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Il y a dix ans...La chute d’un Cauchemar

Il y a dix ans...La chute d’un Cauchemar
folder_openMai 2015 access_time depuis 13 années
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Situé non loin de la frontière de la Palestine occupée, l'ancien fort français de Khiam au Sud du Liban a été pour des longues années une prison clandestine et un centre de torture particulièrement cruelle.
Contrôlée par l'armée du Sud Liban (ASL), la milice libanaise auxiliaire d'"Israël", la prison de Khiam a vu passer entre 5000 et 6000 résistants de toutes obédiences capturés durant des opérations ainsi que des simples villageois refusant de collaborer avec l'ALS. Considérée comme l'une des pires prisons politiques du monde, la prison de Khiam est devenue le symbole de mauvais traitements et des tortures.
Le 23 mai 2000, le camp de concentration comme le qualifient les libanais, a chuté. Scandant "Dieu est grand", des villageois et des familles des détenus se sont précipités vers la prison: ils ont renversé les barbelés, pénétré dans le bâtiment et ont forcé les portes des cellules avec des pierres, des bâtons et des barreaux arrcahés aux fenêtres. Les gardiens de la prison ont pris la fuite vers la Palestine occupée et la foule a libéré les 145 derniers prisonniers.
Soha bechara, une militante libanaise a été détenue pendant dix ans, dont 6 en isolement complet dans l'enfer du Khiam.
Aujourd'hui, Soha Bechara vit à Genève, avec son mari et ses 2 filles. Bien qu'elle a été libérée lors d'un échange de détenus entre la Résistance et l'ennemi en 1998, elle poursuit son engagement de manière pacifique sur la scène européenne pour défendre la cause palestinienne et dénoncer "le seul conflit où la communauté internationale n'assume pas ses engagements".

Interview- Malak Assaf

Il y a dix ans...La chute d’un Cauchemar Quels sont les motifs qui ont incité la jeune étudiante Soha à renoncer à sa vie ordinaire et résister à l'ennemi sioniste?

Avec la guerre civile d’un côté, et l’occupation israélienne du Sud-Liban de l’autre côté, je ne peux pas parler d’une vie ordinaire.
Ma vie a été belle et bien marquée par la guerre civile au premier rang. Les bribes de l’histoire du monde arabe avec la montée du sionisme, de la création d’Israël sur le corps de la Palestine, des réfugiés palestiniens, de la cause du peuple palestinien ont resté à la marge de la guerre civile. Nous, (surtout les jeunes habitants Beyrouth) étions très pris par le souci quotidien de la guerre civile. Ces bribes de notre histoire, avec la première invasion israélienne du Sud-Liban en 1978, ont continué à augmenter, à s’intensifier jusqu’à juin 1982.
Avec l’invasion israélienne de 1982, tout a basculé pour moi. Là il fallait que je résiste contre les israéliens; avec les massacres de Sabra et Chatila, décision est prise. Il faut que j’adhère la Front de la Résistance Nationale libanaise. Je ne voulais pas que je devienne une deuxième palestinienne.
La défense de notre identité, de notre entité, de notre pays est devenue pour moi une priorité. Il faut qu’on se réunisse face à notre vrai ennemi, l’occupation israélienne, c’était notre vraie guerre et pas la guerre civile.
Notre survie en tant que Liban débutait par la libération de notre pays de l’occupation israélienne.

.Vous avez passé 10 ans dans la prison de Khiam? Pour vous, que représente cette geôle? quelles mémoires en gardez-vous?
Le camp de Khiam symbolise l’histoire du Liban avec l’occupation israélienne, et plus précisément bien sûre, celle des habitants du Sud Liban. Le camp représente ces centaines des milliers parmi les libanais qui ont été marqué directement par cette occupation.
Ce camp était un lieu hors tout droit. Dans ce camp régnait la loi de la jungle. Autant que ce camp symbolisait la souffrance autant il symbolisait la résistance.
Ce lieu est gravé dans notre mémoire, et notre mémoire est gravé dans les ruines de ce camp.

.Qu'avez vous senti lorsque vous avez vu les libanais en 2000 envahissant la prison de Khiyem et libérant les prisonniers?
Un moment unique pas seulement pour moi, pas seulement pour les libanais, mais dans l’histoire de l’humanité.
C’était la liberté pour les détenus, c’était la libération ; c’était la victoire pour les martyrs qui ont donné le plus cher pour qu’on puisse vivre ce grand moment…
Sans oublier qu’en 2000 nous avions encore nos détenus en "Israël", et il y a Chebaa ainsi que les collines de kfarchouba, notre cause était présente mais la victoire est là couronné par les martyrs.

.Comment la militante Soha Bechara mène sa vie actuelle? Mère de deux filles, que faites vous pour semer l'âme de la résistance dans leurs esprits?
A part ma vie de famille que je mène quotidiennement, je continue en Europe, en occident de défendre la cause palestinienne. La cause du peuple palestinien demeure pour moi la cause centrale pas seulement au moyen Orient mais international.
Par contre concernant mes enfants, mon but ce n’est pas de semer l’âme de la résistance dans leurs esprits. Mon but c’est de leur apprendre à aimer la vie, leur apprendre comment se protéger dans la vie, être solidaire avec les autres, à penser aux autres, à être généreux….après c’est à eux de prendre les décisions….

.Le 25 mai, nous célébrons le 10 e anniversaire de la fête de la Résistance et de la libération. Que représente pour vous cette date? Que dites vous au peuple libanais à cette occasion?
Le 25 mai c’est la fin de 22ans d’occupation israélienne de notre pays (à part chebaa et tilal kfarchouba). Le 25 mai, c’est le retour de nos villageois dans leur maison, la tête levée. Le 25 mai, c’est la libération de nos détenus au camp de Khiam par les villageois eux même. Cette date c’est la victoire de tous ces libanais qui ont dit non à Israel, de toutes ces mères qui ont refusé de collaborer avec l’ennemi, de tous ces résistants qui ont surmonté la peur et ont continué à résister. Le 25 mai c’est le retour de nos martyrs pour partager avec nous toutes et tous, ce grand moment.
C’était très important de libérer notre pays mais le plus important après la libération, c’est de protéger cette libération.
Nous les libanais nous sommes responsable devant nos futures générations, et nos martyrs, nos sommes tenus de protéger cette victoire. Nous la protégeons en protégeant la résistance.

.Quel message envoyez-vous aux libanais qui réclament le désarmement de la Résistance au temps où "Israël" menace le liban et viole les résolutions internationales?
Je ne sais pas si ça une importance ou une influence d’adresser un message à des gens qui ne se sont même pas donné la peine de visiter les souffrances du Sud Liban. Peut être vous allez vous demander pourquoi j’utilise le mot visiter, effectivement qu’ils soient au moins des touristes, peut être à ce moment là ils vont comprendre, ou plutôt essayer de comprendre le rôle qu’a joué la résistance dans la vie des centaines des milliers des libanais.
Pour une fois au Liban nous avons un point fort, et ces quelques libanais qu’est ce qu’ils veulent qu’on détruise nous même ce point fort…je ne comprends pas la logique…à qui profite la destruction ou le désarmement de la résistance à part qu’à "Israël" !!!


Qui est Soha Bechara?
Soha Bechara est née à Beyrouth en 1967 dans une famille engagée au sein du parti communiste libanais. Elle passe son enfance dans la capitale, ne retournant au Sud-Liban, région d'origine de sa famille, que pour les vacances. Mais avec l'occupation israélienne de 1978 - qui se poursuit avec celle de l'Armée du Sud-Liban, sous contrôle israélien -, elle ne peut plus retourner sur la terre de sa famille. Très jeune, Soha entre alors dans la résistance contre l'occupation. Etudiante de 21 ans, membre du Front national de la résistance libanaise (FNRL), elle tente en 1988 d'éliminer le général Antoine Lahal, chef de l'Armée du Sud-Liban. Son acte lui vaudra dix ans de détention sans jugement dans le camp de Khiam dont elle a été libérée en 1998 dans un échange de détenus entre le Hezbollah et l'ennemi israélien.
Invitée en France pour y poursuivre ses études, Soha Bechara saisit cette chance pour dénoncer l'enfer de Khiam. Commence alors une nouvelle vie: inlassablement, d'associations en ONG, de médias en meetings politiques, jusqu'à la Commission des droits de l'homme de l'ONU, elle informe de l'existence de cette prison et de ce qui s'y passe, dans l'espoir de faire libérer ses camarades de détention.

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