Sayed Nasrallah: «Le mandat actuel ne sera pas renversé, il nous faut une politique de sauvetage urgente»
Par AlAhed
A l'occasion de la commémoration de l'Arbaïne de l'imam Hussein au mausolée de sayeda khawla, fille de l'imam Hussein, à Baalbeck au nord-Est du Liban, le secrétaire général du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah a prononcé un discours devant des milliers de partisans rassemblés à Baalbeck.
«Que la paix de Dieu soit sur vous, sur son Messager, sur sa famille et ses compagnons. Que la paix de Dieu soit sur l'imam Hussein, Ali bin Hussein, les compagnons et la famille de Hussein. Je vous présente mes condoléances pour cette occasion triste. Je vous remercie au début, grands et petits, femmes, hommes et enfants, pour votre participation massive, pour votre long parcours à pieds, je remercie ceux qui ont dressé les tentes pour servir les piétons sous une grande chaleur.
Je parlerais seulement de cette occasion et des derniers développements internes au Liban. Nous commémorons l'Arbaïne de l'imam Hussein dans la ville de Baalbeck. La procession de la famille de l'imam Hussein est passée par cette ville, sayeda Zeinab, les enfants, l'imam Zein al-Abidin, et la tête de l'imam Hussein, quand ils ont été capturés en 61 ans de l'Hégire. C'est ainsi que les habitants de Baalbeck ont mis à découvert le complot du régime omeyyade. Ils ont réalisé qu'il ne s'agit pas d'appostats comme l'a prétendu Yazid. Mais lorsqu'ils ont vu la tête de l'imam Hussein et les femmes capturées de la famille du prophète, la population s'est révoltée et des affrontements ont éclaté et ont duré pour plusieurs jours. Les habitants de Baalbeck ont prêté main forte à Sayeda Zeinab face au despotisme de Yazid. Cette population font preuve au long des décennies et des siècles qu'ils n'ont pas abandonné l'imam Hussein, et à chaque fois qu'ils entendaient l'appel de l'imam Hussein au jihad, partout dans le pays, comme au sud et à Beyrouth, ils se soulevaient pour soutenir et répondre à cet appel. Les jeunes de cette région étaient toujours aux fronts là où ils devaient l'être. Ils ont scandé haut et fort: "A tes ordres Sayeda Zeinab" et à chaque échéance, ils font preuve de fidélité et de bravoure.
De Baalbeck, les regards sont briqués sur Kerbala, où des millions de fidèles ont convergé des quatre coins du monde pour marcher des centaines de milliers de km, sans tenir compte de la chaleur, de la faim, de la soif, et des dangers, vers Kerbala. Ils sont tellement organisés et servis par le peuple irakien généreux. Et une fois arrivés devant le mausolée de l'imam Hussein, ils se mettent à pleurer avec nostalgie. Qui est cet homme qui fait pleurer les gens depuis des milliers d'années à ce jour? Le monde est étonné par ce phénomène inouï.
De nos jours, les despotes du monde sont contrariés à la vue de ces processions millionièmes.
Etre fidèle à l'imam Hussein signifie savoir dire le mot convenable au temps convenable. Tout le monde au Liban doit avoir le sens de responsabilité face à cette période dangereuse et cruciale du pays. Il est facile de jeter les responsabilités sur les autres parties politiques, de démissionner, d'essayer de profiter des manifestations, et de se tenir à distance pour observer de loin les développements.
Le plus facile est de se lancer les accusations. Il y a quelques jours, quand les incendies ont ravagé le pays, tous les responsables se sont lancé les accusations. Chacun se comporte comme s'il n'était pas responsable.
La situation financière et économique est le résultat de mauvaises politiques économiques adoptées depuis plus d'une vingtaine d'années.
La première chose qu'il faut faire est que tout le monde assume sa responsabilité, même nous, nous devons accepter de relever les défis. Il est honteux de fuir les responsabilités, surtout ceux qui ont pris part aux gouvernements passés pendant une trentaine d'années.
Que toutes les parties viennent participer à trouver les solutions. Qui paiera le prix? Tout le peuple libanais. Laissez de côté les calculs politiques pour ne pas entrainer le pays dans l'inconnu.
Je m'adresse à tous les Libanais: il existe de véritables dangers qui menacent le pays:
1- L'effondrement économique et financier et le pays sera en faillite à l'instar de la Grèce.
2- Le danger de l'explosion populaire en raison des politiques erronées. Faire des réformes ne signifie pas imposer des impôts supplémentaires sur la classe pauvre.
Cette approche est mauvaise. Nous pouvons empêcher l'effondrement et l'explosion dans le pays. Ceci nécessite une décision et une volonté sincère. Ce qui a eu lieu ces deux jours montre que le recours à des impôts supplémentaires provoquera l'explosion de la rue.
Sachez que les nouveaux impôts étaient une simple proposition et ne sont pas devenus une décision effective. Le ministre de l'information aurait pu expliquer ceci au monde.
Un mot aux autorités: les responsables doivent être convaincus que les gens pauvres ne peuvent plus supporter de nouveaux impôts. Certains au pouvoir pensaient que les nouveaux impôts passeraient calmement. Mais ce qui a eu lieu a démontré que la population n'accepte plus d'impôts supplémentaires.
Ce n'est pas vrai qu'il n'existe pas d'autres options pour résoudre la crise. Nous pouvons sauver notre pays en acceptant de prendre des décisions courageuses pour lutter contre la corruption. Le problème ne réside pas dans le gouvernement mais dans la méthodologie. Si le gouvernement actuel prend des mesures pratiques et traite les problèmes de corruption et de gaspillage, s'il fusionne des sociétés pour éviter de grandes dépenses, s'il prend des mesures de protection, si les parties acceptent de présenter des sacrifices pour sauver le pays, je suis certain que les pauvres accepteront de faire le nécessaire pour sortir de la crise.
Cette méthodologie qui se résume par des politiques sérieuses, comme la lutte contre la corruption, faire des sacrifices au niveau de tous, les riches, les banques, les sociétés, les entreprises. Tout ce qui a été dit dans les médias que le Hezbollah planifie d'attaquer les banques n'est pas correct. Ceci n'est pas vrai, parce qu'il y aura de mauvaises répercussions économiques.
Tout le monde doit présenter des sacrifices et il est malsain de venir imposer aux pauvres des taxes alors que tous les jours ils découvrent de nouveaux scandales et de nouveaux vols d'argent. La population ne peut pas accepter ceci.
Par exemple, les gens offrent leur argent et les femmes présentent leur parure à la résistance parce qu'ils sont certains que leurs argents ne sera pas volé.
Il existe une véritable crise de confiance en ce pays et les dirigeants doivent prendre des décisions sérieuses. Dans ce cas, nous allons défendre les mesures du gouvernement, parce que ceci décidera de l'avenir du pays.
Je m'adresse maintenant aux manifestants:
Si ce gouvernement démissionne, on n'est pas certain de la formation d'un nouveau gouvernement d'ici, un ou deux ans.
2- Certains parlent d'un nouveau gouvernement, mais on va revenir à la case départ, parce que les mêmes parties politiques seront représentées.
3- On appelle à la formation d'un gouvernement technocrate. Dans la situation actuelle, un tel gouvernement ne réussira pas sa mission. Et certaines parties œuvreront à mettre à échec ce gouvernement.
4- Faire des élections parlementaires: sachez que nous aboutirons au même résultat.
Il est difficile de trouver un autre gouvernement qui puisse résoudre les problèmes. Ce gouvernement doit adopter une approche différente qui nécessite du courage, du sérieux et de la sincérité.
Le soulèvement de la population est un message pour tous, et tout le monde doit se mobiliser pour traiter les problèmes. L'importance de la mobilisation populaire est qu'elle est spontanée, libre et n'est pas instiguée par des parties tierces. Votre mobilisation était sincère, non politisée, et non communautaire.
Nous avons entendu les voix réclamant l'intervention du Hezbollah. Sachez que si le Hezbollah descend dans les rues, la mobilisation changera de face. Dans ce cas, le monde dira que l'Iran envoie un message aux Etats-Unis via le Liban.
Quand des partis politiques participent à ces manifestations et pourtant ils étaient au pouvoir depuis des dizaines d'années, votre mouvement populaire sera exploité politiquement pour faire des comptes.
Pour réussir, votre mobilisation doit rester loin de la politisation. Je vous conseille de ne pas piller les magasins, de ne pas insulter les gens, ceci entame votre image, vous pouvez vous exprimer sans insultes.
Nous appelons les forces sécuritaires et l'armée à faire preuve de miséricorde envers les protestataires, et nous demandons aux manifestants de ne pas s'attaquer aux forces sécuritaires.
Je le dis et le reprends: quand la lutte contre de nouveaux impôts nécessite de descendre dans la rue, nous allons descendre.
Nous avons pris la décision: nous rejetons tous nouveaux impôts sur les pauvres. Sachez encore que notre mobilisation dans la rue n'est pas si simple que la vôtre. Si le Hezbollah prend la décision de descendre dans la rue, il descendra et ne quittera les places qu'après la réalisation de nos revendications.
J'espère de tous les gens qui misent sur nous de comprendre notre cas. Nous sommes un grand parti, et notre mobilisation dans la rue changera les équations. Actuellement, nous appelons à la collaboration et à la coopération entre toutes les composantes du gouvernement.
Celui qui fuit les responsabilités doit être jugé, surtout ceux qui font partie de la crise. Nous appelons tout le monde à être responsable.
Aux forces politiques qui comptent renverser le mandat je dis clairement: vous ne pouvez pas réaliser votre objectif. Ce mandat restera à sa place et votre timing est inadéquat.
Nous, au Hezbollah, n'abandonnerons pas notre pays, ni notre peuple. Nous avons versé du sang pour ce peuple, nous ne permettrons à quiconque de le noyer. Si les responsables ont la volonté sincère de changer la situation, nous avons de grandes options pour améliorer la situation.
Nous n'allons pas perdre espoir, parce que le désespoir est la qualité des faibles. Nous n'allons pas abandonner nos lieux saints, ni les opprimés, parce que nous renoncerons jamais à l'imam Hussein: A tes ordres notre imam.
Je vous remercie tous et que la paix de Dieu soit sur vous.