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De l’inopportunité des déclarations de Samy Gemayel

De l’inopportunité des déclarations de Samy Gemayel
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Soraya Hélou

Quelles que soient les raisons qui ont poussé le député Samy Gemayel à rappeler la collaboration des Kataëbs avec "Israël" au début de la guerre civile, ils tombent on ne peut plus mal dans le moment politique actuel, aussi bien pour les chrétiens que pour le Liban en général et pour le contexte régional. Ce jeune homme qui semblait avoir beaucoup d’atouts pour jouer un rôle

rassembleur chez les chrétiens (il s’était toujours gardé de critiquer le général Michel Aoun au plus fort de la campagne entre ce dernier et le parti) a commis une grave erreur, plus même une faute. D’abord, il semble mal connaître l’histoire de la guerre civile. S’il est vrai qu’il n’était sans doute pas né à l’époque, il a quand même, en tant que futur leader le devoir de s’informer.

Dans les années 75-76, la guerre civile opposait effectivement les kataëb aux forces palestino-progressistes, mais celles-ci avançaient dangereusement vers les régions chrétiennes de l’époque via Dhour Choueir et cheikh Pierre Gemayel et le président Camille Chamoun se sont alors rendus en Syrie pour réclamer son aide militaire afin de contrer la percée des troupes

de Kamal Joumblatt et de Yasser Arafat. Si donc il s’agissait d’un plan pour implanter les Palestiniens et leur donner le Liban en échange, c’est bien l’armée syrienne qui l’a fait échouer à ce moment-là et non les Kataëb aidés par "Israël". La présence des troupes syriennes a été ensuite légalisée par le biais de la création des Forces de Frappe arabe à partir de 1976 et un an 

plus tard, en exécution d’un plan israélien, les Kataëb et plus particulièrement Bachir Gemayel, alors chef d’une troupe d’élite les BG, se sont retournés contre les Syriens car il s’agissait alors de faire passer la visite du président égyptien en "Israël", en 1977 et les accords de Camp David alors en gestation. En d’autres termes, les Israéliens n’ont jamais aidé qui que ce soit pour

combattre l’implantation des Palestiniens, puisque cela a toujours été leur projet pour le Liban, tout comme ils n’ont jamais été contre l’octroi du Liban comme patrie de rechange aux Palestiniens. Ceux qui ont empêché l’implantation, ce sont les Syriens, comme ils ont empêché plus tard la partition de ce pays. Non pas par amour du Liban mais parce que l’intérêt du régime

syrien lui commande de rejet tout projet de partition au Liban et en Irak, ou d’implantation des Palestiniens, car en plus du fait que cela signifierait la liquidation d’une cause nationale arabe, cela pourrait créer des déséquilibres et des tensions confessionnels qui mettraient en cause la stabilité de la région.
N’en déplaise à M.Gemayel, ce sont là des faits historiques et stratégiques qui n’échappent plus à personne, malgré ses tentatives de désinformations, par maladresse ou par action consciente. S’il croit pouvoir en ravivant les instincts confessionnels et anti-syriens des chrétiens, gagner sa fameuse lutte d’influence contre le chef des Forces libanaises Samir Geagea, pour le contrôle de la rue chrétienne, il se trompe fort et il agit sans le moindre sens des responsabilités. Les Kataëbs et les Forces libanaises ont commis une grave faute en s’alliant à "Israël" (qui d’ailleurs les a laissés tomber de la pire des manières pendant la guerre dite de la montagne en 1983-1984, lorsqu’il a vu qu’il pouvait plus compter sur ses réseaux d’agents et sur l’Als, vu

que les parties chrétiennes étaient devenues infréquentables après les massacres de Sabra et Chattila) et ce sont tous les chrétiens qui en ont payé le prix, s’enfonçant dans un projet suicidaire qui a mené aux conflits entre l’armée du général Aoun et les Forces libanaises en 1991.
Aujourd’hui, et après toutes les guerres internes qui se sont terminées par l’accord de Taëf qui a largement affaibli le pouvoir chrétien en le redistribuant sur toutes les communautés, les chrétiens ne sont plus ce qu’ils étaient et le contexte politique n’est plus le même. Pourquoi dans ce cas, revenir sur une période révolue qui n’a que causé du tort à la communauté chrétienne et au Liban en général ? Comment ne pas procéder à une autocritique de cette période et au contraire, la vanter comme s’il s’agissait de l’époque d’or des chrétiens? Les chrétiens sont las de devoir payer le prix des expériences malheureuses de

leaders irresponsables. Ils n’ont plus les moyens de servir de chair à canon pour des guerres stériles et pour de nouvelles aventures suicidaires. D’ailleurs, le choix stratégique du général Michel Aoun a permis à une grande partie d’entre eux, d’adhérer au projet national qui considère "Israël" comme l’ennemi absolu et est solidaire des grandes causes arabes. Mais si une partie d’entre eux  rêve encore de partition, en encourageant l’implantation des Palestiniens, qu’elle garde ses rêves pour elle.

La majorité des chrétiens, elle, a définitivement tourné cette page qui ne lui a apporté que des malheurs.

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