaire de la région était impossible, adoptant l’option du contrôle économique.
«Par conséquent, nous constatons que cette mesure est entrée en vigueur à Bahreïn, où l'entité criminelle a acquis certaines institutions financières en achetant et en concluant des accords avec des banques et de grandes entreprises», a-t-il expliqué.
Selon Ashour, l'un des objectifs que l'ennemi aspire à mettre en œuvre est de contrôler la sécurité, alors qu'il y a des secteurs très vitaux qu'il a pu pénétrer, comme la santé, l'eau, l'éducation, le commerce et autres.
Ashour a affirmé que «depuis sa création, l'association a travaillé selon ses capacités et les conditions politiques locales, et a atteint ses objectifs en termes de consolidation de la cause palestinienne et de dénonciation de l'entité sioniste qui a tenté d'infiltrer nos sociétés par des titres faux et trompeurs, comme la tolérance religieuse, la coopération artistique et sportive, le tourisme religieux à Al-Qods et d'autres».
Ashour a souligné que «l'une des questions importantes sur lesquelles l'association s'est concentrée était le boycott de tout ce qui concernait l'entité sioniste cancéreuse, notant que cela a joué un rôle important dans la dénonciation des produits sionistes qui ont infiltré les marchés locaux, ce qui a conduit à leur retrait rapide.
Ashour a considéré «le boycott comme une arme importante que le peuple ne doit pas hésiter à utiliser». Dans ce contexte, il appelle le peuple bahreïni à «exprimer continuellement son opinion en rejetant la normalisation avec les moyens disponibles, en particulier le cyberespace, en participant aux événements et séminaires, et en adhérant à l’Association Bahreïnie pour résister à la normalisation avec l'Ennemi.»
La sensibilisation contre la normalisation est du ressort de l'association. Ashour a ajouté que cette dernière a organisé des activités continues à ce niveau en termes de visites sur le terrain dans les écoles, aux côtés d’activités théâtrales.
Il a précisé que l’Association a lancé en 2018 l’Initiative nationale bahreïnie pour la lutte contre la normalisation avec l’ennemi sioniste. Une initiative qui regroupe plus de 20 institutions de la société civile représentant les diverses composantes de la société et ses diverses tendances politiques, idéologiques et intellectuelles, y compris les associations politiques, féministes et professionnelles, et qui mènent des activités de rejet de la normalisation gouvernementale, y compris des déclarations qui ont appelé le gouvernement à annuler tous les accords avec l'ennemi sioniste.
Il a conclu que la lutte nécessite la solidarité de toutes les tranches de la société pour faire face au danger imminent de la normalisation, en particulier les personnalités influentes de la société.