A Los Angeles, le réalisateur a été humilié de la même manière qu’aux check-points israéliens.
Nada Ahmad
Emad Burnat a été nommé dans la catégorie du meilleur long métrage documentaire pour son film "5 caméras brisées", qu'il a réalisé sur une période de cinq ans dans son village palestinien de Bil'in. Il a voyagé aux Etats-Unis pour assister aux cérémonies. A l’aéroport, les officiers de l'immigration étaient incapables de comprendre comment un Palestinien pouvait être nommé aux Oscars.
Un palestinien nommé aux Oscars, une menace à la sécurité nationale ?
Emad Burnat est arrivé mardi 19 février à Los Angeles avec sa femme et son fils de huit ans. Dès leur arrivée, les services de l'immigration les placent dans une grande pièce avec d'autres étrangers et interrogent le réalisateur pendant une heure. "Les douaniers voulaient la preuve que j'étais nommé aux Oscars et ils m'ont dit que si je ne pouvais pas justifier mon voyage, nous serions ma famille et moi renvoyés en Turquie le jour même, a expliqué Emad Burnat. Je suis le premier Palestinien à être nommé aux Oscars pour un documentaire", a-t-il souligné.
"Le fait de retenir une personne nommée aux Oscars et de l'interroger, c'est anormal", a réagi le réalisateur, qui dit avoir ressenti la même suspicion qu'aux check-points israéliens. "Les Palestiniens vivent cela de façon quotidienne en Cisjordanie", insiste-t-il. "J'ai ressenti la même chose lorsque j'ai été interrogé à Los Angeles parce que je suis palestinien, j'ai un passeport palestinien, donc il n'y a pas de respect pour moi et pour mon passeport", a-t-il déclaré. Le réalisateur Michael Moore est intervenu personnellement pour l’aider. Ainsi, Emad Burnat et sa famille ont pu rejoindre Los Angeles. Dimanche le 24 février, Le réalisateur palestinien a marché sur le tapis à la 85ème cérémonie des Oscars à Los Angeles.
Selon Michael Moore, le film réalisé par Emad est exceptionnel, primé, qui montre comment le village d’Emad en Cisjordanie utilise la non-violence pour s’opposer à la décision du gouvernement israélien de construire un mur en plein sur leurs cultures et leur village. "Il suffit de voir, et de filmer sur caméra, les soldats israéliens tirant sur des civils palestiniens sans arme", souligne M. Moore dans un article publié sur son blog personnel.
"Cinq caméras brisées", une histoire palestinienne
Le jour où les bulldozers partent à l'assaut des oliviers et que les habitants affluent pour s'interposer, Emad, un paysan de 39 ans, empoigne le Caméscope qu'il venait d'acheter pour la naissance de son quatrième fils, Jibril. Il se met à tourner. Quand l'armée riposte en noyant le village dans un nuage de lacrymogène, il filme. Quand les soldats matraquent ses amis, il filme aussi. Quand ses frères sont arrêtés l'un après l'autre, il filme toujours. Même quand sa caméra arrête une balle qui aurait dû l'atteindre à la tête, il ne renonce pas. Quand les autorités sionistes ont décidé de s’emparer illégitimement des terres de son village, il filme. Bil'in s'est engagé à manifester chaque vendredi, pacifiquement, à la sortie de la mosquée, aussi longtemps qu'il le faudra pour regagner ses droits. Emad et ses disques durs seront la mémoire vidéo de ce combat. Il a été blessé à plusieurs reprises durant le tournage et a perdu cinq caméras dans cette aventure, toutes fracassées par des soldats ou des colons israéliens. "Je filme pour guérir", dit-il sur le ton doux-amer qui imprègne tout son film.
Source : moqawama.org