Violences policières: de nouvelles images attisent la controverse en France
Par AlAhed avec AFP
Gauche, écologistes et majorité ont condamné jeudi le passage à tabac par des policiers d'un producteur noir à Paris qui, après d'autres violences policières présumées, ont attisé la controverse autour de l'article 24 de la loi «Sécurité globale» sur la diffusion de l'image des forces de l'ordre.
Après avoir été reçu dans l'après-midi par Emmanuel Macron, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a demandé la révocation des policiers mis en cause dans ces violences, documentées par une vidéo largement diffusée sur les réseaux sociaux, qui intervient après l'évacuation musclée d'un camp de migrants.
Les images publiées par le site Loopsider montrent un homme qui subit une volée de coups assénés par des policiers samedi dans l'entrée d'un studio de musique du XVIIe arrondissement de Paris.
Jean-Luc Mélenchon y a vu la «preuve terrible du caractère vital du droit à filmer l'action policière», qualifiant les policiers de «milice barbare» et réclamant la démission du préfet de police de Paris.
Le chef de file des Insoumis faisait référence à l'article 24 de la proposition de loi «Sécurité globale», qui pénalise la diffusion malveillante de l'image des forces de l'ordre.
Le texte, qui a été adopté par l'Assemblée mardi et doit être encore examiné par le Sénat, a cristallisé ces derniers jours passions et antagonismes.
Plébiscité par les syndicats policiers, soutenu par la droite et l'extrême droite, l'article 24 suscite une levée de boucliers à gauche et chez les défenseurs des libertés publiques qui y voient «une atteinte disproportionnée» à la liberté d'informer et le signe d'une dérive autoritaire de la Macronie.
Le Premier ministre Jean Castex a annoncé jeudi la création d'une «commission indépendante chargée de proposer une nouvelle écriture» de l'article, une initiative qui a provoqué «l'étonnement» de Christophe Castaner, patron des députés LREM, soucieux de défendre le travail parlementaire. Et dénoncée comme une «opération de communication» par la coordination #StopLoiSécuritéGlobale.
Boycott
L'annonce est intervenue à l'issue de sa réunion avec des éditeurs de presse et Reporters sans frontières, boycottée cependant par les syndicats de journalistes et les sociétés de journalistes, furieux que la préfecture interdise une «marche des libertés» samedi à Paris. Un rassemblement sera toutefois autorisé.
M. Darmanin doit pour sa part être entendu lundi par la commission des Lois de l'Assemblée sur de récentes violences, comme l'évacuation sans ménagement d'un camp de migrants lundi soir.
Alors que le producteur de musique dit avoir été traité de «sale nègre», le premier secrétaire du PS Olivier Faure a jugé qu'il était «temps d'accepter de traiter le sujet du racisme dans la police, de retirer l'article 24 de la loi +Sécurité globale+, de rendre l'IGPN absolument indépendante».
«L'État de droit n'est pas négociable», a tweeté la maire PS de Paris Anne Hidalgo, «profondément choquée par cet acte intolérable».
Le patron d'EELV Julien Bayou a souligné que «sans les vidéos, rien ne serait sorti».
«Pas d'image sur les réseaux, pas d'émoi public, pas d'embarras du pouvoir, pas de réaction du ministre, pas de sanction des policiers violents et racistes. Pas de justice. Pas de démocratie», a résumé l'eurodéputé de Place Publique, Raphaël Glucksmann.
Le secrétaire national du PCF Fabien Roussel a appelé à se joindre aux manifestations de samedi pour le retrait de l'article 24.
«Fondamentaux»
Côté majorité, le chef de file des députés LREM Christophe Castaner, accusé d'avoir réprimé violemment des manifestations de «gilets jaunes» quand il était place Beauvau, a estimé qu'à «travers l'agression insoutenable de Michel (...) c'est notre humanité qui est atteinte», et demandé une «tolérance zéro contre le racisme et contre cette violence».
Le président LREM de l'Assemblée, Richard Ferrand a mis en garde contre un «usage» de la force qui «sape le lien de confiance indispensable entre les citoyens et ceux qui nous protègent et doit être sanctionné sans faiblesse».
«Il est temps que le préfet de police fasse en sorte que ceux qui font respecter la loi la respectent eux-mêmes», a tancé un proche d'Emmanuel Macron, l'eurodéputé Stéphane Séjourné.
A droite, les réactions étaient plus rares. Sollicité par l'AFP, le numéro 3 de LR Aurélien Pradié, qui refuse «l'injonction à choisir son camp», juge les images «indignes, insupportables quand on est attaché aux fondamentaux républicains». Il fait partie des quatre députés LR à s'être abstenu sur le texte, voté par le reste du groupe.
Représentant de l'aile souverainiste du parti, le député Julien Aubert a jugé ces violences «inexcusables».