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Quatre ans après le massacre de la mosquée de Sanaa, Kanan se souvient à peine de son père martyr

Quatre ans après le massacre de la mosquée de Sanaa, Kanan se souvient à peine de son père martyr
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Par le correspondant d’al-Ahed

Sanaa- Kanan n'avait que 4 ans lorsqu'il a perdu son père suite à deux attentats suicides perpétrés par deux terroristes contre deux mosquées Zaydites, Badr et Al Hashoosh, le 20 mars 2015, alors que les fidèles se rassemblaient pour la prière du vendredi.

Au moins 137 personnes sont tombées en martyre et 351 blessées, selon les médecins. Les médias locaux avaient signalé que ces attaques étaient «les attaques terroristes les plus meurtrières de l'histoire du Yémen».

Plusieurs enfants qui accompagnaient leurs pères à la prière du vendredi sont tombés en martyre dans ces attaques. Cependant, Kanan n'avait que 4 ans à l'époque, c'est pourquoi son père ne l'avait pas emmené avec lui.

Le mercredi [20 mars 2019], le jour de la commémoration du massacre, Kanan assis près de la tombe de son père, priait avec son grand-père, Hamoud.

Quatre ans après le massacre de la mosquée de Sanaa, Kanan se souvient à peine de son père martyr

Kanan a une sœur de 9 ans, elle était tellement timide qu’on a pas osé lui demander son prénom. Elle a également refusé de se faire filmer et de parler au journaliste du site Al-Ahed.

Elle et Kanan sont dans une école privée. Elle est en deuxième année primaire et son frère en première année. Kanan dit qu'il rêve de faire quelque chose de remarquable dans l'avenir.

«Je rêve de devenir ingénieur de bord», dit-il, assis près de la tombe de son père. Cependant, son grand-père lui sourit et l’interrompit : «disons qu'il sera pilote de chasse et se vengera d'Al Saoud [la monarchie saoudienne au pouvoir].»

Hamoud, le grand-père de Kanan, s’appuyait sur sa canne et passait entre les tombes, où des centaines de personnes ont été enterrées, parmi lesquelles les martyrs des mosquées, une attaque revendiquée par la branche yéménite de «Daech».

Quatre ans après le massacre de la mosquée de Sanaa, Kanan se souvient à peine de son père martyr

Le lendemain des attentats-suicides, l'administration américaine a condamné l'attaque sans présenter ses condoléances aux familles des victimes. «La Maison Blanche a -fermement condamné- les attaques, mais a déclaré ne pas pouvoir confirmer si leurs auteurs étaient affiliés à Daech, ou pas», selon la BBC.

Le porte-parole Josh Earnest a déclaré que «Daech» pourrait revendiquer faussement la responsabilité de ces attaques.

Qu'est-il arrivé ?

Hamoud, le grand-père de Kanan, se souvient avec douleur des deux attentats-suicides terroristes, les auteurs des attentats se sont fait passer pour des handicapés et dissimulaient les explosifs sous leurs handicaps, à leur entrée à la mosquée Al Hashoosh près de l'aéroport international de Sanaa, ils se sont mis parmi les fidèles et se sont fait exploser, Hamoud et son fils martyr Ghaleb avaient l’habitude d’aller prier là-bas.

En traversant les tombes, Hamoud a pointé son bâton sur une tombe spécifique celle du martyr Oussama, un jeune adolescent. Hamoud a déclaré qu’Oussama était un des gardiens de la mosquée Al Hashoosh et fouillait tous les fidèles avant leur entrée à la mosquée, c’était un jeune bénévole, membre du comité populaire de Sanaa.

«Au moment de la prière, nous avions entendu une explosion à l'extérieur de la mosquée… Oussama, ce brave garçon, avait arrêté - à l'entrée - le premier terroriste l’empêchant de pénétrer à l'intérieur de la mosquée, c’est alors qu’il s’est fait exploser», a déclaré Hamoud à Al-Ahed News.

Avant de nous rendre au cimetière, nous avons pu rencontrer le père d'Oussama, Mohammed Al-Ward, à l'extérieur de la mosquée, «c’est le père d'un martyr, mort lors d'une opération héroïque à l'entrée de la mosquée», a signalé Hamoud en nous l’introduisant.

Al-Ward, nous a dit qu'il était fier que son fils avait réussi à éloigner le premier terroriste. «Il est mort en martyre pour sauver la vie de plus de 200 fidèles à l'intérieur de la mosquée » ajouta-t-il.

«À l'entrée, Oussama a fouillé le terroriste qui lui a dit qu'il voulait se faire exploser au sein de la mosquée», a déclaré le père d'Oussama, selon les témoignages des collègues d’Oussama ayant survécu à l'explosion.

«Selon ceux qui se trouvaient proches de l'entrée, mon fils s'était battu avec le terroriste, il l'a emmené dans un taxi pour le transporter dans un lieu spécial, le terroriste a menacé de se faire exploser, alors Oussama a demandé à ses collègues de s’éloigner pour se protéger, il n’avait pas peur pour lui, et a forcé le terroriste de se faire exploser», affirma le père d'Oussama.

Au moment de l’explosion le père de Kanan était à l'intérieur de la mosquée, tandis que son grand-père était dans la salle de prière.

Après la première explosion, un autre terroriste s'est infiltré jusqu'à la mosquée se servant de béquilles, et se faisant passer pour un handicapé, il avait caché les explosifs dans les jambes et les pieds.

Comment l’attaque s'est-elle passée ?

Un autre survivant, Mohsen Taher, âgé d'une soixantaine d'années, a déclaré qu'il se trouvait sous la tribune deux minutes avant que le deuxième terroriste ne se fasse exploser au même endroit.

Immédiatement après la prière, Taher a déclaré que des fidèles sont sortis de la mosquée pour découvrir ce qui s'était passé devant la mosquée lors de la première explosion. «Je faisais partie de ceux qui couraient pour voir ce qui c’était passé», a déclaré Taher.

«Je suis sorti par la porte ouest de la mosquée, vers la salle de prière, accompagné d’un homme âgé, je me suis trouvé à cet endroit, là où le grand-père de Kanan était assis… j’ai ensuite entendu une deuxième explosion à l'intérieur de la mosquée», a ajouté Taher.

«Le deuxième terroriste s'était infiltré après la première explosion qui a visé les membres de sécurité. Il voulait tuer le prédicateur Taha Al Mutawakel, [maintenant ministre de la Santé]».

Taher a expliqué que la deuxième explosion avait eu lieu à l'endroit où il avait fait ses prières du vendredi. «Tous ceux qui étaient autour de moi sont morts en martyre parce qu'ils sont restés là-bas», a déclaré Taher, remerciant Allah d'être sorti immédiatement.

«Projet américain et israélien»

Les habitants de la mosquée Al Hashoosh ont été surpris par les condamnations internationales et américaines des attentats-suicide, qui se limitaient à dénoncer l'agression sans adresser de condoléances aux familles de victimes.

Selon Taher, la communauté internationale a gardé le silence sur ce crime, car il s’agissait «d’un plan américain et israélien perçu il y a longtemps».

«Il y avait des efforts pour fomenter la division sectaire et la guerre civile», a noté Taher. «Ils n'ont pas réussi à le faire, car les Yéménites sont tous des frères, qu’ils soient Zaydites ou Chafiites, ils vivent ensemble et se partagent les mosquées. C'est pourquoi les victimes des attentats appartiennent à toutes les communautés».

À l'époque, de nombreux dirigeants d’Ansarullah avaient survécu à l’attentat, tel que le président Saleh Ali Al Samad, qui, selon Hamoud, se trouvait au deuxième étage de la mosquée. Al Samad est tombé en martyre en avril dernier lors d'une frappe aérienne menée par un drone américain à Hodeida.

Cependant, des civils innocents sont morts lors de cet attentat terroriste, notamment le père de Kanan, qui travaillait à la Banque commerciale et à la Coopérative de crédit agricole et n'a rien à voir avec toutes ces agressions sectaires.

La souffrance des familles des victimes

Le grand-père de Kanan, Hamoud, a perdu son fils Ghaleb dans l'attaque terroriste. Kanan a perdu son père.

Ghaleb travaillait à la Banque commerciale et à la Coopérative de crédit agricole, il gagnait bien sa vie et avait en charge son père et ses deux enfants. Cependant, après cette agression, le salaire de Ghaleb a été réduit par la banque.

«La banque ne paie plus que 50 dollars», a déclaré Hamoud.

«L'année dernière, j’ai poussé l’un de mes fils à épouser la mère de Kanan, afin qu'elle ne reste pas seule, ils vivent maintenant heureux avec les deux enfants», a déclaré Hamoud à Al-Ahed News.

Alors que nous attendions que Kanan et sa sœur sortent de l'école pour les emmener à la tombe de leur père, des avions de guerre saoudiens ont survolé Sanaa pour la première fois depuis plus d'un mois.

Cette agression saoudienne affirme qu’il n’y a toujours pas de lueur d’espoir au bout du tunnel et que le cycle de la guerre continuera, et les enfants yéménites comme Kanan souffriront encore. Ce sont eux qui payeront le plus lourd tribut.

Traduit de l’anglais (original)

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