Sayed Nasrallah lance le «jihad agricole et industriel», et s’adresse aux USA: «La politique de sanctions placera tout le Liban dans le giron du Hezbollah»
Par AlAhed
Le secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah a prononcé ce mardi soir un discours télévisé dans lequel il a évoqué les derniers développements sur la scène locale et régionale. Voici les idées principales de son discours :
«Que la paix de Dieu soit sur vous. Avant de commencer, je voudrais rappeler certaines occasions que nous allons commémorer ce mois-ci. Je commence par la guerre de juillet 2006 que nous allons évoquer en long et en large prochainement. Nous nous rappelons aussi la guerre contre les takfiris et la victoire sur les groupes terroristes dans le jurd de l’Anti-Liban. Ces jours-ci marquent aussi le décès de l’ayatollah Sayed Mohammad Hussein Fadlallah que nous chérissons pour son rôle majeur dans le soutien et le renforcement de la résistance. Ces derniers jours nous avons perdu un grand ouléma cheikh Mohammad JaafarChamseddine. Il était un grand historien religieux et un grand supporter de la résistance. Il avait fait de grands efforts pour assurer l’unité de notre peuple. Nous présentons nos sincères condoléances à sa famille.
Le jihad agricole et industriel
Dans mon discours je parlerais de la crise économique, de la situation politique locale libanaise, ensuite de la conjoncture régionale. Sur le plan économique, la crise actuelle nécessite le déploiement des efforts de toutes les parties pour trouver une issue. Quand nous parlons des risques de l’effondrement et de la famine, nous devons savoir que tout le monde sera concerné et frappé par cette crise. Aucune communauté ne sera à l’abri de la famine. Ainsi, nous devons avoir le souci de travailler avec un esprit patriotique global. Nous avons besoin d’une approche nationale qui prend en compte la situation de toutes les régions libanaises. Il nous faut des efforts continus pour venir en aide à tous les Libanais et même aux ressortissants arabes sur le territoire libanais. Cette question est avant tout humanitaire qui doit tenir compte de tout le monde.
Quand nous avons parlé de l’ouverture à l’Orient, je n’ai pas dit qu’il faut se détacher du reste du monde. J’ai bien dit que même si les USA étaient notre ennemi politique, nous ne pouvons pas rejeter leurs aides au Liban s’ils nous les proposent. Quel que soit le pays voulant fournir son aide à la Banque centrale du Liban, nous saluons et nous acceptons son initiative. Mais si les USA ont pris la décision de vous asphyxier et de vous assiéger, qu’allez-vous faire ? allez-vous observer passivement la situation ou bien travailler pour apporter des solutions efficaces ?
Nous saluons toute aide internationale, à l’exception de celle d’Israël bien entendu. Bon, si la Chine nous propose de lancer des projets d’investissements au Liban, ceci veut-il dire que nous cherchons à instaurer le régime communiste dans le pays ? on nous accuse de vouloir transformer le pays en un nouvel Iran, mais ce n’est pas du tout le cas. L’Iran est un pays ami qui est prêt à nous alimenter en carburants, en pétrole et autres. Ceci ne signifie pas que le pays deviendra un modèle à l’iranienne.
De toute façon, allez chez vos amis et apportez des aides au Liban. De plus, sachez que le Liban ne possède pas les critères de devenir comme l’Iran. L’Iran est un grand pays qui a réussi à se tenir bon face au blocus, aux sanctions et aux guerres qui lui ont été imposées pendant 40 ans. L’Iran est une puissance jouissant d’une auto-suffisance à tous les plans. Oui, l’Iran est en manque de devises parce que le système international en dépend largement dans ses échanges commerciaux.
Je vous rassure que personne ne cherche à changer la face du Liban. Mais voilà la France qui a décidé de geler le congrès de Cèdre, les USA qui imposent des sanctions sur le pays, les pays du Golfe qui refusent de nous aider. Il faut donc s’ouvrir à d’autres options et frapper les portes qui peuvent constituer des opportunités pour nous.
Quand nous abordons la crise vitale économique du pays, il faut la penser selon deux axes : le premier est celui de réfléchir aux modalités pour faire sortir le pays de la crise économique globale qui dure depuis plusieurs années en raison de la corruption, alors que le deuxième axe est le plus pressant : c’est celui de trouver les moyens nécessaires pour épargner la famine au pays. Si nous parvenons à protéger le Liban contre le spectre de la famine, nous serons en mesure de traiter les autres points de la crise.
Pour ce qui est des idées pouvant nous sauver de la famine, il ne faut épargner aucune option. Par exemple, en menant des pourparlers avec le FMI, nous devons en parallèle réfléchir à d’autres alternatives comme l’ouverture à l’Orient pour gagner du temps.
Par ailleurs, le peuple libanais ne doit pas se sentir passif et vivre dans la dépression. Tout le monde doit être actif pour paver toutes les voies possibles à une issue efficace.
Les Libanais tout comme les autorités sont face à la menace de l’effondrement. Allons-nous capituler devant ce risque, ou bien allons-nous agir pour transformer les risques en opportunités ? Cette menace peut devenir une occasion en or pour nous aider à surmonter les résultats des fausses politiques anciennes.
Quand la Chine propose de lancer des projets estimés à des dizaines de milliards pour aider notre pays, nos responsables doivent prendre l’initiative et entrer en contact avec la direction chinoise pour discuter des projets d’investissement en question. Laissez les dirigeants travailler et contacter les Chinois en ce sens, au lieu de diffuser des rumeurs de toutes sortes, comme par exemple l’indécision chinoise envers le Liban.
Suite à l’annonce de la proposition chinoise, les dirigeants US ont été fous de rage et ont lancé toute une campagne contre les intentions chinoises. Ceci est une preuve qui démontre que cette porte est en mesure de nous faire sortir de la crise.
Quand nous avons parlé de l’ouverture sur l’Irak, des ministres irakiens sont venus au Liban et ont rencontré le Premier ministre libanais. Cette visite est la bienvenue. L’Irak représente une grande opportunité qui peut revitaliser les secteurs commerciaux et agricoles libanais.
Sur un autre plan, la banque centrale libanaise doit verser des dizaines de milliards de dollars pour importer du pétrole. L’Iran a proposé de nous vendre son pétrole en livres libanaises. Nous avons entamé une série de discussions avec les autorités libanaises sur ce sujet loin des médias, ce qui pourra sauver lesdépôts en devises de la banque centrale. Nous ferons donc tout le nécessaire pour avoir enfin la conscience tranquille envers notre pays.
Le pays ne peut pas capituler devant l’acte César qui impose des sanctions sur la Syrie. Il faut trouver des brèches pour s’ouvrir à la Syrie. L’objectif est d’adresser des messages clairs aux USA selon lesquels le Liban ne peut pas accepter de mourir de faim à cause de vous. Nous devons pousser les Américains à perdre espoir rapidement sur ce dossier.
Au fil des années, les secteurs agricole et industriel se sont effondrés en raison du soutien primordial aux secteurs de service et touristiques et du manque de soutien aux secteurs productifs. Notre pays est devenu un pays consommateur par excellence.
Nous pouvons aujourd’hui trouver une solution en transformant le pays en un pays productif. Pour vivre en dignité, tout peuple doit produire son propre oxygène, à savoir son eau et son agriculture. Les autorités sont responsables et doivent relancer les secteurs productifs pour épargner au pays la famine. Le peuple doit aussi commencer à planter ses terres. Il nous faut de la volonté, de la décision et de l’action.
Nous devons nous entraider pour amoindrir les couts de production et assurer des marchés pour vendre les produits.
Nous au Hezbollah, appelons les Libanais à participer à la bataille de la relance des secteurs agricole et industriel. Nous avons pris la décision de confronter la famine et nous serons présents en force. J’annonce que tout le Hezbollah, avec toutes ses capacités et ses potentiels, sera présent en force dans cette bataille, et nous allons collaborer avec tout le monde pour travailler main dans la main pour vaincre la famine. Notre slogan était ces dernières années: Nous serons présents là où nous devons l’être. Aux partisans de la résistance je vous dis que dans la bataille de l’agriculture et de l’industrie, nous serons présents en force. Nous allons tous devenir des cultivateurs pour sauver tout notre pays. C’est une nouvelle page que nous allons entamer. Nous allons cultiver nos terres partout, et nous tendons la main à tous en ce sens.
Même dans le domaine de l’industrie nous devons commencer à relancer l’industrie nationale.
Permettez-moi en ce mardi 07/07/2020 de lancer le jihad agricole et industriel pour sortir de l’impasse et commencer à traiter les problèmes économiques durables.
A l’ambassadrice US: cesse tes ingérences!
Le deuxième volet de mon discours porte sur les ingérences US dans le pays. Au lieu de respecter les normes internationales, l’ambassadrice US s’ingère dans les affaires du pays et dans les moindres détails. Qu’est-ce qui donne à cette personne le droit de nommer des responsables à des postes clés de la Banque centrale ? certains libanais pensent que les USA représentent la volonté de Dieu sur terre. Il ne revient pas à l’ambassadrice US d’appeler à renverser le gouvernement actuel, ni de s’attaquer le Hezbollah au su et au vu des autorités libanaises passives. Cette dame parle en toute liberté et le plus dangereux dans son action c’est qu’elle provoque les Libanais les uns contre les autres.
A cela s’ajoute la politique du siège et de sanctions US contre le pays. Dans la foulée de cette action US, un juge libanais honnête et patriotique, Mohammad Mazeh, a rendu un verdict qui interdit à l’ambassadrice US de prononcer des discours haineux aux médias. Nous sommes fiers de ce juge et de toute personne patriotique qui ose dire « non » aux politiques US. Nous souhaitons que le ministère de la justice revoie sa décision envers ce juge honorable, en le traitant avec le même degré d’honneur et de patriotisme.
Les députés du Hezbollah vont signer une pétition et la présenter au ministère des Affaires étrangères pour convoquer l’ambassadrice US et l’appeler à respecter les lois et les normes comme le stipule la Charte de Vienne.
Nous appelons l’ambassadrice US à ne pas donner des leçons aux Libanais sur la liberté et la justice. Tu n’as pas le droit de jouer au professeur, toi et ton pays responsable de toutes les guerres sur la planète, dont la guerre de juillet 2006. Vous êtes responsables de chaque goutte de sang versée sur la terre libanaise. Vous avez même soutenu les groupes terroristes au Liban, en Syrie et en Palestine.
Un conseil donc à cette ambassadrice : respecte toi-même et cesse tes ingérences dans les affaires de notre pays.
Par ailleurs, tout le monde sait que la situation actuelle et la crise économique est due à la corruption et aux vols qui datent depuis de longues années. Maintenant, vous cherchez à acculer le Hezbollah au mur en l’accusant de la crise actuelle.
Sachez que le Hezbollah ne capitulera pas, et votre politique US de sanctions contre le Liban ne va pas affaiblir le Hezbollah, bien au contraire, elle va renforcer le Hezbollah. Ce sont vos alliés qui seront affaiblis et frappés par vos sanctions. Et enfin, vos alliés viendront chez nous demander notre aide. Donc, ce que vous faites est une perte de temps et ceci va placer tout le Liban dans le giron du Hezbollah.
Le complot le plus dangereux sur la région
Sur le plan régional, l’échéance de l’annexion de la Cisjordanie représente le complot le plus dangereux sur la région. Ce projet réussirait ou échouerait. Hier, j’ai reçu une lettre de la part du dirigeant du Hamas Ismaël Haniyeh et nous affichons notre solidarité avec le peuple palestinien. La crise économique ne doit pas nous faire oublier la cause palestinienne, surtout que les répercussions d’une telle annexion seront aussi dangereuses sur le Liban que sur tous les pays de la région».