Alger veut «toute la lumière» sur les disparus de la guerre d’indépendance
Par AlAhed avec AFP
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a réclamé vendredi «toute la lumière» sur les disparus pendant la guerre d'indépendance (1954-1962) et l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français dans les années 1960.
«L'effort se poursuit pour mettre toute la lumière sur le sort des disparus durant notre guerre de libération et pour l'indemnisation des victimes des essais nucléaires», a écrit Abdelmadjid Tebboune, vendredi 19 mars, dans un message à l'occasion de la fête de la Victoire.
Cette date marque l'anniversaire du cessez-le-feu le 19 mars 1962 après une guerre d'indépendance de près de huit ans avec la France.
Ces évènements «ne s'effacent pas de l'histoire des nations par prescription», a averti le président algérien à propos des dossiers mémoriels.
À l'approche du 60e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie (5 juillet 1962), le président français Emmanuel Macron a engagé ces derniers mois une série d'«actes symboliques» afin de «réconcilier les mémoires» entre Français et Algériens.
En juillet dernier, la France a remis à Alger 24 crânes de combattants nationalistes tués au début de la colonisation au 19e siècle, qui étaient entreposés à Paris.
En outre, Emmanuel Macron a récemment reconnu «au nom de la France», que l'avocat et dirigeant nationaliste Ali Boumendjel avait été «torturé et assassiné» par l'armée française pendant la Bataille d'Alger en 1957. Un assassinat maquillé à l'époque en suicide.
Enfin, le président français a décidé de faciliter l'accès aux archives classifiées de plus de 50 ans, notamment celles sur la guerre d'Algérie, sans la moindre réciprocité jusqu'à présent côté algérien.
«Signes positifs»
Dans son message, le chef de l'État algérien a salué «les pas importants franchis et des signes positifs, à la faveur notamment de la récupération des Archives et des crânes symboles de la Résistance populaire».
«Notre attachement à la préservation de notre Histoire et de notre mémoire demeurera au cœur de nos priorités», a-t-il promis, en soulignant «la responsabilité de l'État dans la prise en charge de ce dossier, avec tout le sérieux et l'assiduité qui s'imposent».
Les gestes d'Emmanuel Macron font partie des recommandations de l'historien Benjamin Stora dans un rapport qu'il a remis en janvier au président français dans le but de «réconcilier les mémoires» et de «regarder l'Histoire en face».
Mais lors d'un colloque vendredi, le directeur général des Archives nationales algériennes Abdelmadjid Chikhi – l'alter ego de Benjamin Stora à Alger – a appelé les chercheurs et les historiens à «s'éloigner de l'école française dans la recherche historique en adoptant une véritable approche d'analyse permettant de lever le voile sur toutes les vérités», selon l'agence officielle APS.
Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune se sont engagés à travailler ensemble sur la question mémorielle.
Parmi les dossiers que les autorités algériennes veulent remettre sur la table figurent la question des «disparus» pendant la guerre d'indépendance – plus de 2 200, selon Alger – et celui des essais nucléaires français dans le Sahara algérien.
Des Européens ont également été portés disparus pendant le conflit.
Dans l'édition de février de l'influente revue du ministère de la Défense, El Djeich, un haut cadre militaire algérien a fait savoir que la remise par la France des cartes pour la localisation des «restes nucléaires» est «un droit que l'État algérien revendique fortement, sans oublier la question de l'indemnisation des victimes algériennes des essais».
La France, qui a colonisé l'Algérie de 1830 à 1962, a procédé au total à 17 essais nucléaires au Sahara algérien entre 1960 et 1966, sur les sites de Reggane puis d'In Ekker.
Onze d'entre eux, tous souterrains, sont postérieurs aux accords d'Évian de 1962, qui actaient l'indépendance de l'Algérie mais une clause permettait à la France d'utiliser jusqu'en 1967 les sites du Sahara.