Pas de nouvelles libérations au procès de militantes saoudiennes
Par AlAhed et AFP
La plupart des femmes ont été arrêtées l'an dernier dans le cadre d'une campagne de répression contre des militantes de la cause des femmes, juste avant la levée en juin 2018 de l'interdiction qui était faite aux femmes de conduire.
Une audience d'un tribunal saoudien s'est achevée mercredi sans décision sur des demandes de libération sous caution de huit militantes des droits humains, alors que trois autres avaient été libérées temporairement la semaine dernière dans ce procès très médiatisé.
Onze femmes, dont certaines disent avoir victimes de torture et d'abus sexuels pendant près d'un an en détention, sont jugées depuis le 13 mars par une cour pénale à Riyad sur la base d'accusations de contact avec des médias étrangers, avec des diplomates et avec des organisations de défense des droits humains.
Trois d'entre elles --la blogueuse Eman al-Nafjan, la professeure retraitée Aziza al-Youssef et une autre universitaire, Rokaya al-Mohareb-- ont été libérées le 28 mars au lendemain de la deuxième audience du procès. D'autres devaient être libérées par la suite mais les trois juges qui présidaient l'audience mercredi n'ont pas pris de décision en ce sens.
“La troisième audience du procès des militantes saoudiennes s'est achevée sans qu'aucune d'entre elles ne fasse l'objet d'une condamnation ou d'une libération provisoire", ont déclaré sur Twitter les "Prisonnières d'opinion", un groupe saoudien qui suit les détenus politiques. La prochaine audience est prévue le 17 avril, a ajouté le tweet. Diplomates et médias étrangers ne peuvent pas assister au procès.
La plupart des femmes ont été arrêtées l'an dernier dans le cadre d'une campagne de répression contre des militantes de la cause des femmes, juste avant la levée en juin 2018 de l'interdiction qui était faite aux femmes de conduire. Le frère et la sœur d'une militante très connue, Loujain al-Hathloul, ont déclaré qu'ils subissaient des pressions de la part de proches de l'Etat saoudien pour qu'ils gardent le silence sur son traitement en détention. "Pressions de toutes parts pour garder le silence", a déclaré sur Twitter sa sœur Alia al-Hathloul, sans identifier personne. "Nous nous sommes tus et les pires tortures se sont produites (...) Je pourrai me taire, mais seulement quand Loujain sera avec nous et que ceux qui l'ont torturée seront jugés", a-t-elle ajouté.
Lors d'une audience la semaine dernière, certaines des femmes ont affirmé avoir été victimes de torture et de harcèlement sexuel en détention. Elles ont accusé les interrogateurs de les avoir soumises à des chocs électriques, de les avoir fouettées et de s'être livrés à des attouchements sexuels en détention.
On s'attendait initialement à ce que les militantes comparaissent devant une cour spécialisée dans des affaires de terrorisme, mais le procès a été transféré devant un tribunal pénal, sans explication. Cela a donné lieu à des spéculations sur une libération rapide des militantes.
Certaines détenues, dont Loujain al-Hathloul, ont récemment été contraintes de signer des lettres en prison demandant une grâce au roi Salmane, selon des sources ayant accès au procès. Mais des sources proches de l'establishment saoudien ont averti que des critiques publiques des familles pourraient prolonger la détention des militantes.
"L'un des problèmes de l'Arabie saoudite, je crois, c'est de ne pas être perçue comme soumise à la pression occidentale", a déclaré la semaine dernière sur Twitter Ali Shihabi, fondateur de la Fondation Arabia, un groupe de réflexion pro-saudien. "Ça ne peut que retarder leur libération", a-t-il ajouté.
Avant leur libération provisoire, les trois femmes libérées et les garants de leur libération sous caution ont été priés de signer un engagement qu'ils s'abstiendront de s'adresser aux médias, selon plusieurs personnes ayant accès au procès.
Au moment de leur arrestation, des responsables saoudiens ont accusé les militantes de liens avec des agences de renseignement étrangères, tandis que des médias progouvernementaux les ont qualifiées de "traîtres" et d'"agents d'ambassades". Les chefs d'inculpation ne font cependant aucune mention de contacts avec des agents étrangers, disent des militants ayant examiné les documents.