États-Unis : Vote historique de défiance contre le ministre de la Justice
Le ministre américain de la Justice Eric Holder, a été désavoué jeudi par un vote de défiance de la Chambre des représentants.
Par 255 voix contre 67, l'Assemblée, dominée par les républicains, a adopté une résolution l'accusant d'«outrage au Congrès» dans l'enquête sur un trafic d'armes au Mexique.
Eric Holder, avec l'appui de Barack Obama, avait refusé de fournir un certain nombre de documents relatifs à une opération des services américains de lutte contre la contrebande qui avait tourné au fiasco en 2009.
Des dizaines de démocrates ont refusé de participer à ce scrutin, inédit dans l'histoire des États-Unis, qui, selon eux, « vise essentiellement à discréditer Barack Obama à quelques mois de la présidentielle ».
La Maison-Blanche a d'ailleurs aussitôt condamné un «coup politique évident».
«Ce vote peut être un excellent théâtre politique dans l'esprit de certains mais il cause du tort aux Américains. Ils attendent et méritent mieux», a déclaré jeudi Eric Holder.
Pour sa défense, le ministre a affirmé «avoir agi» et «ordonné une enquête indépendante» dès que l'opération ratée, baptisée «Fast and Furious», a été connue.
«En tant que ministre de la Justice, je ne recherche pas ce qui est politiquement opportun (...) », s'est-il expliqué.
Pour remonter ces filières, les enquêteurs imaginent un procédé simple, mais osé: faire passer eux-mêmes 2000 armes en contrebande, pour suivre leur parcours à la trace. Ensuite, les armes se perdent dans la nature.
Pour faire la lumière sur les responsabilités dans cet échec, les parlementaires de la Chambre des représentants lancent alors une enquête en février 2011. La Chambre chargée de superviser les activités du gouvernement demande à Eric Holder de coopérer aux investigations. Celui-ci remet bien aux parlementaires 7600 documents concernant l'opération, mais rechigne à en dévoiler certains autres.
Pour l'heure, le vote de la Chambre ouvre la voie à une possible action judiciaire. C'est désormais le procureur de Washington, employé du ministère de la Justice,qui sera amené à décider s'il inculpe ou non son propre patron.
Cette histoire tombe mal pour l'actuel président en pleine campagne électorale.
Source : Agences
L'affaire «Fast and Furious», c'est d'abord celle d'un fiasco policier retentissant. En 2009, l'Agence fédérale de lutte contre le trafic d'armes monte une opération visant à piéger les cartels mexicains qui s'adonnent au trafic d'armes aux frontières américaines.
De plus, selon un rapport parlementaire qui révèle le fiasco, au moins 122 de ces armes seront utilisées pour perpétrer des crimes au Mexique. Encore plus choquant pour l'opinion américaine: deux d'entre elles seront retrouvées sur la scène du meurtre d'un garde-frontière américain, en Arizona.
La Chambre pourrait aussi voter une deuxième résolution qui lui permettrait d'aller directement au tribunal pour contraindre le ministre à se plier aux exigences de l'enquête.
Pour justifier la position de son ministre, le président américain avait pourtant invoqué «le privilège de l'exécutif». Un procédé qui lui permet de s'opposer aux demandes du Parlement pour protéger des secrets liés à la sécurité du pays mais aussi un dispositif auquel le président démocrate s'était opposé tout au long de sa carrière de sénateur.