Lettre d’Ali Akbar Salehi publiée par Al-Akhbar : Téhéran est ouvert à tous pour restaurer l’espoir du peuple syrien
Je souffre en observant ce pays, berceau des civilisations, se transformer en scène de carnage. Ce pays, chargé d'histoire, subit une destruction systématique qui n'épargne aucun site religieux, culturel ou archéologique. La plus ancienne cité peuplée du monde, s'est transformée en un fardeau pour ses citoyens, contraints à l'exode massif.
En Syrie, l'odeur du sang prévaut sur l'effluve du jasmin. La mort y est devenue familière, une partie du quotidien.
Est-ce le sort que mérite la Syrie, ce pays d'amour, de tolérance et de coexistence? Je le demande à mes frères musulmans, qui prônent l'opposition, le changement et la réforme : l'effusion de sang causée par des mercenaires professionnels, censés vous être étrangers, vous est-elle convenable?
Vous avez convoqué les forces étrangères, celles de l'hégémonie et du sionisme international à l'«holocauste syrien», pour qu'elles ternissent l'image de l'Islam et de la Syrie, ce pays pluraliste où différentes communautés vivent en harmonie depuis bien longtemps.
Nous sied-t-il, Musulmans et Arabes, de voir enfants, femmes et hommes, égorgés vifs, par manque d'armes pour se prémunir de l'injustice?
Nous convient-il que certains, issus de vos rangs, s'arrogent le droit de s'exprimer au nom de la religion islamique? Qu'ils émettent des fatwas autorisant le meurtre des civils innocents, juste pour ne pas s'être opposés ou pour ne pas avoir brandi leurs armes contre le régime que vous voulez renverser et remplacer?
Sommes-nous vraiment les disciples du grand messager de l'humanité, du dernier prophète envoyé par miséricorde aux humains, au moment où nous observons passifs, le meurtre absurde et la destruction systématique sur le territoire syrien? Ce fait satisfait-il notre prophète (psl) et ses compagnons?
Si Mohammad Ben Abdallah et ses honorables compagnons (psl) étaient parmi nous, auraient-ils admis les meurtres selon l'identité, les carnages et les accusations d'apostasie contre tous ceux qui ne partagent pas l'opinion du meurtrier? Auraient-ils admis les décapitations, le jet des têtes depuis les toits ou leur emplacement sur les lances? Le prophète aurait-il concédé la destruction des lieux de culte, l'exhumation des corps de leurs tombes, comme ce fut le cas de la tombe de l'honorable compagnon Hejer Ben Oudaï, que Dieu le bénisse, sachant que les musulmans sont unanimes quant à sa piété et sa moralité?
Où en êtes-vous du respect de la dignité des compagnons du prophète, que Dieu les bénissent, lorsque vous la violez, ces jours-ci, par vos actes criminels? Des actes qui éprouvent le cœur de notre grand prophète, et rebutent les musulmans. L'opinion de ces derniers, n'a-t-elle pas été unanime autour de la nature ignoble et proscrite de tels actes?
Est-ce la Sunna de Mohammad Ben Abdallah, que Dieu le bénisse, à laquelle nous sommes fiers d'appartenir?
Et puis, croyez-vous vraiment qu'un régime né des décombres, de la destruction et de la violation des dignités par les armes, les mortiers, les explosifs et le bombardement aveugle, pourra-t-il survivre même par le soutien étranger?
L'intervention flagrante et hideuse de l'entité sioniste dans sa dernière agression en Syrie ne suffit-elle pas pour réveiller ceux qui s'entêtent à verser le sang syrien? Pour démasquer l'objectif du conflit dans ce pays : ébranler sa dignité et sa souveraineté?
Est-ce vraiment la récompense de la Syrie, de cet Etat résistant qui avait appuyé ses frères tout au long de son histoire, dont nos frères palestiniens et leur ville sainte al-Qods?
Nous convient-il de croiser les bras devant la crise de la Syrie, ce pays fort dans l'équation régionale? Pouvons-nous abandonner la Syrie, en proie aux forces sionistes et à l'arrogance mondiale? Pour que ces forces la ravagent en riposte à sa lutte durant les dernières décennies? Ou pour qu'ils brisent son orgueil et celui de la Nation?
Le devoir incombe-t-il de permettre aux forces du mal et des ténèbres de porter atteinte à sa dignité, assistées par des forces régionales, en pleine ignorance de l'intérêt de leur Nation ? Ou de se taire devant l'action des fers de lance sur la scène intérieure, dont ceux qui participent au complot, par ignorance ou par connaissance de cause, afin de saper le rôle de leur propre pays?
Quelqu'un de vous se rappelle-t-il encore comment était la situation avant l'Eveil islamique? Et comment les forces de l'hégémonie occidentale dirigeaient la région dans l'impunité? Comment les régimes subalternes de l'arrogance internationale rampaient lâchement devant le colonisateur, lui assurant les fonds aux dépends des peuples?
Puis vint l'Éveil islamique. Suivi par les révolutions des peuples en faveur de la liberté et de la dignité, défiant l'hégémonie et le suivisme. L'ennemi sioniste fut relégué à son état normal : ennemi de toute la Nation islamique.
Des révolutions qui ont plongé l'occident colonisateur dans la confusion. Il a œuvré en premier lieu à les contenir, puis à dévier leur parcours avant de décider la nature de la riposte : Une agression contre la Syrie, l'Etat, le site géostratégique et le rôle. Un complot en réponse à la révolution. Destruction de la Syrie résistante en réponse au renversement des régimes de la servilité, par les peuples.
On pourrait comprendre la confusion de certains au début de la crise, en supposant les bonnes intentions. Mais aujourd'hui, y a-t-il un homme qui doute encore que ce qui se déroule en Syrie n'est qu'une guerre par procuration? Des mercenaires qui détruisent la Syrie au nom des forces de l'hégémonie internationale et un Etat en pleine bataille pour défendre le pays, l'axe et la culture de la résistance?
Celui qui aspire à la liberté et à la démocratie, ne torpille pas les infrastructures de bases : les installations pétrolières et gazières, les hôpitaux, les écoles et les universités, les usines, le secteur agricole, notamment la production du coton et du blé...Ils détruisent durant des mois ce qui nécessite des ans et des décennies pour être construit. Il est inconcevable qu'un homme incendie son pays pour allumer une cigarette. Les bonnes intentions dans ce contexte ne sont plus convaincantes.
La position de la République islamique était claire, depuis le premier jour. Nous avions répété à plusieurs reprises : Nous sommes en faveur des revendications justes du peuple syrien. Mais nous refusons toute forme de violence ou d'intervention étrangère. De surcroit, nous avons affirmé et nous le faisons toujours : toux ceux qui posent des conditions préalables au dialogue global entre le régime et l'opposition, oeuvrent pour tuer la solution dans l'œuf. Leurs conditions ne peuvent être interprétées que comme une tentative d'entraver la sortie de la crise, dans le but de contaminer les pays du voisinage et de menacer la sécurité de toute la région.
À mon avis, une personne ou une partie qui agit de telle, tient à réaliser les objectifs de forces étrangères, consciemment ou par niaiserie.
Sur ce, je n'estime pas qu'il y ait de solution en Syrie ou une possibilité de préserver le droit du peuple syrien à déterminer son sort, à choisir son régime et son président, en l'absence d'un processus politique électoral transparent et intègre. (Et Allah a renvoyé, avec leur rage, les infidèles sans qu'ils n'aient obtenu aucun bien, et Allah a épargné aux croyants le combat. Allah est Fort et Puissant). Le peuple syrien peut, seul, décider de la nature de son régime ou du nom de son président. Pour régler la situation en ce pays, il faut penser de cette manière.
En tant que ministre des Affaires Etrangères de la République Islamique, je souhaite que les organisations régionales et les influents dans la région, s'emploient à faire cesser la tension en crescendo laquelle empêche le règlement politique de la crise. J'espère de même, que ceux qui incitent ou contribuent à l'envoi des armes aux terroristes et mercenaires en Syrie, cessent leur action.
Sans doute, ils connaissent désormais que les groupes armés en Syrie sont dépourvus de principes et de valeurs. Des groupes irresponsables motivés par des intérêts personnels étroits. Ils connaissent de même que le danger de l'extrémisme et du déploiement des armes de cette manière, ne menace pas seulement la sécurité de la région, mais aussi son entité. Celui qui mène le jeu en Syrie, réalise surement qu'il s'expose au même jeu. L'expérience afghane n'est pas encore oubliée.
Au lieu d'envoyer les armes et les combattants en Syrie, n'était-il pas meilleur d'envoyer les aides humanitaires à ce peuple qui souffre le martyre ?
C'est ce qu'ont fait l'Iran et tous les véritables amis du peuple syrien.
Franchement, je commence à douter des bonnes intentions de plusieurs acteurs sur la scène syrienne, notamment de celles des forces internationales qui prétendent sauvegarder la sécurité et la stabilité du peuple syrien. Je doute aussi des intentions des forces régionales qui déclarent une position et agissent contrairement sur le terrain.
Quelqu'un doit nous expliquer pourquoi ceux qui s'emploient à défendre la démocratie et les droits de l'homme en Syrie, contrecarrent la promotion de ces droits ailleurs, ou se taisent sur leur violation ?
La République islamique, qui a fait de son mieux pour convaincre et encourager toutes les parties du conflit au dialogue, dans des efforts publics ou confidentiels, est prête à poursuivre ses efforts. Nous avons effectué des pourparlers avec les différentes factions politiques syriennes. Nous avons annoncé que les portes de Téhéran sont ouvertes à tous pour tenter d'aplanir les obstacles devant un dialogue national tenu à Damas à la base du verset du Coran : (Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c'est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s'égare de Son sentier et c'est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés).
Nous avons proposé une solution à toutes les parties locales et régionales. Nous avons annoncé notre appui préalable à toute initiative de règlement politique, quel que serait son origine. Le régime a fait preuve de flexibilité à cet égard. Sa réponse à nos efforts était positive. Tout comme certaines factions de l'opposition. Ma question est adressée aux restants : pourquoi n'accordez-vous pas d'importance à cette initiative et ne la traitez-vous pas avec plus de sérieux ?
J'annonce à ce propos, la disposition de l'Iran à faire réussir toute initiative équitable et juste, qui garantisse les intérêts du peuple syrien et rétablisse la stabilité dans ce pays. (Et s'ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Allah, car c'est Lui l'Audient, l'Omniscient...).
En outre, j'appelle toutes les personnalités ou institutions opérant dans le domaine de la formation de l'opinion publique, notamment les élites universitaires influentes, à démasquer les complots visant à semer la discorde dans la Nation islamique, afin de la diviser et de détruire ses forces dans des guerres d'usure.
Je suis absolument convaincu que la Syrie est à l'heure actuelle un terrain d'essai. C'est un examen à tous ceux qui ont contribué à l'effusion de sang et à la discorde sur la terre syrienne. Un examen pour ceux qui ont contribué à la destruction de ce pays. À tous ceux qui ont croisé les bras devant le spectacle macabre, sans réaction aucune. Ceux-là doivent être sûrs que le verdict de l'histoire sera dur. L'histoire ne sera indulgente avec quiconque.
J'appelle le peuple syrien frère à la patience. Dieu est avec ceux qui endurent patiemment. Je souhaite du fond du cœur que la Syrie recouvre sa gloire et sa grandeur, qu'elle reprenne le parcours du développement, pour le bien de son peuple et son bien-être.
Malheureusement, un grand potentiel est gaspillé dans la destruction massive de ce cher pays, au lieu qu'il ne soit exploité en faveur de la Palestine, icône des Arabes et des Musulmans, leur ultime cause, voire celle des libres du monde entier.
Mettons la main dans la main, conjuguons nos efforts en ce moment délicat de l'histoire du monde, afin de cesser l'effusion de sang en Syrie.
Je profite de cette opportunité pour déclarer au monde entier, notamment à l'opinion publique arabe et syrienne, de toute appartenance politique ou confessionnelle, que la République Islamique est ouverte à tous. Elle est attentive à tout propos constructif et aux bonnes intentions. Ses portes sont largement ouvertes pour accueillir tous les efforts, sans réserve aucune, dans le but de cesser de la destruction de la Syrie, Etat, patrie, peuple et société. Et ce, afin de relancer le cycle de la vie dans ce pays rayonnant de civilisation, gloire des Arabes et des musulmans, abri de tous les libres du monde. C'est ce qu'était la Syrie avant qu'elle ne soit infiltrée par toux ceux qui détestent la lumière.
Restituons à la Syrie l'amour, la lumière qui éclaire son front haut, l'éclat de ses collines, de ses vallées, ses villes et ses montagnes alpestres. Pour qu'elle jouisse de la lumière de Dieu, si Dieu le veule (Celui qu'Allah prive de lumière n'a aucune lumière).»
Source : Al-Akhbar, traduit par : moqawama.org