Palestine-Arabie Saoudite: quand le football rencontre la diplomatie
Par France Inter
C'est plus qu'un match de qualification pour la coupe du monde de football 2022 au Qatar. La rencontre Palestine-Arabie Saoudite mardi 15 octobre à Al Ram, près de Jérusalem, est un véritable événement diplomatique. Pour la première fois, l'équipe nationale d'Arabie Saoudite va jouer en Cisjordanie occupée.
Jusqu'ici, l'Arabie Saoudite avait toujours refusé de jouer un match en Cisjordanie occupée car il fallait demander un «visa d'entrée» à «Israël», que le royaume saoudien n'a pas reconnu depuis l'occupation de la Palestine et sa création en 1948. Voilà pourquoi il y a quatre ans, dans un autre tournoi de qualification pour la coupe du monde, la rencontre Palestine-Arabie Saoudite s'était jouée en Jordanie.
Un petit geste pour la Palestine, un grand geste pour «Israël»
Cette année, la fédération palestinienne de football - présidée par l'ancien responsable des forces de sécurité de Yasser Arafat, Jibril Rajoub, qui a passé plusieurs années dans les prisons israéliennes - a insisté pour que les Saoudiens viennent jouer en Cisjordanie. La fédération saoudienne a accepté expliquant que l'équipe palestinienne de football ne devait pas être «privée de la possibilité de jouer à domicile devant ses supporters, comme les autres pays». À première vue, deux semaines après le premier match d'une équipe marocaine en Cisjordanie (le club palestinien Hilal al-Quds recevait le Raja Casablanca) cette rencontre a tout du succès sportivo-diplomatique.
Une nouvelle fois, le football apparaît comme un soft-power efficace et le président palestinien Mahmoud Abbas a raison d'exulter. Mais à y regarder de plus près, cette concession saoudienne est d'abord un geste envers... «Israël». La preuve, ce lundi, les autorités israéliennes ont autorisé les footballeurs saoudiens à visiter la vieille ville de Jérusalem et à prier à la mosquée Al Aqsa, l'un des lieux saints les plus sacrés pour les Musulmans, située juste au-dessus du «mur des lamentations».
Nombreux signes de rapprochement entre l'Arabie Saoudite et «Israël»
Malgré les critiques de certains observateurs israéliens, «Israël» et l'Arabie Saoudite se sont rapprochés car les deux parties sont avant tout des ennemis jurés de l'Iran. Leurs services de renseignements coopèrent et au mois de septembre 2019, leurs délégations se sont rencontrées avec d'autres représentants des pays du Golfe à l'Assemblée Générale des Nations Unies pour évoquer un pacte de non-agression. Dans la foulée, «Israël» a souhaité une bonne fête nationale au Royaume le 23 septembre puis l'ambassadrice saoudienne aux États-Unis a formé ses vœux de bonne année aux Américains juifs...
Riyad a donc choisi: la lutte contre l'Iran est plus importante que la lutte pour un État palestinien et cela vaut bien de passer sous les fourches caudines d'«Israël» pour jouer un match en Palestine. Des partis et des collectifs palestiniens ont appelé au boycott du match, mais il aura bien lieu en banlieue de Jérusalem, à quelques dizaines de mètres du mur israélien de séparation.