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En Arabie saoudite, sous prétexte de développement économique, on réprime un peu plus

En Arabie saoudite, sous prétexte de développement économique, on réprime un peu plus
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Porté par le jeune prince héritier Mohammed ben Salmane (31 ans), le plan «Vision 2030» a pour objectif de diversifier, privatiser et ouvrir l'économie de l'Arabie saoudite, qui ne pourra bientôt plus profiter de sa rente pétrolière. Le royaume, dirigé depuis 2015 par le roi Salmane, l'a annoncé mardi: il souhaite notamment transformer ses îles sur la mer Rouge en stations balnéaires luxueuses. Un projet pharaonique qui s'ajoute à la création d'une cité de divertissement de 334 km², et à des investissements dans le cinéma et les médias. Un tournant majeur dans l'histoire du pays, mais derrière le discours d'ouverture, qu'en est-il vraiment?

En Arabie saoudite, sous prétexte de développement économique, on réprime un peu plus

Le prince héritier Mohammed ben Salmane a déclaré lors d'une interview en avril 2016, «je pense que d'ici 2020, si le pétrole s'arrête, nous pourrons survivre».

Depuis juillet 2014, le cours du Brent a baissé de plus de 65%, passant de 110 à 35 dollars par baril. Pour faire face à la chute, l'OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) décidait de maintenir sa production tout en déstabilisant celle d'autres pays, comme celle de l'Iran.

Mais depuis trois ans, les prix stagnent, et selon une étude du cabinet Kamco Research publiée en septembre 2016 le déficit saoudien atteignait déjà 84 milliards de dollars soit 15% du produit intérieur brut, alors que la monarchie est habituée aux excédents.

Madawi al-Rasheed, professeure saoudienne d'anthropologie sociale au King's College de Londres et auteure de l'ouvrage A History of Saudi Arabia, indique que «ce n'est pas facile d'ouvrir une économie axée historiquement sur le pétrole en seulement quelques années. Que dans les années 2020, l'Arabie saoudite puisse fonctionner sans pétrole, relève du fantasme».


Le plan Vision 2030 instaure aussi des mesures budgétaires inédites comme «la taxe sur les péchés»: sur le tabac et les sodas, les jeunes étant «touchés par les fléaux du diabète et du tabagisme».

Ces mesures interviennent alors que le roi Salmane avait dû reculer en avril dernier sur des coupes budgétaires importantes annoncées six mois auparavant: les suppressions des «badallat», ces primes qui constituent entre 20 et 40% du revenu des fonctionnaires.

«Les Saoudiens ne peuvent pas payer leur facture d'électricité. Il y a 70% des Saoudiens qui ne sont pas propriétaires de leur logement dans un pays extrêmement riche», rappelle al-Rasheed.

Nettoyage ethnique

Par ailleurs, le plan Vision 2030 sert aussi «d'excuse» au régime pour réprimer ses opposants. Depuis trois semaines, les forces saoudiennes attaquent leurs opposants dans la région de Qatif, où la localité d'Al-Awamiyah est assiégée depuis trois mois, et où cinq civils chiites ont trouvé la mort.

«Depuis 2011, on n'arrive pas à comprendre ce qu'il se passe à Qatif, les journalistes indépendants et étrangers étant interdits d'entrer dans la région», ajoute Madawi Al-Rasheed.

Une vidéo des affrontements postée sur Twitter montre les forces saoudiennes postées sur le toit d'une mosquée dans le quartier d'Al-Awamiyah, armées d'AKM et de RPG-7, des armes standards de la Garde nationale.

Sur Twitter, Madawi Al-Rasheed explique que «le discours saoudien officiel établit que le bombardement des zones chiites de Qatif, afin de pouvoir les transformer en destinations touristiques».

La chercheuse dénonce alors, «sous prétexte de développement, le régime saoudien pratique un nettoyage ethnique».

Une ouverture politique?

Si le plan 2030 modernise le pays, peut-il aussi moderniser le régime? Pas sûr. Le régime utilise la répression des minorités opposantes comme un outil pour affirmer son autoritarisme, et sauvegarder son assise.

Madawi Al-Rasheed avance que «le problème en Arabie saoudite est que les hommes et les femmes n'ont pas d'institutions pour se représenter. Il n'y a pas de parlement élu, pas de représentation».

En Arabie saoudite, les partis politiques et les syndicats sont interdits depuis 1932.

La chercheuse conclut: «Vision 2030 n'a rien à voir avec la démocratie. C'est un plan économique, qui reste silencieux sur les questions politiques».

Source: sites web et rédaction

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