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MBS en France: les dessous d’une collaboration douteuse

MBS en France: les dessous d’une collaboration douteuse
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Il est âgé de 32 ans et dans un avenir relativement proche, il sera appelé à se hisser à la tête de la pyramide dynastique de la première puissance pétrolière au monde.

MBS en France: les dessous d’une collaboration douteuse

En visite à Paris où il doit avoir des entretiens avec Emmanuel Macron et Edouard Philippe, Mohammed ben Salmane (MBS) continue son tour des capitales occidentales pour asseoir sa stature de chef d’État et raffermir son image de «réformateur».

Il faut dire que le plan destiné à en faire le prochain souverain du royaume wahhabite a été appliqué avec minutie depuis bientôt trois ans. Dès l’accession au trône de son père Salmane en janvier 2015, celui qui n’était alors qu’un prince secondaire de la famille royale s’est vu propulsé du jour au lendemain ministre de la Défense.

Sa première décision d’importance fut de lancer la guerre au Yémen dont on s’aperçoit, trois ans après son déclenchement, à quel point elle relève du fiasco politique, humain et financier pour un royaume qui semble ne plus avoir de boussole stratégique hormis la détestation de l’Iran.

S’emparant des postes à responsabilité dans le domaine économique et financier, Mohammed ben Salmane a ensuite entrepris d’éliminer en deux temps ses rivaux au sein de la dynastie.

D’abord en récupérant le fauteuil hautement convoité de premier prince héritier, non sans avoir démis manu militari son prédécesseur, le prince Mohammed ben Nayef.

Puis, en impulsant une grande purge présentée comme une opération anti-corruption durant laquelle plusieurs dizaines de dignitaires, émirs et hommes d’affaires ont été contraints à la soumission avec au passage la décision de leur extorquer la bagatelle de 100 milliards de dollars.

Un duo à l’origine du pourrissement de crises majeures au Moyen-Orient

Pour faire avaler son coup de force, Mohammed ben Salmane s’est appuyé sur plusieurs acteurs au premier rang desquels la présidence Trump. À ce titre, rappelons que son père l’a bien aidé en offrant un cadeau de plusieurs centaines de milliards de dollars à la nouvelle administration lors du premier déplacement à l’étranger du chef d’État américain à Riyad en mai 2017.

Cette connivence stratégique, virant parfois à l’affairisme douteux entre certains cercles du pouvoir à Riyad et Washington, a été rendue possible par l’entremise du véritable mentor de MBS et homme fort des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed.

Ce dernier, pour qui la lutte contre l’islamisme politique représenté par la mouvance des Frères musulmans vire à l’obsession, a réussi la prouesse de mettre le fougueux prince héritier sous sa tutelle morale.

C’est ce duo, se pensant comme les nouveaux architectes de la géopolitique régionale, qui est en grande partie à l’origine du pourrissement de crises majeures au Moyen-Orient, du blocus du Qatar à la poursuite de la guerre meurtrière au Yémen sans même parler de la déstabilisation du Liban ou du raidissement de l’affrontement diplomatique avec Téhéran.

Il ne faut donc pas être dupe devant l’opération séduction à laquelle se prête MBS à Paris. Ce qu’il est venu chercher au cours de cette visite est surtout un soutien politique et une couverture médiatique vantant sa nouvelle «vision» faite d’émancipation sociétale et de diversification économique.

Étranglement des volontés populaires

Mais, même s’il ne faut pas éluder le caractère réel de certaines réformes salutaires – de l’autorisation de conduire pour les femmes à la marginalisation de la frange la plus réactionnaire de l’establishment religieux – il faut redoubler de vigilance pour ne pas être berné par l’entreprise de détournement souhaitant réduire au silence les critiques, bien légitimes, du durcissement à l’œuvre dans le royaume wahhabite.

Car il ne faut pas oublier que, comme en Égypte et aux Émirats, Riyad enferme par milliers ses opposants même les plus libéraux. Depuis octobre dernier, des dizaines d’intellectuels, oulémas et autres universitaires croupissent en prison du fait de décisions sécuritaires prises arbitrairement.

De même, il faut garder en mémoire que l’Arabie et les Émirats ont été les fers de lance de ce que certains observateurs ont nommé la «contre-révolution», à savoir cette stratégie visant à contrecarrer par tous les moyens le vent de démocratisation qui avait soufflé à partir de décembre 2010 dans le monde arabe, de la Tunisie au Yémen en passant par Bahreïn et l’Égypte.

Cet étranglement des volontés populaires et cette détermination à restaurer un ordre policier soumis à un agenda libéral, anti-iranien et pro-israélienconstituent ce fameux « accord du siècle » contre lequel une grande partie de l’opinion arabe met en garde.

Derrière les réformes de surface, un sourire débonnaire et une intense campagne marketing, il faut donc bien se rendre compte que le nouveau visage de l’Arabie saoudite n’est pas aussi reluisant.

Espérons que le président Macron prenne en considération cet arrière-plan géostratégique et ne soit pas, comme l’ont été ses prédécesseurs, uniquement guidé par la course à la signature d’accords commerciaux.

Source : middleeasteye

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