Algérie: l’armée rejette «catégoriquement» toute exigence «préalable» au dialogue
Par AlAhed avec AFP
L'armée algérienne, par la voix de son chef d'état-major, a rejeté mardi les conditions posées par la nouvelle «Instance nationale de dialogue» pour lancer les consultations sur les modalités de la présidentielle devant sortir le pays de la crise, minant encore plus un processus critiqué.
«Il n'est plus question de perdre davantage de temps», a estimé le général Ahmed Gaïd Salah, dans un discours retransmis par la télévision.
Il a fustigé «la méthode imposant des préalables allant jusqu'aux diktats. De telles méthodes et thèses sont catégoriquement rejetées».
Composée de sept «personnalités», l'Instance nationale de dialogue a été chargée par le président par intérim Abdelkader Bensalah de consultations pour définir les modalités de la future présidentielle devant élire le successeur d'Abdelaziz Bouteflika, qui a démissionné le 2 avril après 20 ans au pouvoir.
Décriée par le mouvement de contestation inédit qui agite l'Algérie depuis plus de cinq mois, l'instance a mis en avant les «mesures d'apaisement» qu'elle a exigées avant tout dialogue comme gage de bonne foi.
Parmi ces mesures figurent la libération des personnes arrêtées en lien avec la contestation et l'allègement du dispositif policier lors des manifestations, notamment les barrages qui ralentissent ou empêchent, chaque vendredi, lors de la grande marche hebdomadaire, l'accès à Alger.
Alors que M. Bensalah avait - très prudemment - fait part de «sa disponibilité» à «étudier» ou «envisager» ces mesures, le général Gaïd Salah a dénoncé mardi des «idées empoisonnées».
Concernant «l'appel à libération des détenus, qualifiés à tort de prisonniers d'opinion (...) seule la justice est souveraine» et «il n'est permis à quiconque d'interférer dans son travail et ses prérogatives ou tenter d'influer sur ses décisions», a martelé le chef d'état-major, véritable homme fort du pays depuis la démission de M. Bouteflika, face à un pouvoir intérimaire transparent.
Il a aussi qualifié de «suspect» l'appel à atténuer le dispositif policier: «ces mesures préventives prises par les services de sécurité pour la sécurisation des marches sont des mesures prises pour l'intérêt du peuple et non le contraire», a-t-il assuré, soulignant «la nécessité d'organiser et d'encadrer les marches afin d'éviter qu'elles soient infiltrées».
La période d'intérim présidentiel prévue par la Constitution a expiré début juillet, quelque jours après l'annulation, faute de candidats, de la présidentielle prévue le 4 juillet.
Le «Hirak» (mouvement de contestation) reproche au processus de dialogue de n'avoir pour seul objectif que l'organisation de la présidentielle, alors qu'il exige avant tout scrutin le départ du pouvoir des anciens proches de M. Bouteflika, M. Bensalah et le général Gaïd Salah en tête.
«Les institutions de l'Etat sont une ligne rouge qui n'admet ni tractation ni préalable ou encore des diktats illégaux», a-t-il averti, en réponse aux institutions de transition réclamées par les manifestants pour organiser la présidentielle.