Affaire Khashoggi: le secrétaire américain au Trésor n’ira pas à la conférence de Riyad
Le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin est le dernier (et l'un des plus prestigieux) invité en date à annuler sa participation à une grande conférence économique organisée à Riyad, un peu plus de deux semaines après la disparition du journaliste saoudien, critique du pouvoir, Jamal Khashoggi. Cette conférence, organisée par le fonds souverain saoudien, doit se tenir du 23 au 25 octobre et servir de vitrine aux réformes économiques lancées par le prince héritier Mohammed ben Salmane, considéré comme l'homme fort de l'Arabie saoudite.
Une décision qui a précédé de quelques heures un changement de ton de Donald Trump. Le président américain a estimé jeudi que le journaliste saoudien Jamal Khashoggi, qui a disparu au consulat saoudien à Istanbul et aurait été assassiné par des agents de son pays, «semblait bien» être mort, et a menacé l'Arabie saoudite de conséquences «sévères». «Ça me semble bien être le cas. C'est très triste», a répondu le président à un reporter qui lui demandait s'il pensait que le journaliste saoudien, critique du régime de Riyad, était mort.
Si l'Arabie saoudite est bien responsable de sa mort, comme l'affirment de nombreux médias qui se basent sur des preuves audio enregistrées dans le consulat lors de sa disparition le 2 octobre, les conséquences potentielles pour le pouvoir saoudien seront «sévères», a ajouté le président américain. «C'est une affaire très mauvaise, mais on verra ce qui se passe», a-t-il encore déclaré.
Ces derniers jours, Donald Trump avait opté pour une posture moins tranchée et avait mis en avant les énormes intérêts stratégiques liant son pays au royaume, citant la soi-disant «lutte contre le terrorisme», la nécessité de contrer l'influence de l'Iran, mais aussi les contrats d'armement et leurs retombées économiques.
Les États-Unis ont cependant décidé d'accorder un délai supplémentaire à l'Arabie saoudite pour expliquer la disparition de ce journaliste connu pour son franc-parler, qui s'était exilé aux États-Unis en 2017 après être tombé en disgrâce à la cour du prince héritier Mohammed ben Salmane. «Nous devons leur donner quelques jours de plus pour mener à bien (les investigations) afin que nous ayons une bonne compréhension des faits», a affirmé le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo, de retour d'un déplacement à Riyad.
Une décision coordonnée entre Européens
La réussite de cette conférence, appelée «Future Investment Initiative», a cependant du plomb dans l'aile après de très nombreuses défections provoquées par le flou qui entoure la disparition de Jamal Khashoggi lors d'une visite au consulat saoudien d'Istanbul le 2 octobre. Le site internet de l'événement ne permettait plus jeudi de consulter la liste des intervenants. Steven Mnuchin, une tête d'affiche eu égard aux relations entre les États-Unis et le royaume, a finalement annulé son déplacement jeudi après une réunion avec le président américain et le ministre des Affaires étrangères Mike Pompeo, tout juste de retour de Riyad pour tenter de démêler cette affaire.
Deux jours plus tôt, ce sont les services de la patronne du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde qui avaient annoncé qu'elle repoussait son voyage au Moyen-Orient, qui comprenait une étape à Riyad pour la conférence, mais sans s'y référer explicitement. Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire a annoncé jeudi matin qu'il ne se rendrait pas non plus à Riyad. En marge d'un sommet à Bruxelles, le président français Emmanuel Macron a résumé la position européenne.
«Nous avons pris cette décision de manière coordonnée entre Européens. C'est ce qui s'imposait à court terme compte tenu de la gravité des faits en l'absence de clarification », a-t-il déclaré.
Voici, à une semaine du coup d'envoi de cette conférence, l'état des lieux de ces défections, recensées et plusieurs médias dont Bloomberg et CNBC.
Source : AFP