Partie remise...
L’attaque contre le siège de la Sécurité nationale à Damas, qui a fait au moins quatre morts parmi les principaux responsables militaires et sécuritaires syriens, a été certes un coup dur pour le régime. Mais selon des sources proches de la majorité, celui-ci a rapidement réagi, déjouant en réalité un vaste complot visant à accélérer sa chute. Les sources de la majorité rappellent que quelques jours avant l’explosion, la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton avait annoncé que la situation en Syrie se dirige vers une grande catastrophe. De plus, les milieux de l’opposition semblaient sûrs que quelque chose de grave allait se passer à la veille de la réunion du Conseil de sécurité prévue mercredi dernier. De même, les médias proches de l’opposition syrienne affirmaient que cette réunion du Conseil de sécurité allait être cruciale, la position russe étant sur le point de changer ou en tout cas d’être plus souple au sujet d’un éventuel départ du président Bachar el-Assad.
C’est dans ce contexte que l’explosion au siège de la sécurité nationale a eu lieu, provoquant une grande confusion dans la situation en Syrie. Il a d’abord été annoncé que le frère du président et commandant de la brigade 104 de la garde présidentielle Maher el-Assad ainsi que Hafez Makhlouf, directeur adjoint du chef des SR militaires et proche du président depuis qu’il avait découvert un complot ourdi contre lui il y a déjà quelques années, faisaient partie des victimes. Ensuite, les rumeurs ont laissé croire que Maher el-Assad aurait été grièvement blessé et que les médecins russes essaient à tout prix de le sauver.
En même temps, des informations successives ont commencé à inonder les médias du monde entier sur le fait que 500 éléments armés appartenant à l’opposition ont occupé le quartier al-Midane au cœur de Damas et que les combats se déroulent désormais aux alentours du palais du président syrien. Même chose dans le quartier de Zabadani et de Mazzé où plus de 700 éléments armés se seraient déployés, mettant à mal les forces du régime. Selon les médias proches de l’opposition syrienne, les combats avec les forces du régime avaient aussi atteint le quartier de Sitt Zeinab et ses environs qui sont des zones à majorité chiite, en général peu enclines à se rebeller contre le régime considéré comme protecteur de cette minorité. C’est dire que lorsque les combats atteignent cette zone, c’est que le régime est quasiment lâché par toutes les composantes de la société syrienne.
Bref, à en croire ces informations successives relayées par les médias internationaux, on aurait dit que le régime était sur le point de s’effondrer, et d’ailleurs les rumeurs annonçaient la fuite de Bachar el-Assad vers Lattaquié (son fief alaouite). En même temps, les médias prorégime ont été piratés pour ne pas laisser de place à un autre son de cloche et pour créer la confusion la plus totale chez les partisans du régime. Dans ce contexte trouble, le Premier ministre turc Erdogan s’est rendu à Moscou pour présenter une offre qu’il croyait alléchante au président russe. Erdogan, avec, selon toute probabilité, l’aval des Américains, a donc proposé à Vladimir Poutine de déplacer le bouclier antimissiles américain de la Turquie vers le Qatar, sachant que la présence de ce bouclier en Turquie – c’est-à-dire quasiment à la frontière de la Russie – dérange grandement cette dernière et constitue un des plus importants dossiers conflictuels entre la Russie et les États-Unis.
Le tableau était donc le suivant : des développements accélérés en Syrie qui montrent que le régime de Bachar el-Assad est en train d’agoniser et une offre intéressante pour la Russie pour lui sauver la face et la pousser à accepter de lâcher le président syrien qui, de toute façon, est sur le point de chuter.
Les sources proches de la majorité sont convaincues que les ennemis du régime syrien pensaient avoir bouclé la question ne laissant pas d’autre choix à la Russie que d’accepter « ce marché » qui lui donne quand même quelques avantages alors qu’elle est en train de perdre sa carte maîtresse dans la région. L’offre aurait donc pu être considérée comme équitable et les membres du Conseil de sécurité ont accepté un report du vote d’une résolution pour la prorogation conditionnelle de la mission des observateurs de l’ONU pour une durée de 24 heures, suffisante aux yeux des Américains pour permettre à la Russie de faire son choix. À en croire les sources de la majorité, le plan était donc parfait et il aurait dû réussir. Sauf que le régime syrien a rapidement réagi, remplaçant au pas de charge les responsables tués dans l’explosion et menant une vaste offensive à Damas. En même temps, les chaînes du régime ont trouvé de nouvelles fréquences pour émettre et contrer les nouvelles déstabilisantes pour le moral de leurs auditeurs diffusées par les chaînes proches de l’opposition. Les Russes qui suivent de très près les développements sur le terrain en Syrie ont vite compris que la situation n’était pas aussi désespérée que voulaient le faire croire l’opposition et ses alliés, et que la bataille est encore jouable. En tout cas, l’heure du grand compromis n’est pas arrivée à leurs yeux, surtout à ces conditions. La Russie a donc une nouvelle fois utilisé son droit de veto au Conseil de sécurité, provoquant la colère des Américains et des Européens. Le plan minutieusement mis au point n’a donc pas fonctionné comme prévu.
Entre-temps, Maher el-Assad est réapparu pour assister aux obsèques des responsables tués dans l’explosion, et Hafez Makhlouf occupe toujours son poste, alors que les combats se poursuivent à Alep, la contre-attaque de l’armée syrienne ayant été plus ou moins efficace à Damas. La situation a repris une sorte de routine dans la violence, sauf que cette fois, les combats se déroulent dans les grandes villes et aux frontières. Le régime syrien (…) continue à se défendre... Jusqu’au prochain coup. Car il est clair que les Occidentaux et leurs alliés arabes et régionaux ne comptent pas lâcher prise.
Source: lorientlejour