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Siniora: les hameaux de Chebaa, une invention irano-syrienne

Siniora: les hameaux de Chebaa, une invention irano-syrienne
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Siniora: les hameaux de Chebaa, une invention irano-syrienne, si vous nous abandonnez à la merci des Syriens ils nous écraseront

Hassan Oleik

Depuis que la guerre de juillet 2006 a pris fin, la polémique sur le rôle du premier minister de l’époque, Fouad Siniora, dans les développements et les négociations de la guerre n’a pas été close. L’homme s’est mis à la porte du Grand Sérail pour faire la bise au secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice, qui avait affirmé que les incidents en cours au Liban sont les douleurs de l’enfantement d’un nouveau Moyen-Orient.
Sur ce, l’homme a été jugé “commandant du camp de faiblesse” dans la guerre lancée par “Israël” contre le pays et ses citoyens. En revanche, le président de la Chambre, Nabih Berry, a qualifié du “ gouvernement résistant” le cabinet de Siniora, un attribut auquel se sont accrochées les forces du 14 mars pour défdendre celui qu’ils ont surnommé “homme d’Etat”.

Les documents délivrés par l’ambassade américaine à Beyrouth entre le 12 juillet et le 14 août 2006 dévoilent les détails de la guerre menée par Siniora sur le plan diplomatique. Néanmoins, ces documents n’assouvissent pas complètement la vengeance de ceux qui ont accusé Siniora de faiblesse et de trahison, ni permettent à leurs opposants de dire à pleine voix que l’homme a mené des batailles héroïques, ils contiennent un peu de ce et de cela.
Parmi les documents de Wikileaks sur la guerre de juillet existent 12 preuves délivrées par l’ambassade américaine à Beyrouth qui rapportent les positions de Siniora tenues lors des entretiens avec l’ambassadeur Jeffrey Feltman et le sous-secrétaire d’Etat américain David Welsh. L’ambassadeur britannique, James Walt, le représentant personnel du secrétaire général des Nations Unies, Geir Pedersen, ainsi que des ambassadeurs des pays membres du Conseil de Sécurité ont assisté à certains entretiens. L’examen de ces documents permet de former une idée presque complète sur le comportement de Siniora durant cette période.

Depuis le début de la guerre, Siniora insistait sur la réalisation d’un cessez-le-feu, contrairement à un grand nombre de politiciens libanais (notamment des forces du 14 mars) qui conditionnaient le cessez-le-feu à la défaite de la résistance. Cependant, ses critiques contre l’agression israélienne auprès des représentants de grands pays étaient légères.
De plus, le 13 juillet 2006 (document numéro 06Beirut2353), il a imputé à l’Iran et à la Syrie la responsabilité du déclenchemnet de la guerre parce qu’elles voudraient “détruire le gouvernement libanais, arrêter la formation du tribunal et détourner les regards du dossier nucléaire iranien”. Son conseiller Mohamad Chatah, qui assistait à cet entretien, a soutenu cette affirmation.
Dans un autre entretien, il a qualifié “d’impardonnables” les actions du Hezbollah, se disant “compréhensif pour le fait qu’Israël ne veut pas récompenser le Hezbollah de ses actes en libérant les hameaux de Chebaa”. Il confirme, au même temps, que si Israël offrera cette récompense , “ elle serait attribuée au gouvernement démocratique du Liban”. (Beirut253506, 5/8/2006).
Cependant, il tenait des positions différentes lors des entretiens publics ou lors de ceux auxquels assistaient des ministres qui n’appartenaient pas à son groupe politique: il critiquait Israël fermement et lui imputait la responsabilité de la destruction, comme c’est le cas dans le câble numéro 06Beirut2429 datant de 20/7/2006.
La dualité de ses positions était claire pour Feltman. Dans le document 06Beirut2542 délivré par l’ambassade américaine le 2/8/2006 qui comprend le procès-verbal d’une réunion entre Siniora et les ambassadeurs des pays membres au Conseil de Sécurité en présence du ministre des Affaires étrangères Fawzi Salloukh, le PM parlait avec aisance du projet de résolution présenté par le Conseil de Sécurité , mettant en garde que le Hezbollah ne l’acceptera pas s’il était promulgué tel qu’il est. Feltman écrit, dans le même document, une note soulignant que Siniora a exprimé ses remarques “sincères“après le départ de Salloukh. Il a affirmé aux ambassadeurs que l’adoption du projet tel qu’il est, remettra le Liban “ sous le couteau syrien”.
“Le couteau syrien” et l’ingérence iranienne étaient l’obsession de Siniora, ou c’est, au minimum, que montrent les rapports américains. Le 29/7/2006 était l’unique fois où il a critiqué “Israël”. Le document numéro 06Beirut2492 est le seul où figure le mot “colère” attribué aux sentiments de Siniora, selon Feltman. Le PM du Liban était fâché parce qu’il a trouvé que les propos d’Israël sur des couloirs humanitaires pour acheminer les aides aux habitants du Sud étaient une “blague”. Les avions israéliens ont visé les ambulances. Cependant, Feltman a rapidement contenu la colère du PM du Liban et il a “ exercé une pression” sur lui pour qu’il “adopte”, sans discussion, la théorie que “ le Hezbollah pourrait utiliser certains convois d’aides humanitaires pour renforcer ses combattants”.


La paix et la sécurité “d’Israël”

Tout au long de la guerre, la libération des hameaux de Chebaa était un projet central dans le discours de Fouad Siniora. Il a dit aux Américains “ vous pouvez les mettre sous le mandat des Nations Unies pour une ou cent années” (06Beirut2601, le 5/8/2006). Pour lui, les hameaux de Chebaa ne sont qu’une “invention irano-syrienne”. Son seul souci, dans ce cadre, est de parvenir à une solution équitable qui “aide les gouvernements libanais et israélien et crée un grand problème pour le Hezbollah et ses deux parrains syrien et iranien (06Beirut2601 le 12/8/2006). Son second souci est que la poursuite de l’occupation israélienne des hameaux de Chebaa offre à la Syrie un prétexte pour continuer à s’ingérer dans les affaires libanaises. “Si vous nous laissez à la merci des Syriens, ils nous écraseront” s’est-il adressé à Feltman. (06Beirut2545, le 7/8/2006).
Siniora va plus loin dans sa préoccupation des intérêts libano-israéliens communs. Il ornait, pour Feltman, le projet de sept points qu’il a lancé auprès de la conférence de Rome (26juillet 2006) disant “qu’Israël” obtient, via ces points, tout ce qu’il cherchait à réaliser depuis des décennies” (06Beirut1504, le 1/8/2006). Dans le même entretien, Siniora a mis en garde que les gouvernements libanais et israélien “se noient dans les détails et sont sur le point de rater l’objectif principal qu’est la paix et la sécurité pour “Israël” et le désarmement du Hezbollah pour le Liban”. Dans un autre document(06Beirut2535, 5/8/2006), Siniora dit à Welsh et à Feltman “qu’Israël ne dispose pas des frontières sûres et stables malgré les conventions conclues avec l’Egypte et la Jordanie. Cependant, elle pourra garantir la paix sur sa frontière nord en mettant terme à l’occupation des hameaux de Chebaa”.
Le PM du Liban se concentrait sur la sécurité des frontières nord durant sa réunion avec Feltman (06Beirut2489, 29/7/2006), se disant victorieux parce que le conseil des ministres a adopté le plan de sept points qu’il a exposé à la conférence de Rome. Siniora a espéré qu’Israël” aperçoive que le contrôle de l’Etat libanais sur le Sud est “la clef pour la sécurité d’Israël”.
Evoquant le sixième point qui stipule l’acceptation du Liban et d’“Israël” de retourner à l’accord d’armistice de l’année 1949, Siniora a affirmé, dans le procès-verbal américain sans aucune raison claire, “qu’il connaît que le manque de clareté dans ce point concernant un accord global sur les relations entre le Liban et Israël était atypique”. Toutefois, le PM a expliqué que le cessez-le-feu ne doit pas être jugé un moyen pour parvenir à un accord de paix entre le Liban et Israël. “Nous ne sommes pas encore arrivés à ce point” a-t-il signalé estimant que “ le cessez-de-feu créera un certain nombre d’occasions sur le plan régional”.


L'Iran au banc des accusés

Siniora ne se contente pas de se tenir aux intérêts libano-israéliens communs, il s'accroche également aux intérêts américains (dans le document précédent).  Selon lui, l’adoption de son plan sur la libération des hameaux de Chebaa polira l'image de Washington dans la région. "Les Etats-Unis ont passé suffisamment de temps au banc des accusés et du point de vue de l'opinion libanaise et arabe, c'est le temps d'y mettre l'Iran". (06Beirut2504, 1/8/2006). 
L’affection que manifeste Siniora à l’égard de l’image des Etats Unis aux yeux des peuples arabes n’est pas influencée par la position américaine pro-Israël (qui soutient Israël). Il semble, d’après les documents, qu’elle est d’autant plus une conviction politique qu’une affection. Les positions de Condoleezza Rice convainquent le PM du Liban, le poussant à la louer (dans un document délivré le 25/7/2006) notamment pour “son approche cherchant de mettre terme complètement aux actes agressifs entre Israël et le Hezbollah”. Siniora a souligné que les déclarations de la secrétaire d’Etat américaine, à ce propos, expriment que “le temps de traiter les symptômes est achevé” faisant état d’une intention américaine de traiter les “causes” de la crise actuelle.

Rice a une histoire avec Siniora qui l’a racontée durant son entretien avec Feltman le 31 juillet 2006. L'opinion publique a connu une partie de cette histoire après le massacre de Qana le 30 juillet 2006. A ce temps, Siniora a refusé de rencontrer Rice et a annoncé que le gouvernement libanais ne négociera pas tant que le cessez-le-feu n'a pas été décrété. A l'époque, les Libanais étaient satisfaits de la mesure prise par Siniora. De fait, un des documents (06Beirut2504, 1/8/2006) a dévoilé ce qui a demeuré inconnu jusqu'aujourd'hui. Le jour suivant, Siniora a justifié sa position à Feltman disant que " cette affirmation était nécessaire sur le plan politique vu que sa rencontre avec Rice influencera négativement sa crédibilité aux yeux du peuple libanais et endommagera sa capacité à négocier" . Quant à "l'attaque de Qana" elle-même, elle n'a pas attiré l'attention de son Excellence, à l'execption qu'elle a "ouvert les yeux" et qu'elle aiderait à réaliser un cesez-le-feu permanent".


L'homme des négociations difficiles

Dans les documents datant des dix premiers jours de la guerre, Siniora ne s'est pas montré ferme autant qu'il l'était pendant les deux dernières semaines de l'agression. Tout au long de la guerre de juillet, les Etats Unis réclamaient avec insistance au gouvernement libanais d'adresser une lettre "publique" aux Nations Unies dans laquelle Siniora demande le déploiement des forces multinationales au Sud du Liban à côté de l'armée libanaise. Les Américains parlaient des forces qui n'appartiennent pas aux Nations Unies mais qui opèrent conformément à la septième clause de la Charte de cette organisation internationale. Washington avait fixé une mission claire pour cette force qu'est le désarmement du Hezbollah. Dans la première semaine de la guerre, la pression américaine a fructifié: Siniora et Feltman ont discuté de cette question lors de leur entretien tenu le 25/7/2006 (à la veille de son voyage à Rome et un jour après la première visite de Rice à Beyrouth). Après avoir "pensé à haute voix", Siniora a fait état de la probabilité d'une telle demande pourvu qu'il l'exprime avec un ton la montrant comme un besoin pour le Liban".
De plus, Siniora a affirmé qu'il ajoutera cet article à ses remarques qu'il exposera à la conférence de Rome, avant de commencer à expliquer les avantages du déploiement de ces forces et les moyens qu'il utilisera  pour persuader le président de la Chambre, Nabih Berry (document envoyé le 25/7/2006).
Cependant, Siniora n'a pas tenu sa promesse. Le lendemain, il a demandé depuis Rome de renforcer les forces de la Finul. Depuis lors, Siniora parlait des forces renforcées de la Finul et il ne cédait plus aux pressions américaines à ce propos. Devant les responsables américains (Welsh et Feltman), il imputait son abstention de réclamer une telle demande tantôt à la paradoxe entre les deux positions française et américaine tantôt au fait que le gouvernement libanais rejettera cette demande (06beirut2504).
Lorsqu'il a subi des pressions de la part de David Welsh, il a indiqué que le président Nabih Berry s'est opposé à cette force qui portera atteinte à la souveraineté libanaise (06beirut260, 12/8/2006).

Quand ses deux interlocuteurs disaient que cette force sera déployée conformément à la septième clause, il leur répondaient qu'il ne faut pas permettre à l'Iran de "bloquer les efforts de paix" affirmant que " le ministre iranien des Affaires étrangères Manouchehr Mottaki exerce des pressions pour torpiller les négociations". En même temps, il a accepté que le projet de loi comprend un texte qui stipule "en pricinpe un désarmement du Hezbollah ecxlusivement au Sud". Il a également exprimé son opposition aux propos de Welsh qui avait indiqué que la levée du blocus exige  un mécanisme de surveillance, confirmant que tout Etat indépendant ne doit pas être soumis à un système d'inspection (06beirut2582، 10/8/2006). 

Dans le document datant du même jour (06beirut2588), les deux diplomates américains ont soulevé la question du contrôle international sur les passages frontaliers. Siniora a refusé "parce que cela est une affaire de souveraineté" promettant de coordonner avec le ministre de la Défense Elias Murr afin de tenter de trouver "une solution créative". Siniora discutait avec Feltman chaque mot et détail du projet de loi du Conseil de sécurité à un tel point qu'il a exprimé ses réserves sur une phrase "parce qu'elle contient implicitement une reconnaissance libanaise de la présence de l'Etat d'Israël" (même document). Lorsque la pression américaine augmentait, Siniora disait que "le Hezbollah et la Syrie n'accepteront pas le déploiement d'une force internationale sous la septième clause et qu'il acceptera la promulgation de ce projet sur la base de la clause 6,9999". En somme, Siniora a mené, selon ce que dévoile les documents américains, des négociations difficiles durant la dernière semaine de la guerre. Il a menacé une fois de suspendre les négociations si elles ne comprennent pas une solution pour la question des hameaux de Chebaa affirmant que "la communauté internationale obtient son dessein avec un grand frais payé par le Liban". (06beirut2545، 7/8/2006).


La guerre contre l'Iran

Tout au long de la guerre, Siniora n'imputait aux Américains aucune responsabilité de ce qui se passait au Liban. Cependant, il a signalé durant son dernier entretien avec Welsh (06beirut2601) que "le Liban a souffert de la guerre occidentale indirecte sur le Liban et pour cela il mérite quelque chose en contrepartie". Ripostant à la dernière tentative d'imposer un contrôle international sur les passages, Siniora a dit: "Je ne veux rien de plus que voir le Hezbollah désarmé et son renforcement arrêté" ajoutant que "le style de la résolution pavera la voie à la demande de l'aide internationale pour surveiller les frontières sud" et qu'il prendra en considération certaines idées. "Cependant, Siniora est resté hésitant concernant la demande de l'aide de la Finul", commente Feltman dans son télégramme. En même temps, il n'a pas exprimé sa satisfaction quant à la proposition de Welsh portant sur "des pourparlers entre des officiers libanais et israéliens", mais il a approuvé la nécessité de la présence d'une certaine collaboration avec la Finul". Lorsque l'heure de la vérité est arrivée, Siniora a dit à Welsh qu'il étudiera avec Berry le langage adopté dans la résolution au cas où il a été publié, et ils décideront de l'approuver ou de le rejeter partiellement ou totalement".

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