noscript

Please Wait...

ramadan2024

«C’est la première fois que j’ai faim»: les nouveaux pauvres du Covid

«C’est la première fois que j’ai faim»: les nouveaux pauvres du Covid
folder_openFrance access_time depuis 3 années
starAJOUTER AUX FAVORIS

Par AlAhed avec AFP

«Jamais de ma vie je pensais venir au Secours populaire», raconte Nadine, 62 ans, en remuant son café dans la cuisine du local de l'association à Saint-Gaudens (Haute-Garonne). Comme elle, de nombreux Français ont basculé dans la pauvreté à cause de la crise sanitaire.

La France comptait 9,3 millions de pauvres en 2018, selon les derniers chiffres officiels, et ils pourraient être un million supplémentaire du fait de la crise, ont avancé certaines associations.

Rien qu'à Saint-Gaudens, sous-préfecture de 11.500 habitants aux portes des Pyrénées, le Secours populaire gérait 124 personnes avant le premier confinement: ils sont aujourd'hui 257 à bénéficier de l'aide du centre, affirme Léa Georget, la responsable de l'antenne locale.

Parmi les nouveaux profils, des personnes déjà précaires, des travailleurs pauvres et des intérimaires, mais aussi des personnes qui ont toujours été autonomes financièrement, précipitées dans la pauvreté après les confinements successifs.

Nadine Fernandez est arrivée des Bouches-du-Rhône, avec sa famille, à Saint-Gaudens en 2017. Son mari et son fils ont repris une petite station-essence et un local pour la réparation mécanique. L'entreprise ne fonctionnait pas très bien mais ils arrivaient à en vivre, jusqu'au premier confinement.

«Ils ont été obligés de fermer. Plus de clients. Les charges qui se sont accumulées évidemment, qu'ils ne pouvaient plus payer. Actuellement ils sont en liquidation judiciaire», regrette la sexagénaire aux imposantes lunettes.

Sa fille Emmanuelle, 27 ans, étudie à Toulouse, où elle avait une chambre en résidence universitaire. Cette jeune diplômée avait trouvé un emploi mais elle a été licenciée au second confinement, l'obligeant à revenir chez sa famille.

«Première fois que j'ai faim»

Aujourd'hui, 40 % des ménages précaires sont dans l'incapacité de couvrir leurs dépenses alimentaires, selon le rapport annuel du Secours catholique. C'est le cas de Marlène, 42 ans, qui, elle aussi, a bénéficié de l'aide du Secours populaire pour la première fois.

«Avant cette année, je vivais très bien. C'est la première fois de ma vie que j'ai faim, c'est fort quand même en France en 2020», soupire Marlène Renard, qui n'avait pas été au chômage depuis près de quinze ans.

Cette quadragénaire, qui vit à 10 km de Villefranche-de-Rouergue (Aveyron), est en pleine reconversion. Alors qu'elle passait son examen pour obtenir un diplôme d'accompagnant éducatif et social, le premier confinement a tout bousculé: une embauche qui n'aura jamais lieu, un contrat dans un Ehpad reporté sine die.

«Je n'avais pas de quoi payer mon essence. Mon assistante sociale m'a demandé comment je mangeais, je lui ai répondu que j'avais mes deux poules et que je faisais mon propre pain. Elle m'a donné un bon pour le Secours populaire jusqu'à fin novembre», se rappelle-t-elle.

«La journée, on ne chauffe pas»

Selon le dernier baromètre annuel Ipsos/Secours populaire, un Français sur quatre restreint les quantités dans son assiette et un sur sept saute des repas (14 %). C'est le cas de Soufiane Jaouad, un intérimaire de 29 ans.

«Ce matin j'ai pu prendre un petit déjeuner, normalement je n'en prends plus. A un moment, j'étais à quatre repas par semaine», explique-t-il devant le centre d'accueil du Secours catholique d'Arnaud-Bernard, à Toulouse.

«Je suis en fin de droit à Pôle Emploi. Je n'ai pas encore été indemnisé ce mois-ci. D'ici quelques jours le paiement va arriver. Je vais juste payer mes factures. Les dépenses ont augmenté», regrette-t-il, casquette gavroche vissée sur le front.

Si les nouveaux précaires bénéficient parfois de l'aide des associations pour l'alimentation, ils restent obligés de se serrer la ceinture pour d'autres dépenses. A Saint-Gaudens, Nadine et son mari ont fait une demande de RSA, 700 euros à deux, pas assez pour vivre correctement.

«Vous avez vu le prix du fioul ? On fait gaffe, la journée on ne chauffe pas. On chauffe un peu le soir avant d'aller à la douche et un peu le matin. Sinon on éteint tout», déplore Nadine.

«Mon fils a 25 ans. Lui aussi a fait une demande de RSA. On lui a dit qu'il rebondirait, il est jeune, il passera à autre chose», tempère-t-elle, persuadée que tout finira par s'arranger.

Comments

//