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Arabie saoudite: les dernières arrestations de ben Salmane exposent la faiblesse au cœur du pouvoir

Arabie saoudite: les dernières arrestations de ben Salmane exposent la faiblesse au cœur du pouvoir
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Par AlAhed avec Middle east eye

Le silence du palais royal saoudien vis-à-vis de l’arrestation des princes Ahmed ben Abdelaziz et Mohammed ben Nayef, entre autres, est assourdissant.

Pourtant, le geste soudain et audacieux du prince héritier Mohammed ben Salmane est révélateur. 

L’arrestation de ces princes de haut rang sans portefeuille révèle le terrain instable sur lequel repose l’avenir du jeune prince.

Terrain instable

Dans son histoire moderne, l’Arabie saoudite a connu des différends de succession – comme lorsque le prince héritier Fayçal a contesté l’autorité du roi Saoud au début des années 1960 –, mais elle les a résolus rapidement. À l’époque, Fayçal avait le soutien de presque toute la famille royale, à l’exception de Saoud et de ses fils. Fayçal a rapidement isolé Saoud et obtenu une fatwa des érudits religieux pour l’évincer.

Aujourd’hui, Mohammed ben Salmane ne semble disposer que du soutien de son vieux père tandis que d’autres membres de la famille royale, en particulier ceux qui sont destinés à devenir rois, se sentent isolés, humiliés et, à présent, en état d’arrestation. 

Le prince héritier saoudien s’est non seulement aliéné son propre oncle, Ahmed, et son cousin Mohammed ben Nayef, mais aussi l’establishment même qui aurait soutenu l’arrestation audacieuse de sa propre famille, à savoir l’establishment religieux. Il ne peut être assuré de la loyauté des membres importants de la famille royale, des érudits religieux et des sections importantes de la société saoudienne. Les foules en liesse lors des festivals, concerts et matchs de boxe qu’il a introduits dans le royaume cachent une crise croissante au sein de la Maison des Saoud.

Une crise qui s’aggrave

Le jeune prince vit dans la peur et l’isolement. Sa soi-disant révolution descendante vacille sous la pression de la récession mondiale qui a fait chuter les prix du pétrole et la Bourse saoudienne.

Par le passé, le royaume a fait face à une série de crises pétrolières et de récessions, et l’austérité due à la baisse des recettes pétrolières était une pierre d’achoppement rapidement surmontée.

Mais la crise actuelle est totalement différente. Elle est politique plutôt qu’économique. Le roi Salmane ne sera peut-être pas là assez longtemps pour jeter l’ombre du soutien et extorquer la loyauté des princes mécontents en faveur de son fils. Le fils lui-même a commencé son règne au centre du pouvoir avec de nouvelles stratégies inattendues qui sont maintenant insuffisantes pour garantir une succession en douceur après la mort du roi.

L’arrestation brutale de son propre oncle et de ses cousins est une stratégie risquée qui le hantera tout au long de sa future carrière politique. En outre, la réputation du royaume en tant que pays béni par la capacité de la famille royale à maintenir le consensus et garantir une succession en douceur est irrémédiablement brisée.

Le prince héritier est de nouveau contraint d’utiliser la force contre ses rivaux au sein de la famille royale, comme en novembre 2017, lorsque plus d’une douzaine de princes influents ont été arrêtés et détenus au Ritz Carlton à Riyad. Cela était présenté comme une mesure anticorruption pour débarrasser l’Arabie saoudite des pots-de-vin endémiques.

Les descendants du défunt roi Abdallah, principalement le prince Miteb, le chef de la Garde nationale saoudienne à l’époque, ont été humiliés et mis à l’écart. Mohammed ben Salmane s’est assuré que ce rival de haut rang était privé d’une base militaire avec laquelle il pourrait potentiellement organiser un coup d’État contre l’ascension du fils du roi.

La menace Nayef

Le prince héritier espère éliminer la menace constituée par un autre prince important, Mohammed ben Nayef, qui a longtemps été considéré comme ayant géré les affaires intérieures du royaume d’une main de fer.

Les réseaux de renseignement et de sécurité omniprésents qu’il a créés lorsqu’il était la figure centrale du ministère de l’Intérieur hantent toujours l’actuel prince héritier, même après que ben Nayef a été privé de toutes ses fonctions officielles au gouvernement. Le prince héritier craint que les mesures particulièrement draconiennes que son cousin a prises pour écraser l’opposition potentielle puissent encore être déployées contre lui.

Mohammed ben Nayef a garanti la sécurité du trône en vue de sa propre accession au poste suprême. Mais il a finalement vu son jeune cousin, Mohammed, bénéficier de toutes les mesures de surveillance et de stricte sécurité qu’il avait mises en place dans le royaume. Sa récompense a été son brusque limogeage par le roi, et maintenant, il aurait été arrêté.

La nouvelle de son humiliation a fait le tour du monde alors que le palais royal reste silencieux sur ses allées et venues.

La lignée al-Nayef au sein de la maison royale vit aujourd’hui ses derniers jours et restera dans les mémoires comme une tour déchue qui a maintenu les Saoudiens dans la peur et les a soumis, aux mains de Nayef senior et de son fils Mohammed, à des détentions arbitraires, des actes de torture et des disparitions injustifiées. 

Une frappe préventive

Le prince Ahmed, le frère encore éligible à la succession du roi Salmane, figurerait également parmi les princes arrêtés le 7 mars. Il n’a probablement pas été arrêté en raison de ses antécédents militaires ou de sécurité : il n’en a aucun dans sa carrière de courte durée au gouvernement.

Son arrestation était plutôt une frappe préventive pour éviter que le prince ne devienne un personnage symbolique focal autour duquel d’autres princes mécontents pourraient se rassembler.

Le prince Ahmed avait le potentiel de devenir un tel personnage, ce qui nous rappelle les dix années de règne d’Abdallah lorsqu’il est devenu le monarque fort qui a réussi à contrer les menaces de Salmane, Nayef et Sultan ben Abdelaziz à l’époque.

Abdallah représentait un symbole pour de nombreux princes qui étaient jaloux du monopole du pouvoir qu’avaient ces trois figures les plus importantes de la politique saoudienne. Ahmed avait déjà exprimé des réserves sur la politique du nouveau roi et de son fils, par exemple, sur la guerre contre le Yémen en 2015.

Mais depuis, après son retour en Arabie saoudite, il a gardé le silence. D’autres princes marginalisés auraient pu vouloir se tourner vers le prince Ahmed pour leur éviter de sombrer dans l’oubli historique lorsque le prince héritier deviendra finalement roi.

Drame royal

Le roi Salmane aurait pu faire d’Ahmed le prince héritier après les nombreux scandales et la mauvaise gestion des affaires politiques et des relations extérieures du royaume par son fils, surtout le scandale de la mort de Jamal Khashoggi en 2018.

Mais le roi a manqué l’occasion et aujourd’hui, l’arrestation du prince Ahmed exclut une figure symbolique qui est potentiellement capable de restaurer un semblant de continuité et de respectabilité au sein de la maison royale.

Autrefois monarchie sûre composée de puissants princes qui ont réussi à endiguer toutes sortes de menaces politiques, économiques et sécuritaires, l’Arabie saoudite est aujourd’hui en proie à l’incertitude et aux dangers.

Dans le processus de consolidation de l’emprise des al-Saoud sur le pouvoir, les rois ont privé tous les Saoudiens du droit de vivre dans une société ouverte dotée d’institutions politiques capables de garantir la survie du royaume et la participation de ses citoyens dans le processus décisionnel. Malheureusement, les Saoudiens ont été transformés en spectateurs impuissants du drame royal en train de se dérouler sous leurs yeux.

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