L’UE déterminée à sauver l’accord sur le nucléaire iranien
Par AlAhed avec AFP
L’Union européenne se dit prête à sauver coûte que coûte l’accord sur le nucléaire iranien. Mais l’impossibilité de contourner les sanctions américaines leur laisse peu de chances de répondre aux attentes de Téhéran, ont averti leurs ministres des Affaires étrangères réunis lundi 15 juillet à Bruxelles.
«Nous voulons que l'Iran se conforme de nouveau pleinement à ses obligations ces prochaines années. Mais nous constatons aussi que toutes les mesures qui ont été prises sont réversibles, alors nous invitons les autorités iraniennes à revenir sur ces mesures», a commenté Federica Mogherini, cheffe de la diplomatie européenne.
«L’accord n’est pas encore mort» et l’UE veut donner à l’Iran «une possibilité de revenir sur ses mesures en contravention avec ses engagements», a affirmé le chef de la diplomatie britannique Jeremy Hunt à son arrivée pour une réunion avec ses homologues de l’Union.
«L’Iran a pris de mauvaises décisions en réaction à la mauvaise décision des États-Unis de se retirer de l’accord et d’imposer des sanctions dont la portée extraterritoriale touche de front les avantages économiques que le pays pouvait retirer de l’accord», a déploré le Français Jean-Yves Le Drian.«Nous souhaitons que l’Iran revienne dans l’accord» et respecte ses engagements, a-t-il insisté.
L’accord sur le nucléaire iranien conclu il y a 4 ans entre Téhéran, l’UE et 6 autres pays se retrouve aujourd’hui menacé, depuis que le président américain Donald Trump a annoncé quitter l’accord et a rétabli les sanctions américaines.
«Mesures pratiques, efficaces et responsables»
Les Européens déplorent la décision de Téhéran de produire désormais de l’uranium enrichi à au moins 4,5 %, un niveau prohibé par l’accord. Mais Téhéran attend des Européens des «mesures pratiques, efficaces et responsables» pour sauver l’accord.
Les Européens doivent faire «la preuve de leur volonté politique et de leur capacité» à permettre que l'Iran «bénéficie en pratique» de l'accord, a soutenu le porte-parole iranien des Affaires étrangères Abbas Moussavi dans un communiqué.
«Si les Européens et les Américains ne veulent pas agir conformément à leurs engagements, nous aussi, en réduisant nos engagements, nous contrebalancerons cela et reviendrons à la situation d'il y a quatre ans», a averti le porte-parole de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique, Behrouz Kamalvandi.
Les Européens espèrent quant à eux convaincre les Iraniens de leur volonté de les aider avec l’utilisation de l’Instex, un mécanisme de troc créé pour contourner les sanctions américaines en évitant d’utiliser le dollar. Les achats iraniens en Europe seront compensés par des achats européens pour un montant équivalent en Iran.
Contourner les sanctions américaines
Dix pays de l’UE se sont engagés à utiliser cet instrument et des pays «non-membres de l’UE» vont également rejoindre cette initiative, a annoncé Helga Schmid, l’ajointe de la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini. Mais deux grands pays de l’UE, l’Italie et la Pologne, manquent pour crédibiliser cet instrument, a déploré un diplomate européen de haut rang.
La situation est complexe: l’extraterritorialité des sanctions américaines a abouti au retrait d’Iran des entreprises européennes et le commerce s’est effondré, selon le résumé d’un diplomate européen. L’Iran ne peut plus exporter son pétrole, et est ainsi privée de l’essentiel de ses revenus. Les exportations de pétrole sont tombées de 1,5 million de barils par jour à 700 000 barils par jour, ce qui est insuffisant pour maintenir une économie viable, souligne une source européenne.
«Nous ne reconnaissons pas l’extraterritorialité» des lois américaines imposée par Washington, a tempêté l’Espagnol Josep Borrell, désigné pour remplacer l’Italienne Federica Mogherini à la tête de la diplomatie européenne si sa nomination est approuvée par le Parlement européen.
«Nous faisons tout ce qui est possible pour que l’accord nucléaire avec l’Iran soit maintenu, mais nous savons que c’est très difficile à cause de l’attitude des États-Unis», a-t-il insisté.
L’Espagne a officialisé lundi sa participation à l’Instex, et espère «que cet instrument va permettre des échanges commerciaux», a souligné Josep Borrell.
Toutefois, a-t-il averti, il faut «éviter la politique du moins pour moins, parce que c’est la voie vers la rupture définitive de l’accord».
«Les décisions des autorités iraniennes ne sont pas définitives», a-t-il soutenu.