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Assassinat de Soleimani: les mensonges de l’administration Trump s’effritent

Assassinat de Soleimani: les mensonges de l’administration Trump s’effritent
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Par Moon of Alabama

Traduction & édition : lecridespeuples.fr

L’administration Trump a avancé diverses raisons pour expliquer et justifier son assassinat du Général de division Qassem Soleimani et du Commandant adjoint des Unités de Mobilisation Populaires (Hachd al-Cha’bi, rattachées à l’armée nationale irakienne) Abu Mahdi al Muhandis. Elle a d’abord affirmé qu’il y avait une « menace imminente » d’attaque contre des cibles américaines (alors même que de son propre aveu, elle n’avait aucune idée de ce qui allait être attaqué, ni de quand et où aurait lieu l’attaque alléguée), ce qui aurait rendu l’assassinat nécessaire. Trump a ensuite précisé que la menace en question était une attaque planifiée contre quatre ambassades américaines. Mais son Secrétaire à la défense Mike Esper a nié cette affirmation, assurant qu’il n’avait vu aucune information à ce sujet.

Lundi 13 janvier, CNN a rapporté que les personnels responsables de la sécurité des ambassades n’avaient pas été informés de menaces spécifiques imminentes contre 4 ambassades américaines. Cette information sapait les déclarations de Trump.

Par la suite, le Secrétaire d’Etat Mike Pompeo et le Procureur Général William Barr ont tous deux souligné que l’important n’était pas le caractère imminent ou non des attaques présumées, mais la stratégie globale dans laquelle s’inscrivait l’assassinat de Soleimani, reconnaissant qu’il y avait un enjeu plus important derrière l’attaque américaine.

«Le concept d’imminence est un faux débat, a déclaré Barr. Je pense que lorsque vous faites face à une situation dans laquelle vous avez déjà des attaques en cours, vous en déduisez logiquement qu’une campagne impliquant des attaques répétées contre des cibles américaines est en cours. Je ne pense pas du tout qu’il soit nécessaire de connaitre le lieu et le moment de la prochaine attaque.»

Le représentant démocrate du Michigan, Justin Amash, a critiqué les commentaires du Procureur général :

«Le propos de Bill Barr est fallacieux. Lorsqu’une campagne implique des attaques répétées contre des cibles américaines, il n’y a aucune excuse pour que l’administration ne demande pas l’autorisation du Congrès (avant d’assassiner Soleimani), comme l’exige la Constitution. Outrepasser le Congrès ne peut se justifier que par un danger imminent.»

De son côté, Pompeo, qui a initialement beaucoup insisté sur le caractère réel et tangible des informations annonçant des attaques imminentes, a déplacé son raisonnement lundi, déclarant notamment :

«Tout cela s’inscrit dans une plus grande stratégie. Le Président Trump et nous, au sein de son équipe de sécurité nationale, sommes en train de réétablir la dissuasion, une dissuasion réelle face à la République Islamique d’Iran.»

Trump lui-même a semblé faire marche arrière, affirmant que la question de la réalité ou de l’imminence de l’attaque était secondaire, tant Soleimani était un personnage malfaisant :

«Les Médias (spécialistes des) Fake News et leurs partenaires Démocrates travaillent dur pour déterminer si la future attaque du terroriste Soleimani était « imminente » [dans un 1er tweet supprimé, Trump avait écrit « éminente »] ou non, et si cela faisait consensus dans mon équipe. La réponse aux deux questions est un OUI haut et fort, mais cela n’a pas vraiment d’importance à cause de son horrible passé !»

Tout cela a soulevé le soupçon que la décision de tuer Soleimani n’ait pas grand-chose à voir avec les événements actuels, mais soit en réalité une opération planifiée depuis longtemps. NBC News rapporte maintenant que c’est précisément le cas :

Le Président Donald Trump a autorisé l’assassinat du Général iranien Qassem Soleimani il y a sept mois pour le cas où l’agression accrue de l’Iran entraînerait la mort d’un Américain, d’après cinq actuels et anciens hauts responsables de l’administration.

La directive présidentielle de juin a été émise avec la condition que Trump devrait donner son accord final avant toute opération spécifique visant à tuer Soleimani, ont déclaré des responsables.

L’idée de tuer Soleimani, Général régulier de l’armée d’un Etat avec lequel les États-Unis ne sont pas en guerre, est probablement, comme beaucoup d’autres mauvaises idées, sortie de la tête de John Bolton.

Après que l’Iran ait abattu un drone américain en juin, John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale de Trump à l’époque, a exhorté Trump à riposter en autorisant une opération visant à tuer Soleimani, ont déclaré des responsables. Le Secrétaire d’État Mike Pompeo voulait également que Trump autorise l’assassinat, ont déclaré des responsables.

Mais Trump a rejeté l’idée, disant qu’il ne prendrait cette mesure que si l’Iran violait sa ligne rouge : tuer un Américain. Le message du Président était : «Ce choix n’est sur la table que s’ils touchent des Américains», selon une personne informée de la discussion.

Ensuite, des forces non identifiées à ce jour ont tiré 30 roquettes à courte portée sur une base américaine près de Kirkouk. La salve n’était pas destinée à tuer ou blesser qui que ce soit :

Les roquettes ont atterri dans un endroit et à un moment où le personnel américain et irakien n’était normalement pas présent, et ce n’est que par un mauvais coup du sort que M. Hamid a été tué, ont déclaré des responsables américains.

Sans présenter aucune preuve, les États-Unis ont accusé les Kataib Hezbollah, une faction des Unités de mobilisation populaires irakiennes, d’avoir tiré les roquettes. Washington a lancé des frappes aériennes contre un certain nombre de positions des Kataib Hezbollah près de la frontière syrienne, à des centaines de kilomètres de Kirkouk, tuant plus de 30 membres des forces de sécurité irakiennes.

Sans surprise, cela a provoqué des manifestations à Bagdad, au cours desquelles une foule d’Irakiens déchaînés a franchi le mur extérieur de l’ambassade des États-Unis, mais s’est rapidement retirée. Trump, qui s’en était pris avec virulence à Hillary Clinton lors du raid sur le poste de consulat & de la CIA à Benghazi (Libye), ne voulait pas être embarrassé par une violation complète de son ambassade.

Les médias affirment que c’est la violation de l’ambassade qui a conduit à l’activation d’une opération qui avait déjà été planifiée depuis un an avant que Trump ne la signe il y a sept mois. Comme le décrit le New York Times.

Au cours des 18 derniers mois, ont indiqué des responsables, des discussions avaient eu lieu sur le caractère opportun ou non d’un assassinat du Général Soleimani. Pensant qu’il serait trop difficile de le frapper en Iran, les responsables ont envisagé de s’en prendre à lui lors de l’une de ses fréquentes visites en Syrie ou en Irak et se sont concentrés sur le développement d’agents dans sept entités différentes pour rendre compte de ses mouvements : (il s’agissait d’espionner de près) l’Armée syrienne, la Force al-Qods à Damas, le Hezbollah à Damas, les aéroports de Damas et Bagdad, les forces de mobilisation des Kataib Hezbollah et des autres Unités de mobilisation populaire en Irak.

C’est la violation de l’ambassade et un lobbyiste de l’industrie de la guerre qui ont convaincu Trump de finalement appuyer sur la détente symbolique :

Il y a deux semaines, le Secrétaire à la Défense Mark Esper a présenté une série d’options de riposte au Président, dont le meurtre de Soleimani. Esper a présenté les avantages et les inconvénients d’une telle opération, mais a clairement indiqué qu’il était favorable à l’élimination de Soleimani, ont déclaré des responsables.

Trump a signé et l’opération s’est développée à partir de là.

Il n’y avait aucune information sur une «menace imminente» ou quoi que ce soit de ce genre.

Il s’agit d’une opération sur laquelle les services américains travaillaient depuis 18 mois. Trump l’a validée il y a plus de six mois. Ceux qui l’avaient planifiée attendaient simplement une chance de l’exécuter.

Nous ne pouvons même pas être sûrs que ce sont les tirs de roquettes contre l’ambassade qui ont poussé Trump à donner son feu vert pour cet assassinat. Peut-être que la CIA et le Pentagone n’attendaient qu’une chance de tuer en même temps Soleimani et Muhandis. Leur rencontre à l’aéroport de Bagdad n’était pas secrète et aurait fourni l’occasion qu’ils attendaient.

Ensemble, Soleimani et Muhandis étaient le ciment qui maintenait les nombreuses factions chiites en Irak ensemble, qu’il s’agisse des factions armées ou des forces politiques.

Aujourd’hui, le religieux irakien Muqtada al-Sadr, qui a sa propre milice, et les dirigeants irakiens du Hachd al-Cha’bi se sont rencontrés à Qom, en Iran, pour discuter de la façon dont les troupes étrangères peuvent être expulsées d’Irak. Le nouveau chef de la force al-Qods Général Ismail Qaani sera probablement présent pour leur donner des conseils.

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais, avait déjà affirmé que les justifications de l’administration Trump pour l’assassinat de Soleimani étaient mensongères, et que cette opération s’inscrivait dans une nouvelle phase de l’offensive américaine sur la région :

«Face à tous les échecs cuisants de l’administration américaine (Venezuela, Corée du Nord, Chine, Syrie, Iran…), Trump a donc opté pour une nouvelle politique. Nous ne sommes pas face à un crime isolé : pour Washington, l’assassinat de Soleimani n’est pas un événement isolé que l’on pourrait dépasser. Pour eux, c’est un début. C’est le début d’une nouvelle phase (de l’agression) américaine dans la région. Jeudi 2 janvier, ils ont initié une guerre d’un nouveau genre dans la région. […]

L’administration Trump a réfléchi à ce qu’elle devait faire pour modifier les équations, affaiblir et briser l’Axe de la Résistance, ébranler l’Iran, restaurer la confiance chez ses alliés et ses instruments dans la région, retrouver son prestige, gagner les faveurs intérieures pour les élections présidentielles, imposer ses conditions dans la région, et réaliser un succès dans sa politique extérieure. Ils ont donc cherché ce qu’ils pouvaient faire. Ils ont eu l’idée de frapper le cœur de l’Axe de la Résistance [Qassem Soleimani]. […]

Lors de nos rencontres précédentes, j’avais dit au Hajj Qassem que les médias & publications américains insistaient sur lui, qu’on trouvait sa photo en première page des journaux, et qu’on le présentait comme « le Général irremplaçable ». Cela constituait une préparation médiatique et politique à son assassinat. [Il était] l’élément central, qui représente le lien, l’attachement, la force, l’unité du destin et des objectifs, qui insuffle une même âme dans tous les pays, les peuples et les factions de l’Axe de la Résistance. Ils ont donc décidé de tuer cet homme, et de manière publique, ouvertement, car tel était leur objectif. Ce n’était pas gratuit ou un simple coup médiatique, c’était volontaire, avec des objectifs psychologiques, politiques et militaires. Ils espéraient que l’Iran et l’Axe de la Résistance auraient peur, reculeraient et feraient des concessions, et ils espèrent bien d’autres choses encore. Cet assassinat s’inscrit dans le cadre des deux projets rivaux en compétition : le projet d’hégémonie américano-israélien sur notre région, et le projet adverse qui est celui de la Résistance, de l’indépendance, de la souveraineté, de la libération et de la liberté, de l’auto-détermination des peuples, de la réappropriation de nos lieux saints par notre Communauté (arabo-musulmane). […]

Si on laisse passer l’assassinat de Qassem Soleimani, d’Abu Mahdi et de leurs compagnons, de cette manière (si barbare et si ouvertement), alors je vous affirme que ce ne sera que le début, le dangereux début (d’une nouvelle campagne d’agression de Washington) contre tous les mouvements de la Résistance et tous leurs dirigeants, tous les Etats et entités de la Résistance, l’Axe de la Résistance, la cause palestinienne et la cause d’Al-Quds (Jérusalem). Après ça, la région serait soumise à toutes les agressions américaines et israéliennes, (qui seraient encouragées par l’absence de représailles dignes de ce nom).»

Dimanche 12 janvier, Nasrallah a prononcé un autre discours. Il a appelé les Kurdes d’Irak à payer leur dette envers Soleimani et le Hezbollah, contractée du fait de leur lutte conjointe contre Daech, et à contribuer à l’expulsion des soldats étrangers d’Irak :

«L’Irak est le premier pays concerné par la nécessité de répondre à ce crime, parce qu’il s’est produit en Irak, parce qu’il visait Abu Mahdi al-Muhandis, un grand commandant irakien, et parce que Soleimani a défendu l’Irak.

Je demande à Masoud Barazani de remercier Soleimani pour ses efforts dans la défense d’Erbil et de la région du Kurdistan, car Soleimani a été le seul à répondre à votre appel. Soleimani et avec lui des hommes du Hezbollah se sont rendus à Erbil.

Ce jour-là, Barazani tremblait littéralement de peur, mais Soleimani et les frères du Hezbollah vous ont aidé à repousser cette menace sans précédent ; maintenant, vous devez rembourser ce bienfait en participant à l’effort visant à expulser les Américains d’Irak et de la région.»

La famille Barazani, qui gouverne la partie kurde de l’Irak, s’est vendue aux sionistes et aux États-Unis il y a longtemps. Elle ne soutiendra certainement pas l’effort de résistance. Mais la demande de Nasrallah est très embarrassante pour le clan et pour Masoud Barazani personnellement.

Jusqu’à présent, je n’ai trouvé que cette réponse plutôt confuse de sa part :

La réponse du Gouvernement régional du Kurdistan au discours immoral prononcé par Hassan Nasrallah, à travers le mécanisme de lutte antiterroriste, est un message clair du Gouvernement régional à ces terroristes : la réponse aux terroristes doit passer par le mécanisme de lutte antiterroriste.

En tant que chefs militaires, Soleimani et Muhandis sont certainement remplaçables. Les milices qu’ils ont créées et dirigées continueront de fonctionner.

Mais les deux hommes ont également joué des rôles politiques importants en Irak, et il faudra du temps pour trouver des personnes adéquates pour les remplacer. Il est donc probable que la situation politique déjà bouillonnante en Irak débordera bientôt, car les factions chiites vont devoir se mettre d’accord pour la sélection d’un nouveau Premier ministre et d’un nouveau gouvernement.

Les États-Unis se réjouiront de toute dissension, et tenteront d’installer un candidat qui rejettera la décision du parlement irakien de retirer les forces étrangères du territoire irakien.

 

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