Soudan: les combats entrent dans leur deuxième semaine, toujours pas de cessez-le-feu
Par AlAhed avec AFP
Les combats sont entrés samedi 22 avril dans leur deuxième semaine au Soudan où des violents affrontements entre l’armée régulière et les paramilitaires ont fait des centaines de morts et des milliers de blessés. Dans la nuit, les fortes explosions qui avaient secoué la capitale Khartoum, ces derniers jours, ont diminué, mais les échanges de tirs ont repris dès le matin, selon des témoins.
Les violences ont éclaté le 15 avril entre l’armée du général Abdel Fattah Al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, et son adjoint devenu rival, le général Mohammed Hamdan Daglo, qui commande les Forces de soutien rapide (FSR), des paramilitaires redoutés. Les deux généraux avaient pris le pouvoir lors du coup d’Etat, mais ils se sont ensuite affrontés dans une lutte de pouvoir acharnée.
L’armée avait annoncé vendredi avoir accepté un cessez-le-feu de trois jours pour la fête de l’Aïd el-Fitr, qui marque la fin du mois sacré du jeûne musulman. Le général Daglo a déclaré dans un communiqué avoir «discuté de la crise actuelle» avec le secrétaire général de l’Organisation des nations unies (ONU), Antonio Guterres, notamment d’une «trêve humanitaire, des passages sûrs et la protection des travailleurs humanitaires». Les deux précédents cessez-le-feu de vingt-quatre heures annoncés en début de semaine ont également été ignorés.
Créées en 2013, les FSR du général Daglo regroupent des milliers d’anciens janjawids, des miliciens arabes recrutés par l’ex-dictateur Omar Al-Bachir, déchu en 2019, pour combattre des minorités ethniques au Darfour.
A Khartoum, ville de cinq millions d’habitants, le conflit a bouleversé la vie des habitants terrorisés, qui se sont réfugiés à l’intérieur de leur maison sans électricité, sous une chaleur écrasante. Des civils se sont aventurés à l’extérieur uniquement pour obtenir des denrées alimentaires d’urgence ou pour fuir la ville.
Khartoum a été le théâtre de certains combats parmi les plus féroces, avec des attaques aériennes, des chars dans les rues et des coups de feu dans les quartiers densément peuplés, mais la violence a explosé dans tout le pays.
Les combats ont fait rage notamment au Darfour, l’une des régions les plus pauvres du Soudan, où «la situation est catastrophique», selon un docteur de Médecins sans frontières. Des plans d’évacuation des ressortissants étrangers au Soudan sont en cours d’élaboration : les Etats-Unis, la Corée du Sud et le Japon ont déployé des forces dans les pays voisins, et l’Union européenne envisage de prendre des mesures similaires.
Plus de 400 morts et 3 500 blessés, risque de famine
Vendredi, le département d’Etat américain a fait savoir que la situation était encore trop risquée pour permettre l’évacuation du personnel de l’ambassade. Aussitôt, les FSR du général Daglo – très actives sur les réseaux sociaux – ont répondu être «prêtes à ouvrir tous les aéroports du Soudan» pour que «les pays amis voulant évacuer leurs ressortissants» puissent le faire.
La Corée du Sud et le Japon ont annoncé vendredi l'envoi d'avions militaires pour évacuer leurs ressortissants bloqués au Soudan.
Vingt-six Sud-Coréens dont du personnel diplomatique doivent être évacués, selon le ministère sud-coréen des Affaires étrangères.
Le ministère sud-coréen de la Défense a annoncé qu'il enverrait un avion de transport militaire C-130J et des soldats pour évacuer les Sud-Coréens. Ces moyens seront placés en veille dans une base américaine voisine à Djibouti pour pouvoir mener à bien l'évacuation.
Pour leur part, les Forces japonaises d'autodéfense (SDF) ont annoncé qu'un avion de transport C-130 était parti pour Djibouti. L'objectif de cette mission est «d'effectuer rapidement les préparatifs nécessaires pour transporter le personnel japonais et d'autres» présents au Soudan, ont tweeté les SDF en postant une photographie de l'appareil en train de décoller. Une soixantaine de Japonais se trouvent au Soudan, y compris le personnel de l'ambassade, selon Tokyo.
Un bilan publié par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) fait état de 413 morts et de 3 551 blessés dans les combats. La violence pourrait plonger encore des millions de personnes dans la faim au Soudan, où 15 millions d’habitants, soit un tiers de la population, ont besoin d’aide, selon le Programme alimentaire mondial.
Des analystes redoutent que les pays de la région ne soient entraînés dans le conflit. Des mesures urgentes sont nécessaires pour empêcher qu'il ne dégénère en «guerre civile à part entière», a averti l'International Crisis Group (IGC).