Otan: Emmanuel Macron subit les foudres des alliés
Par AlAhed avec AFP
Le diagnostic alarmiste d'Emmanuel Macron sur l'Otan, en état de «mort cérébrale», a déclenché la fureur des alliés et son ministre Jean-Yves le Drian va devoir apaiser les esprits mercredi à Bruxelles pour lui éviter d'être en position d'accusé lors du sommet de l'Alliance début décembre.
Les commentaires sont très négatifs et l'Allemagne a ouvertement pris ses distances. Annegret Kramp-Karrenbauer, la ministre allemande de la Défense et patronne de la CDU, a ouvertement accusé le chef de l'Etat français de vouloir remplacer l'Otan et le secrétaire général de l'Alliance Jens Stoltenberg a mis en garde contre un tel dessein.
«Nous devons renforcer l'Alliance, pas l'affaiblir», a-t-il averti mardi à la veille d'une réunion des ministres des affaires étrangères des 29 pays de l'Otan à Bruxelles.
«L'Union européenne ne peut pas remplacer l'Otan. La sécurité de l'Europe dépend du lien transatlantique. Si on éloigne les Etats-Unis de l'Otan, on divise l'Union européenne et on l'affaiblit», a-t-il mis en garde.
«Il est dans l'intérêt national de chaque pays de faire partie d'une alliance forte», a-t-il ajouté.
Paris est isolé. «Macron n'a trouvé aucun écho au sein de l'Otan pour ses virulentes critiques», a confié le représentant d'un pays proche de la France. Aucun soutien non plus pour son appel à reconsidérer la relation avec la Russie.
Message mal compris
«Emmanuel Macron a contraint l'Allemagne à se positionner et pour Berlin, l'Otan reste l'avenir pour la défense de l'Europe», souligne l'expert allemand Ulrich Speck, collaborateur du German Marshall Fund.
«La plupart des Etats de l'Est de l'Europe veulent garder les Etats-Unis dans le jeu pour tenir la Russie à distance et montrent peu d'intérêt pour la guerre contre le terrorisme menée au Sud par la France», affirme-t-il.
Mais le mécontentement de la France, un des trois pays de l'Alliance doté de l'arme nucléaire et de capacités opérationnelles, ne peut pas être ignoré.
«Je me rends à Paris la semaine prochaine pour discuter avec le président Macron afin de mieux comprendre son message et les raisons qui sont derrière» ses critiques, a annoncé Jens Stoltenberg.
«Lorsque nous avons des divergences, le mieux est d'en parler», a-t-il souligné.
Le chef de l'Etat français a jugé l'Otan en état de «mort cérébrale» après avoir dénoncé l'absence de coordination entre les Etats-Unis et leurs alliés et le cavalier seul de la Turquie après sa décision de mener une opération unilatérale dans le nord-est de la Syrie où étaient positionnés des militaires français.
Jens Stoltenberg a récusé les critiques contre un manque de consultation politique sur les questions stratégiques.
Engagement américain
«L'Otan discute tout le temps des questions d'importance stratégique. Nous le faisons à chaque réunion», a-t-il affirmé. «Mais nous sommes une alliance de 29 pays et nous avons parfois des désaccords sur l'approche à adopter», a-t-il souligné.
Les reproches formulés par la France seront discutés mercredi par les ministres des Affaires étrangères de l'Otan lors de leur réunion préparatoire au sommet de Londres des 3 et 4 décembre, a-t-il indiqué.
Jean-Yves le Drian devrait présenter mercredi des propositions pour combler les lacunes dénoncées par le chef de l'Etat, a annoncé un diplomate européen. «Nous aurons jusqu'au 3 décembre pour donner une réponse», a-t-il précisé.
Emmanuel Macron a déjà obtenu des assurances sur la solidarité prévue par l'article 5 après l'avoir mise en doute. «Tout le monde doit être assuré qu'en cas d'attaque contre un des membres de l'Otan tous les autres réagiront», a affirmé Jens Stoltenberg.
«Une chose est certaine: les Etats-Unis restent engagés en faveur de l'article 5, il est une de nos forces», a assuré mardi l'ambassadrice des Etats-Unis auprès de l'Otan, Kay Bailey Hutchison.