USA: la colère à Portland avivée par la présence d’agents fédéraux
Par AlAhed avec AFP
Marchant en première ligne d'une vaste foule de manifestants défilant dans la ville américaine de Portland, Teal Lindseth scande avec ardeur des slogans dans un porte-voix. «Dites-moi à quoi ressemble la démocratie !», lance la jeune femme de 21 ans. «Voilà à quoi ressemble la démocratie !», lui répondent les protestataires, dont les cris sont répercutés en écho par les hauts bâtiments de la plus grande ville de l'Etat de l'Oregon, au nord-ouest du pays.
La détermination des manifestants a été revigorée par l'envoi, à l'initiative du gouvernement de Donald Trump, d'agents fédéraux ayant reçu pour instruction de rétablir l'ordre, si besoin de façon musclée.
La colère de la rue était pourtant en voie d'apaisement début juillet à Portland où, comme dans de nombreuses autres villes des Etats-Unis, un mouvement de protestation contre le racisme et les violences policières avait été déclenché par la mort fin mai à Minneapolis de George Floyd, lors de son interpellation par un policier blanc.
Tout a changé quand ont débarqué les policiers fédéraux, surnommés les «soldats de Trump» par Kate Brown, la gouverneure démocrate de l'Oregon.
«Agitateurs»
Dans de nombreuses vidéos publiées sur les réseaux sociaux, on voit ces agents, en tenue paramilitaire et sans badge visible d'identification, utiliser des véhicules banalisés pour interpeller des manifestants.
Cela a de nouveau attisé les braises de l'ire populaire. Des milliers de manifestants se rassemblent chaque soir à Portland et les échauffourées éclatent systématiquement avec les agents fédéraux.
Ces hommes, déployés par le ministère de la Sécurité intérieure --un organe qui avait été créé pour éviter la répétition des attentats du 11 septembre 2001-- ont recours à du gaz lacrymogène, des balles en caoutchouc ou des grenades assourdissantes pour disperser les foules.
«Qu'on soit de droite ou de gauche, je pense qu'ici dans le Nord-Ouest côté Pacifique, on est très opposé à l'occupation des rues par les autorités fédérales», assure Carlos, un protestataire noir défilant au milieu de la foule.
«Si vous envoyez des soldats fédéraux ici, vous faites enrager toute la région», ajoute-t-il.
Typiquement, une soirée à Portland débute par des rassemblements et des marches dans des artères dont les commerces protègent leurs devantures par des planches, et se termine par des heurts, des manifestants matraqués ou cibles de gaz lacrymogène.
Du côté de la police, on dénonce des «actes illégaux» de la part de contestataires qui jettent des pierres et des bouteilles en direction des forces de l'ordre, également aveuglées par des torches lasers.
Critiquant des «anarchistes et des agitateurs» à Portland, Donald Trump a fait part de son intention d'envoyer des agents fédéraux dans d'autres villes américaines comme Chicago, dans un contexte de résurgence de la criminalité urbaine.
Cette menace, notamment justifiée par «le besoin de protéger les édifices fédéraux», a suscité la condamnation des maires démocrates de ces villes.
«Rentrez chez vous»
Parmi les images vidéo marquantes à Portland figure une séquence où on voit deux agents fédéraux faire irruption d'une camionnette banalisée et saisir un manifestant qui reculait les mains en l'air.
A plusieurs occasions, les agents fédéraux ont répondu de façon très musclée à la contestation, déclenchant des appels croissants à leur retrait de la ville, condensés dans le slogan suivant: «Les fédéraux rentrez chez vous».
Mais les protestataires ont promis de poursuivre leur mobilisation, rejoints notamment par un groupe rassemblant des mères de famille.