L’urgence de sauver le patrimoine mondial de l’humanité au Yémen
Pierre-Alain Raphan, député LREM de l’Essonne, s’insurge contre la disparition du patrimoine historique du Yémen qui subit non seulement le drame d’une destruction de son peuple, mais aussi celui de sa mémoire plurimillénaire. Il demande à Audrey Azoulay, secrétaire générale de l’UNESCO, de prendre position sur ce dossier.
La guerre que connaît le Yémen prend des proportions dramatiques. Des millions de civils sont au bord de la famine et le conflit ne cesse de provoquer des dégâts qui ruinent l'ancienne Arabie heureuse. De nombreuses ONG tirent la sonnette d'alarme pour mettre un terme à ce que l'ONU a qualifié comme la pire crise humanitaire que connaît le monde à l'heure actuelle.
À ce lourd bilan humain s’ajoute un drame plus silencieux mais tout aussi navrant. Il s'agit de la destruction du patrimoine archéologique, culturel et architectural d’un pays qui a été le berceau de la civilisation arabe et islamique.
Une architecture hors norme au Yémen
En effet, depuis mars 2015 et le déclenchement de l'offensive par la coalition dirigée par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, des dizaines de sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO ont été détruits ou gravement altérés. À cet égard, il est utile de rappeler que c'est au Yémen qu'on a vu apparaître les premières cités dans la péninsule arabique dotées d’un dispositif de défense, d’une architecture moderne et d’une organisation sociale complexe et spécifique. C'est également au Yémen que les premiers barrages ont été édifiés, tel celui de Marib mondialement connu car considéré comme le plus grand de l'Antiquité. C'est encore au Yémen où l'on trouve l'une des densités les plus importantes de sites et de villes classés au patrimoine mondial de l'UNESCO : Sanaa, habitée depuis plus de 2500 ans mais aussi Zabid, Shibam, Hadramawt, Baraqish, Sirwâh ou encore l’île de Socotra connue pour l’extraordinaire beauté de sa faune et sa flore.
Malheureusement, toute cette richesse immatérielle est aujourd'hui menacée tant les destructions depuis plus de trois ans sont nombreuses et répétées. Du musée de Dhamar abritant quelques 12 000 pièces archéologiques à la forteresse médiévale d’Al-Qahira surplombant la ville de Taëz jusqu'au palais de Wadhi Dhar, c'est tout un pan de la civilisation yéménite qui subit une blessure irréparable. Cet anéantissement d'une partie de la mémoire du pays ne doit plus être passé sous silence car porter atteinte, de manière méthodique, aux droits culturels d’un peuple constitue une grave violation des droits de l’homme.
La charte de l’UNESCO ainsi que les conventions internationales appellent à la protection des biens culturels, y compris en cas de conflit armé. Les autorités de Riyad et d’Abu Dhabi, pourtant signataires de ces textes fondamentaux, doivent être rappelées à leurs responsabilités. En ce sens, je souhaite en ma qualité de parlementaire interpeller Audrey Azoulay afin de mettre cette préservation en tête des priorités de l'UNESCO.
Au Yémen comme ailleurs dans le monde, la culture et l'éducation sont des éléments essentiels au rétablissement d'une paix durable. Cette exigence de justice passe nécessairement par un respect des droits de l’homme et un refus de l’impunité. Ces principes, qui sont au cœur des préoccupations de la France en matière de politique étrangère, doivent être rappelés et défendus avec force à l’heure où le Moyen-Orient a plus que besoin d’un retour à la paix et à la stabilité.
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