Cybersurveillance en Libye et en Egypte: 4 dirigeants d’entreprises françaises mis en examen
Par AlAhed avec AFP
Quatre dirigeants des entreprises françaises Amesys et Nexa Technologies, accusées d'avoir fourni du matériel de cybersurveillance aux régimes libyen et égyptien ayant permis de traquer des opposants, ont été mis en examen, a annoncé mardi la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) dans un communiqué transmis à l'AFP, dont les informations ont été confirmées de source judiciaire.
Philippe Vannier, président de la société Amesys jusqu'en 2010, a été mis en examen dans le volet libyen pour «complicité d'actes de torture».
Olivier Bohbot, président de l'entreprise Nexa, Renaud Roques, son directeur général et Stéphane Salies, ancien président, ont pour leur part été mis en examen pour «complicité d'actes de torture et de disparitions forcées» dans le volet égyptien, une information également dévoilée par Intelligence Online.
Ces mises en examen, prononcées mercredi et jeudi derniers, interviennent dans deux informations judiciaires distinctes, ouvertes au pôle «crimes contre l'humanité» du tribunal judiciaire de Paris à la suite de deux plaintes déposées par la FIDH et la Ligue des droits de l'homme (LDH).
La première vise la vente, entre 2007 et 2011 au régime de Mouammar Kadhafi, d'un programme de cybersurveillance baptisé Eagle, développé par Amesys.
Dans ce dossier, les parties civiles accusent la société d'ingénierie d'avoir fourni en toute connaissance de cause ce matériel à l'Etat libyen qui l'a utilisé pour repérer des opposants, ensuite emprisonnés et torturés.
«Donner lieu à des inculpations pour complicité»
En mai 2017, Amesys avait été placée sous le statut de témoin assisté, intermédiaire entre celui de témoin simple et celui de mis en examen.
La deuxième information judiciaire, ouverte en 2017, vise la vente par l'entreprise Nexa Technologies, dirigée par d'anciens responsables d'Amesys, du logiciel mis au point par cette dernière au régime d'Abdel Fatah al-Sissi, aussi utilisé pour traquer ses opposants.
Selon la FIDH, cette enquête a «par ailleurs été étendue à des faits de vente de technologie de surveillance à l'Arabie Saoudite».
«C'est une formidable avancée qui signifie que ce que nous constatons tous les jours sur le terrain, à savoir les liens entre l'activité de ces entreprises de surveillance et les violations des droits humains, peut recevoir une qualification pénale et donner lieu à des inculpations pour complicité», ont déclaré Clémence Bectarte et Patrick Baudouin, avocats de la FIDH, cités dans le communiqué.
Michel Tubiana, avocat et président d'honneur de la LDH, a exprimé le souhait que les autorités françaises s'engagent «résolument à prendre toutes les mesures pour empêcher l'exportation de technologies de surveillance +à double usage+ vers des pays qui violent gravement les droits humains».