Irak: d’influents partis contestent les résultats des élections
Par AlAhed avec AFP
En net recul à l'issue des élections législatives en Irak, d'influents partis ont crié à la fraude mardi affirmant qu'ils prendraient les «mesures» nécessaires pour annuler cette «escroquerie».
Sans surprise, les résultats préliminaires publiés tard lundi par la commission électorale au lendemain des législatives anticipées donnent comme grand gagnant le courant du leader chiite Moqtada al-Sadr.
Deuxième force au Parlement sortant, l'Alliance de la conquête, qui représente les ex-paramilitaires du puissant Hachd al-Chaabi, a accusé un net recul, passant de 48 sièges à une dizaine, selon des résultats compilés par l'AFP.
Alliée de l'Iran, cette formation devrait néanmoins rester un acteur influent, avec le jeu des alliances qui lui permettra d'augmenter sa part.
Dans un communiqué, le «Comité de coordination» qui réunit plusieurs partis chiites, dont l'Alliance de la conquête, a rejeté les résultats préliminaires en disant vouloir «faire appel». «Nous prendrons toutes les mesures disponibles contre la manipulation des votes».
«Nous n'acceptons pas ces résultats fabriqués», a martelé dans un communiqué Hadi al-Ameri, le chef de l'Alliance de la conquête.
«Arnaque»
Pour Abou Ali Al-Askari, le porte-parole des Brigades du Hezbollah, puissante faction du Hachd al-Chaabi, les législatives ont été «la plus grande escroquerie et arnaque dont le peuple irakien ait été victime dans l'histoire moderne» et les «frères du Hachd al-Chaabi sont les principales cibles».
Revendiquant plus de 70 sièges sur les 329 au Parlement, les sadristes sont quasi-assurés d'être la première force dans la nouvelle assemblée.
Mais la commission électorale a commencé mardi d'enregistrer les recours de candidats mécontents.
Les bulletins de plus de 3.000 urnes, venues de différentes provinces, seront dépouillés dans les prochains jours à Bagdad.
Interrogée sur les accusations de fraude, la cheffe de la mission d'observation de l'UE, Viola von Cramon, a déclaré que «rien sur le plan technique, dans la majorité des bureaux de vote observés (...), ne pouvait confirmer cette évaluation».
Les législatives, les cinquièmes depuis 2003 et le renversement du dictateur Saddam Hussein dans le sillage de l'invasion américaine de l'Irak, ont été marquées par une abstention record.
Sans surprise dans un pays où l'opinion publique rejette un système politique sclérosé: malgré l'immense richesse pétrolière, un tiers de la population est pauvre, la corruption tentaculaire ronge l'Etat, les services publics sont à bout de souffle.
Jeu d'alliances
L'élection devait être «une chance pour changer le paysage politique. Une majorité n'a apparemment pas cru à cette opportunité», a dit Mme von Cramon.
La France a dit elle souhaiter la formation «rapide d'un gouvernement pour pouvoir répondre aux défis du pays».
Si une victoire des sadristes se confirmait, ils devraient conserver leur statut de première formation au Parlement, leur permettant de peser lors des tractations visant à désigner un nouveau Premier ministre.
Mais même avec le jeu des alliances, il doit y avoir «un accord au sein du camp chiite», explique Lahib Higel, de l'International Crisis Group. «Sadr ne peut pas se permettre d'exclure les autres partis chiites».
Autre tendance, la percée de l'Alliance de l'Etat de droit de l'ex-Premier ministre Nouri al-Maliki, qui revendique une trentaine de sièges.
Le parti Taqadom, de l'influent chef du Parlement Mohamed al-Halboussi --un sunnite--, assure avoir obtenu une quarantaine de sièges.
Les élections étaient initialement prévues en 2022 mais elles ont été avancées par le Premier ministre Moustafa al-Kazimi qui cherchait à calmer le mouvement de contestation qui s'est essoufflé quelques mois après son début en octobre 2019, après avoir été réprimé dans le sang (au moins 600 morts, 30.000 blessés).
Malgré la répression, un jeune parti, Imtidad, se réclamant du mouvement de contestation a obtenu neuf sièges dans le sud chiite, selon un décompte préliminaire.