Royaume-Uni: l’opposition travailliste désigne son nouveau chef après Corbyn
Par AlAhed avec AFP
Affaibli et divisé, le Parti travailliste britannique doit désigner samedi son nouveau chef pour succéder au très à gauche Jeremy Corbyn, avec pour défi de remettre la principale formation d'opposition sur les rails en pleine crise du coronavirus.
Maintien à gauche toute ou coup de barre vers le centre? Les quelque 600.000 membres du Labour étaient appelés à choisir par courrier ou en ligne entre les trois candidats en lice, après le cinglant revers subi par Jeremy Corbyn aux législatives de décembre face au Premier ministre conservateur Boris Johnson.
Centriste et europhile, Keir Starmer, ancien avocat de 57 ans spécialisé dans la défense des droits de l'homme et responsable depuis trois ans du Brexit au sein du parti, fait figure de grand favori.
Sa rivale Rebecca Long-Bailey, 40 ans, chargée des sujets liés aux entreprises dans la formation, est considérée comme l'héritière naturelle de Jeremy Corbyn.
Troisième candidate, Lisa Nandy, 40 ans également, a reçu le soutien du syndicat GMB qui représente 500.000 travailleurs et voit en elle «une bouffée d'air frais dans le débat sur l'avenir du Labour».
En raison de la pandémie de coronavirus, le nom du vainqueur ne sera pas annoncé comme prévu au cours d'une conférence spéciale mais plus modestement sur le site internet du parti, les candidats ayant enregistré à l'avance leurs discours en cas de victoire.
Difficile réunification
Perçu comme habile mais peu charismatique, Keir Starmer s'est engagé à remettre sur pied et à réunifier le Labour après sa pire défaite aux législatives depuis 1935, en raison notamment de la perte de bastions populaires traditionnellement acquis aux travaillistes.
Il s'agissait de la seconde défaite électorale pour Jeremy Corbyn depuis son élection surprise à la tête du Labour en 2015 grâce au soutien massif de la base.
«Nous avons la chance de pouvoir reconstruire notre parti et, plus important encore, la chance de remettre le Labour où il doit être, c'est-à-dire au pouvoir», a dit M. Starmer à ses partisans jeudi lors d'une vidéoconférence. Les prochaines élections législatives sont prévues en 2024.
La réunification s'annonce toutefois ardue tant les divisions sont nombreuses et profondes: sur la ligne radicale ou plus libérale que doit adopter le Labour, mais aussi entre eurosceptiques et pro-UE sur la question du Brexit.
«Il y a vraiment beaucoup de ressentiment et de méfiance», explique Steven Fielding, expert politique à l'université de Nottingham, à l'AFP. «Le premier défi (du nouveau chef) sera de mettre une équipe en place qui apparaîtra au moins comme ayant la capacité d'unifier le parti».
Le défi du coronavirus
Mais la pandémie de nouveau coronavirus, qui profite à la popularité du gouvernement, représente un défi bien plus immédiat.
Le gouvernement de Boris Johnson a décrété un confinement général de la population afin de tenter de freiner la propagation du virus, avec le soutien des travaillistes.
Les conservateurs ont également déployé des mesures de soutien économique et sociales sans précédent pour les travailleurs et les entreprises touchés de plein fouet, qui sont habituellement l'apanage du Labour, devenu peu audible.
Depuis, la popularité du Premier ministre s'est envolée. Selon un récent sondage YouGov, 55% des sondés ont une opinion favorable du chef de gouvernement, contre 43% une semaine plus tôt. Et parmi les 72% estimant que le gouvernement gère la crise correctement figurent de nombreux électeurs du Parti travailliste.
Le Labour a toutefois tenté d'appuyer sur le talon d'Achille de l'exécutif en relayant les critiques sur l'insuffisance du nombre de tests déployés pour dépister le Covid-19 et le manque de matériel de protection pour les soignants.
«Mon instinct est d'être constructif mais de poser les questions difficiles», a indiqué Keir Starmer dans un podcast du journal The Guardian cette semaine.