Yémen: Le Sénat US défie Trump au sujet du soutien militaire à l’Arabie
Les États-Unis pourraient-ils mettre fin à leur implication auprès de l'Arabie saoudite dans le conflit au Yémen? Une résolution en ce sens a franchi une première étape au Sénat mercredi, où les élus, mécontents de la réponse de l'administration au meurtre de Jamal Khashoggi, ont choisi de défier la Maison-Blanche.
L’étape est procédurale, mais le symbole est grand.
Les sénateurs américains ont adopté à 63 voix contre 37 une résolution visant à mettre fin à l’implication américaine au Yémen. Le texte pourra ensuite être amendé, avant la tenue d'un vote final.
Les Américains offrent notamment un soutien logistique à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite dans ce conflit.
«Selon moi, il est impératif que le Sénat dise à l'Arabie saoudite et au monde que nous n'allons pas continuer à participer à ce désastre », a affirmé Bernie Sanders, sénateur indépendant du Vermont.
Les sénateurs ont donc défié la volonté de l’administration Trump. Plus tôt dans la journée, le secrétaire d’État Mike Pompeo a sommé les élus de ne pas appuyer la résolution.
«Nous pensons que le moment choisi n’est pas le bon», a affirmé M. Pompeo, ajoutant que «Washington préparait des négociations qui pourraient mener à un cessez-le-feu».
L’impact de l’affaire Khashoggi
En mars, un texte semblable avait échoué à recevoir ce premier aval du Sénat, ne recueillant que 44 votes.
Que s’est-il passé depuis? Selon l’un des parrains du projet, le républicain Mike Lee, les élus ont eu le temps d’alimenter leur réflexion à propos de cette guerre qui a fait 10 000 morts, selon l’ONU. Certaines ONG affirment que le bilan des victimes serait cinq fois plus élevé.
Mais il reconnaît que le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi a aussi joué un rôle important.
«L'affaire Khashoggi a attiré l'attention et a poussé certaines personnes à se demander pourquoi nous participons aveuglément à une alliance avec l'Arabie saoudite», a indiqué Mike Lee, sénateur républicain de l’Utah.
Depuis quelques semaines, de nombreux sénateurs, démocrates et républicains, ne cachent pas leur insatisfaction par rapport à la réaction de l’administration Trump à l’endroit de Riyad dans cette affaire.
Dans une déclaration écrite, puis devant les journalistes la semaine dernière, le président Trump a affirmé que Mohammed ben Salmane était «peut être impliqué, peut-être pas» dans l’assassinat du journaliste, mais que cela n’aurait pas d’impact sur la relation économique et stratégique entre Washington et Riyad.
Des réponses insatisfaisantes
Quelques heures avant le vote de mercredi, deux hauts représentants de l’administration, le secrétaire d’État et celui de la Défense, ont rencontré les sénateurs pour partager des informations au sujet du meurtre de Jamal Khashoggi.
Mike Pompeo a déclaré que les agences de renseignement ne disposaient pas d’éléments «directs» liant le prince héritier au meurtre, ce qu’a aussi affirmé son collègue Jim Mattis.
Des médias, dont le Washington Post, ont pourtant rapporté que selon la CIA, le rôle de Mohamed ben Salmane ne faisait plus de doute.
D’ailleurs, de nombreux sénateurs se sont montrés insatisfaits de ne pas avoir pu rencontrer la directrice de la CIA. Gina Haspel s’est pourtant rendue en Turquie, où elle aurait écouté les enregistrements du meurtre de Jamal Khashoggi.
«Je ne vous aiderai pour aucun vote clé», a menacé le républicain Lindsey Graham, exigeant une rencontre avec la directrice de l’agence. Le sénateur de la Caroline du Sud est pourtant un important allié de Donald Trump au Congrès.
Depuis plusieurs semaines, des élus démocrates et républicains affirment qu’ils ont des recours pour forcer la Maison-Blanche à réagir de manière plus ferme à l’endroit de Riyad et de la famille royale saoudienne. Certains semblent maintenant vouloir passer de la parole aux actes.
Source: agences et rédaction