Le chef du Front Polisario dénonce le «virage radical» de l’Espagne
Par AFP
Le président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) et chef du front Polisario, Brahim Ghali, assiste à la 35e session ordinaire du sommet de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba, en Éthiopie, le 5 février 2022.
Le chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, en conflit depuis des décennies avec le Maroc, a dénoncé lundi le «virage radical» de l’Espagne après le soutien apporté par Madrid au plan d’autonomie marocain.
«Il est évident que c’est un virage radical qu’on n’attend pas de la part d’un pays qui est la puissance administrante "de jure"» – selon le droit, par opposition à de facto – du Sahara occidental, ex-colonie espagnole, a déclaré Brahim Ghali dans un entretien publié par le quotidien El Mundo.
Affichant jusqu’ici sa neutralité, Madrid a annoncé publiquement le 18 mars son soutien au plan d’autonomie marocain, qu’il considère désormais comme «la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution de ce différend».
Ce geste attendu par Rabat a permis de mettre fin à près d’un an de crise diplomatique majeure avec Madrid, provoquée par l’accueil en Espagne en avril de Brahim Ghali pour y être soigné du Covid.
Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez doit se rendre à Rabat dans les prochains jours afin de sceller cette réconciliation.
«Je me sens comme n’importe quel Sahraoui face à cette décision gravissime», l’Espagne «nous a abandonnés à notre sort en 1975 et 47 ans plus tard, ils font la même chose», a ajouté M. Ghali, qui ne s’était pas encore exprimé publiquement sur le changement de position du gouvernement espagnol.
«L’Espagne a toujours défendu une solution dans le cadre de l’ONU sur la base des résolutions» des Nations Unies, «ce qui veut dire défendre l’autodétermination du peuple sahraoui pour terminer son processus de décolonisation. C’est pour cela que nous ne comprenons pas ce virage radical du gouvernement espagnol», a-t-il poursuivi.
Critiqué de toutes parts en Espagne mais aussi par Alger, principal soutien du Polisario, le gouvernement espagnol affirme pour sa part qu’il n’a pas changé de position mais seulement fait «un pas supplémentaire» afin de contribuer à la résolution du conflit qui oppose le Maroc au Front Polisario depuis le départ des Espagnols en 1975.
Le point culminant de la crise entre Rabat et Madrid avait entraîné l’arrivée mi-mai de plus de 10.000 migrants dans l’enclave espagnole de Ceuta à la faveur d’un relâchement des contrôles côté marocain.
L’Espagne avait alors dénoncé un «chantage» et une «agression» de la part de Rabat, qui avait pour sa part rappelé son ambassadrice en Espagne, qui n’y est revenue que le 20 mars.