Trump «incitateur-en-chef d’une dangereuse insurrection»: l’accusation reprend jeudi son exposé
Par AlAhed avec agences
Après une journée marquée par des images choc, les procureurs démocrates poursuivront jeudi leur exposé contre Donald Trump, jugé au Sénat pour «incitation à l'insurrection» dans l'assaut meurtrier sur le Capitole.
Le procès historique reprendra à midi dans le même hémicycle où s'étaient engouffrés violemment, le 6 janvier, des manifestants pro-Trump.
Des policiers hurlant de douleur, des élus terrifiés, des assaillants menaçants: mêlant des extraits de caméra de surveillance, parfois inédits, aux vidéos mises en ligne par les émeutiers, l'accusation a rappelé mercredi aux cent sénateurs, à la fois juges, jurés et témoins, qu'ils avaient eux-mêmes échappé de peu «au pire».
Les élus démocrates de la Chambre des représentants, chargés de porter l'accusation contre l'ancien président, ont aussi replacé l'assaut dans le contexte de la croisade post-électorale du milliardaire républicain, qui a toujours refusé de concéder sa défaite face à Joe Biden.
«Le président Trump n'a pas été le témoin innocent d'un accident», comme ses avocats le suggèrent, mais il «a abandonné son rôle de commandant-en-chef pour devenir l'incitateur-en-chef d'une dangereuse insurrection», a lancé Jamie Raskin, qui supervise l'équipe des procureurs.
Le coup de force de ses partisans, au moment où le Congrès certifiait la victoire de son rival, n'est pas survenu «dans le vide»: «La hargne de la foule a été attisée pendant des mois par Donald Trump», a renchéri l'élu Joaquin Castro.
Installé en Floride, l'ancien magnat de l'immobilier a refusé de témoigner. Mais sa voix n'a cessé de retentir dans l'hémicycle de la chambre haute du Congrès, où ses accusateurs ont projeté de nombreux extraits de ses discours, reproduit ses tweets incendiaires, cité ses propos les plus polémiques.
Le grand mensonge
Même s'ils ont peu de chances de convaincre deux tiers des sénateurs nécessaires pour le déclarer coupable, les démocrates entendent marquer l'opinion lors de ces audiences retransmises en direct dans tous les Etats-Unis.
«Le grand mensonge»: c'est ainsi qu'ils ont décrit la longue campagne de désinformation sur l'élection présidentielle entretenue par le 45e président américain qui a répété pendant des semaines, sans preuves, qu'il avait été victime de fraudes électorales massives.
Après l'échec de ses plaintes en justice et de ses multiples pressions sur les agents électoraux des Etats-clés, «le président Trump s'est retrouvé à court d'options non violentes pour se maintenir au pouvoir», a estimé l'élu Ted Lieu.
Il s'est alors tourné vers «des groupes qu'il a cultivés pendant des mois», comme le groupuscule d'extrême droite Proud Boys, dont plusieurs membres se trouvaient parmi les assaillants du Capitole, a ajouté sa consoeur Stacey Plaskett, en rappelant que le président les avait appelés, en octobre, à «se tenir prêts».
Et le 6 janvier, il a lancé à ses partisans rassemblés à Washington, juste avant l'intrusion dans le temple de la démocratie américaine: «Battez-vous comme des diables».
Cible dans le dos
Affirmer que l'ex-président pourrait être responsable des violences d'un «petit groupe de criminels» qui l'ont «absolument mal compris» est «tout simplement absurde», avaient insisté ses avocats par écrit lundi. En soulignant qu'il les avait «exhortés à rester pacifiques».
«On a vérifié les 11.000 mots de son discours, le président n'a utilisé le terme +pacifique+ qu'une seule fois, contre plus de 20 +se battre+», a rétorqué mercredi l'élue Madeleine Dean.
Pire, selon Mme Plaskett, il a désigné à la vindicte son propre vice-président Mike Pence, qui avait refusé de stopper la certification du résultat des élections, ou la cheffe des démocrates à la Chambre, Nancy Pelosi. Il «a mis une cible sur leur dos», a-t-elle lancé.
Soulignant l'influence du tribun sur ses partisans, Joaquin Castro a montré les images d'un homme lisant au porte-voix un tweet de Donald Trump posté en plein assaut: «Mike Pence n'a pas eu le courage de faire ce qu'il fallait pour protéger notre pays», répète le manifestant sur les marches du Capitole.
Vengeance politique
Leur exposé des faits a été salué par le sénateur républicain John Thune. «Ils ont fait un bon travail pour souligner les liens... pour remonter le temps», a-t-il déclaré à des journalistes.
«Trump n'est plus en fonctions et il ne sert à rien, sauf à une vengeance politique, de mener un autre procès», a toutefois tweeté son confrère Ted Cruz.
Donald Trump reste très populaire dans une partie de l'électorat et exerce encore une forte influence sur le parti républicain.
Si certains sénateurs du «Grand Old Party» lui ont imputé une responsabilité dans l'attaque, il semble peu probable que 17 joignent leur voix aux démocrates pour le déclarer coupable, et in fine le rendre inéligible.
Il pourrait être acquitté dès les prochains jours.