La Suisse reporte sa décision sur un accord-cadre avec l’UE
Le gouvernement suisse a annoncé vendredi avoir reporté de plusieurs mois sa décision sur un accord-cadre avec l'Union européenne, faisant fi de la date butoir fixée par Bruxelles en décembre.
Depuis plusieurs années, l'UE souhaite conclure un accord-cadre institutionnel avec Berne pour simplifier ses relations avec la Suisse, jusqu'ici réglementées par de multiples accords bilatéraux, mais Bruxelles a accru les pressions depuis un an.
Cet accord prévoit la mise en place d'un «tribunal arbitral» chargé de régler les différends entre les parties, selon le projet publié vendredi par le gouvernement.
«Pour le Conseil fédéral (gouvernement, ndlr) un accord dans le domaine institutionnel revêt une grande importance car il doit nous permettre de garantir à long terme l'accès» au marché de l'UE, a assuré le président suisse Alain Berset lors d'une conférence de presse à Berne.
«Des progrès très importants ont été réalisés, mais (...) il reste encore des divergences sur des points qui sont aussi très importants», a-t-il déclaré.
Aussi, a-t-il annoncé, «nous avons décidé d'ouvrir une phase de consultations pour impliquer les milieux concernés», dont les partis politiques, les cantons et les partenaires sociaux.
Le ministre suisse des Affaires étrangères Ignazio Cassis a précisé que le résultat de la consultation serait discuté «au printemps».
«La Commission européenne respecte le souhait du Conseil fédéral de consulter toutes les parties prenantes», a réagi l'exécutif européen dans un communiqué, demandant une consultation «rapide».
«Le texte publié aujourd'hui est le meilleur résultat possible négocié entre les deux parties», a ajouté Bruxelles, précisant que la Commission évoquerait ces nouveaux développements lors d'une réunion mardi.
Selon le gouvernement suisse, le champ d'application de l'accord-cadre serait limité aux cinq accords d'accès au marché existants (libre circulation des personnes, transports terrestres, transport aérien, obstacles techniques au commerce et agriculture), ainsi qu'aux futurs accords d'accès au marché (par exemple dans le domaine de l'électricité).
Avec cet accord, la Suisse ne serait pas tenu de reprendre automatiquement le droit de l'UE, selon le gouvernement, qui souligne qu'ainsi «le droit de référendum est entièrement respecté».
M. Berset a indiqué avoir annoncé la décision du gouvernement au président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker.
Il y a un an, Bruxelles avait accru la pression sur Berne en limitant à une année la reconnaissance de l'accès mutuel des investisseurs aux bourses suisse et européennes - une mesure essentielle pour la place financière helvétique, avec prolongation possible en cas de progrès suffisants concernant l'accord-cadre.
Mais Berne n'a pas cédé à la pression, malgré la fermeté de Bruxelles, qui envoie par la même un message au secteur financier britannique, amené lui aussi à devoir recourir à un régime d'équivalence après le Brexit.
En Suisse, la majorité des partis politiques sont plutôt favorables à un accord-cadre avec l'UE, mais celui recueillant le plus de suffrages, l'Union démocratique du Centre (UDC, droite populiste), est résolument antieuropéen.
En 1992, les Suisses ont voté «non» à l'entrée de leur pays dans l'Espace Economique européen, qui résulte d'un accord signé par les Etats membres de la Communauté européenne, l'ancêtre de l'Union européenne, et les pays membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE).
Depuis, Berne et Bruxelles ont signé de multiples accords bilatéraux, portant notamment sur la libre-circulation des personnes. Mais leurs relations se sont tendues depuis que les Suisses se sont prononcés en février 2014, au cours d'un référendum, en faveur de l'introduction de quotas annuels de migrants, même pour les ressortissants de l'UE.
Source: agences et rédaction