Yémen ... la complicité des chancelleries
Le silence des chancelleries sur la guerre au Yémen est assourdissant. Un silence n'est jamais anodin et pour cause, l'UE continue d'alimenter de manière considérable les stocks d'armement de l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.
Des exportations d'armes qui permettent à la monarchie saoudienne et ses alliées d'entretenir une guerre qui tue, affame et déplace des millions de civiles yéménites.
Un conflit aux conséquences humanitaires sans précédent
La transition politique entamée en 2012 au Yémen à la suite du « printemps yéménite » est un échec cuisant. Le président internationalement reconnu Hadi est poussé à l'exil par la révolution du mouvement Ansarullah. Dans la nuit du 25 mars 2015, l'Arabie Saoudite à la tête d'une coalition d'une dizaine de pays lance l'opération « Tempête décisive » en direction du Yémen. La coalition intervient militairement sur le territoire Yéménite avec pour seul objectif de replacer le président Hadi au pouvoir et ainsi renforcé sa zone d'influence dans la région.
L'Arabie Saoudite et ses alliés s'enlisent dans un conflit qui après trente mois d'intenses combats n'ouvre aucune issue favorable à la paix. La population civile en paie le prix fort puisque d'après le coordinateur humanitaire au Yémen Jamie Mcgoldrick: « C'est probablement l'une des plus grandes crises dans le monde, mais c'est une sorte de crise silencieuse et de guerre oubliée. » Il s'agit effectivement d'une catastrophe humanitaire avec la plus grave crise de choléra au monde, 2 millions de déplacés, 17 millions de Yéménites face à l'insécurité alimentaire, s'ajoute à cela, l'absence de soin, l'accès limité à l'eau potable et à la nourriture pour une grande partie de la population civile qui subit le blocus organisé par l'Arabie Saoudite de plein fouet.
Le silence complice des chancelleries
L'Union européenne par son éternel double jeu diplomatique accorde une assistance humanitaire au Yémen d'un montant de 166 millions d'euros pour la période 2015-2017. Si celle-ci considère que le conflit devrait se résoudre par un dialogue politique sous l'égide des Nations unies, elle est pourtant la principale fournisseuse d'armes de l'Arabie Saoudite et des Émirats après les États-Unis. Les 28 États membres de l'Union ont autorisé plus de 57 milliards d'euros d'exportation d'armes vers l'Arabie saoudite et de 43 milliards d'euros pour les Émirats arabes unis pour la période allant de 2001 à 2015. La France, le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie, la Bulgarie, l'Allemagne et la Belgique apparaissent en tête de peloton dans la liste des exportateurs. Si Angela Merkel a confirmé que l'Allemagne interrompait la vente d'armes à l'Arabie Saoudite tant que celle-ci n'apportait pas d'éclaircissement à l'affaire Khashoggi, ses homologues français, britannique ou encore espagnol ne comptent pas suivre le mouvement. Pour cause, les intérêts que représente la vente d'armes sont considérables pour les chancelleries occidentales. En effet, l'organisation War child UK publie dans un rapport daté de septembre 2017 des gains record pour les entreprises britanniques d'armement. Selon l'organisation, les ventes s'élèvent à plus de 6 milliards de GBP, dont près de 600 millions de bénéfice, et ce depuis le début du conflit au Yémen. La France ayant marqué sa priorité pour les relations commerciales avec l'Arabie Saoudite a quant à elle récemment autorisé la vente de munitions (Nexter) et d'obus de mortier fabriqué par Thales Armements.
Les Nations unies ont observé « des violations généralisées des droits de l'Homme et des normes relatives aux droits de l'Homme » imputés aux membres des forces de sécurité appartenant au « gouvernement yéménite » et épaulé par l'Arabie Saoudite. Torture, bombes à sous-munitions, enfants soldats, blocus, de nombreux observateurs font part d'une guerre se déroulant dans l'impunité et le silence général. Les mêmes affirment qu'il s'agit d'une guerre qui ne pourrait avoir lieu sans le soutien et la complicité des chancelleries européennes. Une monarchie dépourvue de tous droits humains peut faire taire une Europe aveuglée par sa boulimie de croissance et infiniment dépendante des pétrodollars.
Source : sites web