noscript

Please Wait...

Des Français musulmans s’exilent à l’étranger, fuyant «l’islamophobie» et «le racisme systémique»

Des Français musulmans s’exilent à l’étranger, fuyant «l’islamophobie» et «le racisme systémique»
folder_openFrance access_timedepuis 6 mois
starAJOUTER AUX FAVORIS

Par AlAhed avec AFP

Après avoir échoué à 50 entretiens d'embauche pour un job de consultant, en dépit de ses qualifications et diplômes, Adam, Français de confession musulmane, a fait ses valises pour commencer une nouvelle vie à Dubaï.

«Je me sens beaucoup mieux ici qu'en France», estime désormais ce trentenaire d'origine nord-africaine.

«Ici on est tous égaux. On peut avoir comme patron une personne indienne, une personne arabe, un Français», témoigne-t-il à l'AFP, ajoutant que sa religion est «plus acceptée».

Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ dans des villes telles que Londres, New York, Montréal ou Dubaï.

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée «La France, tu l'aimes mais tu la quittes».

En France, «vous devez faire deux fois plus d'efforts quand vous venez de certaines minorités», reprend Adam, qui ne donne pas son nom de famille, comme tous ceux interrogés par l'AFP.

Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui «l'islamophobie» et le «racisme systémique» entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre.

«Plafond de verre»

La France, ancienne puissance coloniale et pays d'immigration, compte une importante population d'origine maghrébine et africaine.

Les enfants d'immigrés venus chercher une vie meilleure ou appelés à constituer une main d'œuvre bon marché dans les années 60 sont Français. Mais nombre d'entre eux se sentent étrangers dans leur propre pays, considérés comme des «citoyens de seconde zone». En particulier depuis les attentats terroristes de 2015 en France.

«Le climat en France s’est largement dégradé. En tant que musulman on est pointé du doigt», estime sous couvert de l'anonymat un banquier franco-algérien de trente ans, qui s'apprête à quitter son pays en juin, direction Dubaï.

Il évoque notamment certaines chaînes d'info et éditorialistes assimilant tous les musulmans à des extrémistes religieux ou des fauteurs de troubles.

Ce fils d'une femme de ménage algérienne, titulaire de deux masters, estime en outre s'être heurté à un «plafond de verre» dans son parcours professionnel en France.

En France, les statistiques ethniques et religieuses sont interdites. Mais de nombreuses enquêtes documentent depuis des années les discriminations frappant les personnes d'origine immigrée dans la recherche d'emploi, de logement, les contrôles policiers...

Un candidat au nom français a près de 50% de chances supplémentaires d’être rappelé par un employeur par rapport à un candidat au nom maghrébin, rappelle ainsi l'Observatoire des inégalités dans son rapport 2023.

«Morosité»

Le rapport très particulier de la France à la laïcité, les polémiques récurrentes sur le voile musulman, provoquent aussi le malaise chez certains.

Il y a une vraie spécificité française sur cette question. Dans notre pays, une femme qui porte le voile est reléguée à la marge de la société et il lui est notamment très difficile de trouver un emploi.

«Des femmes portant le hijab qui veulent travailler sont donc assez logiquement amenées à quitter la France», explique Olivier Esteves, l'un des auteurs de l'étude, au Monde.

«On étouffe en France», raconte à l'AFP un Français de 33 ans d'origine marocaine, qui s'apprête à émigrer en Asie du sud-est avec sa femme enceinte, «pour vivre dans une société plus apaisée et où les communautés savent vivre ensemble».

Cet employé dans la tech veut fuir «la morosité ambiante» et les «humiliations» du quotidien liées à son patronyme et ses origines.

«On me demande encore aujourd’hui ce que je fais dans ma résidence», où il vit depuis plusieurs années. «Et c’est pareil pour ma mère quand elle me visite. Mais ma femme qui est blanche de peau n’a jamais eu cette question», raconte-t-il.

«Cette humiliation constante est d’autant plus frustrante que je contribue net à cette société en faisant partie des hauts revenus qui paient plein pot», s'insurge-t-il.

Paradoxalement, la société française est pourtant «plus ouverte qu'il y a vingt ans» et «le racisme recule», souligne le dernier rapport annuel de l'Observatoire des inégalités, notant que 60% des Français déclarent n'être «pas du tout racistes», soit deux fois plus qu'il y a 20 ans.

Et la part de ceux qui pensent qu’il y a des «races supérieures à d’autres» a été divisée par trois, de 14% à 5%.

Comments

//