Dans un contexte de tension extrême, La France envoie le Charles de Gaulle en mer de Chine méridionale
Quelques jours après que Trump ait annoncé qu’il allait dénoncer le traité de 1987 signé avec l’URSS sur les Forces nucléaires intermédiaires, ayant en ligne de mire la Russie et la Chine, Paris a annoncé l’envoi de son porte-avion Charles de Gaulle dans les eaux asiatiques. Le porte-avion transporte des avions Rafales dotés de tête thermonucléaires.
Dans La Provence, la ministre de la Défense française Françoise Parly a annoncé l’envoi du porte avion, stationné à quai pour travaux depuis 2017, dans l’Océan indien et en mer de Chine: « Le fait que le Charles de Gaulle retrouve bientôt la mer avec ses pleines capacités opérationnelles va redonner à notre groupe aéronaval une puissance de projection et en renforcer la dimension politique. Il est d’ailleurs prévu qu’il se rende dans l’océan Indien en 2019.»
La ministre justifie l’envoi du porte avion en citant la liberté de navigation, qui a servi de prétexte aux opérations navales agressives américaines en mer de Chine méridionale: «Nous avons toujours été en première ligne pour défendre un droit imprescriptible qui est la liberté de navigation dans les eaux internationales. Et chaque fois qu'il y aura des atteintes à ce principe fondamental du droit international, comme c'est le cas en ce moment en Chine méridionale, nous manifesterons notre liberté d'agir et de naviguer dans ces eaux.»
Parly se faisait ainsi l’écho des accusations de Washington, depuis l’annonce par Barack Obama en 2001 d’un «pivot vers l’Asie» visant à isoler politiquement et militairement la Chine, selon lesquelles Beijing menace la «liberté de navigation» en mer de Chine méridionale.
Ceci témoigne de l’implication grandissante de la France dans la spirale vers la guerre en Asie, impulsée avant tout par Washington, qui vise à défendre son hégémonie mondiale croulante contre la Chine, la deuxième économie au monde dont la montée. En début d’année, la France avait passé un accord avec l’Inde, puissance rivale de la Chine en Asie, avec notamment l’option d’installer des forces militaires en Inde. Début mai, le président Macron était allé en Nouvelle Calédonie pour appeler à un nouvelle «axe» indo-pacifique pour contrer la Chine.
A présent, l’annonce de l’envoi du Charles de Gaulle en mer de Chine méridionale a lieu dans un contexte de tension politique extrême. Cet envoi peut avoir des conséquences graves non seulement pour les Français, mais pour les travailleurs à travers le monde.
La semaine dernière, Trump a menacé de répudier le traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (INF), quelques semaines après les premières menaces américaines de frapper la Russie depuis la fin de la guerre froide. L'ambassadrice des Etats-Unis auprès de l'OTAN, Kay Bailey Hutchison, avait accusé la Russie de violer ce traité en développant des missiles de croisière et a menacé de frapper la Russie pour les détruire. Un but majeur de Trump en répudiant ce traité était de permettre le renforcement de l’arsenal nucléaire américain visant la Chine dans le Pacifique.
Trois jours auparavant, un navire de guerre chinois avait foncé sur un contre-torpilleur américain qui effectuait une opération dite de «liberté de navigation» en mer de Chine méridionale. Ceci a obligé le navire américain à manœuvrer pour éviter une collision, qui aurait pu provoquer l’escalade diplomatique, et potentiellement militaire la plus grave dans le Pacifique depuis des décennies.
Ces évènements confirment les avertissements adressés par le Parti de l’égalité socialiste et le WSWS aux travailleurs à travers le monde. Sur fond des mêmes rivalités commerciales et militaires entre les grandes puissances qui ont déjà plongé le monde deux fois au 20e siècle dans des guerres mondiales, le risque d’une guerre nucléaire entre grandes puissances est réel, imminent et croissant. Le danger croissant de guerre pose aux travailleurs autour du monde qui entrent en lutte la tâche d’organiser un mouvement anti-guerre sur des bases socialistes et internationalistes.
En 2015, alors que Washington menaçait d’armer des milices ukrainiennes contre la Russie dans l’est de l’Ukraine après avoir lancé un coup d’État à Kiev, et que la Russie menaçait de répliquer militairement, le président français à l’époque, François Hollande, a déclaré: «Nous sommes passés en quelques mois de conflit, à la guerre... Nous sommes en état de guerre, et une guerre qui pourrait être totale.»
Depuis la montée économique de l’Asie, où la moitié du commerce mondial de produits industriels transite par l’Océan indien, attise les convoitises des puissances impérialistes non seulement nord-américaines mais aussi européennes, et fait flamber le danger de guerre.
En 2016, Jean-Yves Le Drian alors ministre de la Défense avait appelé les marines européennes à «une présence aussi régulière et visible que possible dans les espaces maritimes en Asie.» Et fin mai, le Dixmude, un bâtiment de projection français avait participé dans cette région à une mission d’envergure, avec trois Rafale, un avion de transport militaire A400M, un A310 et un ravitailleur.
Un silence assourdissant prédomine sur les chaînes d’information, dans la presse, et dans la classe politique en France sur le danger de guerre posé par les menaces impérialistes contre la Russie et la Chine.
La responsabilité la plus lourde incombe aux partis qui se donnent pour être «l’extrême-gauche», mais qui s’alignent sur les guerres néocoloniales des puissances impérialistes. Après avoir appelé à des interventions militaires «humanitaires» en Libye et en Syrie qui ont fini par des bains de sang, le NPA d’Olivier Besancenot et ses alliés politiques s’alignent sur les préparatifs de guerre qu’organisent la classe dirigeante dans le dos des travailleurs. En même temps, ils maintiennent un silence hostile sur les analyses et les avertissements formulés par le WSWS.
Ceci reflète leurs intérêts matériels: en tant que couche sociale réactionnaire de la petite-bourgeoisie composée d’universitaires, de bureaucrates syndicaux et de figures médiatiques, leurs revenus – le financement de leurs recherches, les subventions patronales pour leurs syndicats et leur accès aux médias – dépendent de leur soutien à la politique extérieure agressive de l’impérialisme français.
Après les menaces de Hutchinson contre Moscou, le quotidien ex-maoiste Libération a affirmé dans sa rubrique «CheckNews» que le WSWS exagère les préparatifs pour une «guerre totale», déclarant que le WSWS «mélange plusieurs informations authentiques pour arriver à un titre trompeur.»
Quelques jours après la publication par le WSWS d’une réfutation de l’article complaisant de Libération, c’était Trump qui réfutait Libération à sa manière en répudiant le traité INF afin de préparer une escalade de la posture nucléaire américaine à travers le monde. En envoyant le Charles de Gaulle naviguer dans les eaux asiatiques, c’est Macron à présent qui fait monter d’un cran le danger d’une guerre nucléaire entre les grandes puissances.
Source : wikistrike