Le présomptueux maladroit émet le verdict
La semaine dernière, Saad Hariri s'est comporté à La Haye, comme il le fait en Arabie et à Beyrouth. Il y a aussi décidé que seule la séance d'ouverture du procès du TSL, lui suffit.
Dès que le procureur a réitéré ses mêmes accusations et preuves, sans surprise aucune, contrairement aux promesses des responsables politiques et sécuritaires du 14 Mars, Hariri est sorti de l'audition pour donner lecture au verdict.
Il nous dit, tout comme ses adjoints, qu'ils n'ont point besoin du procès, de la défense et de toutes les preuves d'innocence. Il avait lui-même décidé, à Beyrouth, qui était le meurtrier. L'inculpé est notamment celui que lui, Saad Hariri, avait décidé d'accuser. Et si c'était lui qui accuse, le tribunal condamne.
Hariri est sorti suite à la séance inaugurale du procès, pour nous lire un communiqué écrit avant son arrivée à La Haye. Il n'a même pas attendu d'écouter le procureur. Il ne s'intéressait qu'à l'inauguration du procès. Ensuite, son attente a été ennuyeuse. Il sait parfaitement que le tribunal ne dispose que des renseignements pris de son équipe politique et sécuritaire. Pour cette raison il a décidé de nous surprendre par l'annonce de la vérité lumineuse. Il a dit : «une partie libanaise est accusée d'après des preuves irréfutables. Nous sommes certainement affligés qu'un groupe de Libanais soit accusé, avec, à l'appui, des preuves et des enquêtes approfondies.
Nous n'aurions pas cru que, parmi les Libanais, certains puissent vendre leurs âmes au diable et se porter volontaires pour tuer Rafic Hariri. Cette vérité est blessante et douloureuse, mais elle est devenue une réalité vis-à-vis de laquelle les tentatives d'échapper à la justice, et le fait de se vanter de protéger les accusés, ne serviront à rien».
Il a enfin noté que les acteurs de l'assassinat étaient des Libanais adhérant à un parti libanais déterminé.
Bon. Hariri a émis le verdict. Il a décidé, unilatéralement, que nul besoin de procès, d'explications et de preuves. Nul besoin de défense. Celui qui s'oppose à sa décision, lui, le fils de la victime, qu'il aille au diable !
Et puis, voulez-vous qu'on approuve un tel tribunal ou ce gamin maladroit, juste parce qu'il est le fils de la victime? Voulez-vous qu'on célèbre la justice et la vérité et qu'on brandisse les pancartes qui nous ont privés d'air pur depuis neuf ans ?
Saad Hariri a décidé de la vérité. Un point à la ligne.
Pourrions-nous lui répondre franchement, comme il s'est exprimé ? Il s'agit de votre vérité, non de celle attendue par les gens pour savoir qui avait ouvert les portes de l'enfer sur le Liban et la Syrie, il y a neuf ans et jusqu'à l'heure actuelle !
Comment Hariri adopte-t-il une telle position tout en souhaitant que les gens attendent de lui d'être un leader national, un pôle politique ou premier ministre ?
Comment Hariri s'est exprimé de tel tout en voulant annoncer, le jour suivant, son accord sur la gestion du pays en partenariat avec ceux proclamés meurtriers par lui ? Il ne s'est même pas suffi au protocole du TSL qui pointe du doigt des individus. Il s'est empressé de rappeler à tous, que ces individus, accusés par lui, étaient des membres d'un parti déterminé.
Comment Hariri délivre ce message à ses sympathisants et puis leur annonce plus tard son accord pour se tenir à la même table avec ces meurtriers ou ceux qui les représentent ? N'est-ce pas sa propre logique ? Ou a-t-il voulu nous dire qu'il refuse le gouvernement de partenariat national ?
Encore plus. Saad Hariri sait parfaitement, tout comme les autres, que les données aux mains du procureur du TSL sont les mêmes, élaborées par la branche des renseignements des Forces de Sécurité intérieure, à Beyrouth. Des données élaborées et suivies de près par Saad Hariri en personne, et par d'autres, qui ont participé à la fabrication de ce film, épicé par les plaideurs pour plus de suspense. Mais ce dernier a été ennuyeux à son tour.
Tout ce que nous avons observé et écouté n'a ajouté aucune donnée sur ce que nous savions, en matière de fuites d'informations menées par Hariri et son équipe depuis le lancement des enquêtes.
Nous sommes toujours sceptiques quant à la responsabilité de ceux accusés par le tribunal, du crime du 14 février.
Le camp du 14 Mars nous plongera bien sûr dans une vague d'analyses, d'explications, de spéculations, de souhaits et d'interprétations relatifs au début des travaux du tribunal. Et puisque ce camp tente d'exploiter le sang, il tentera surement d'exploiter tout ce que bon lui semble.
Mais si ceux-là méditent-ils un moment pour comprendre que tout ce tapage et ces films cinématographiques ne modifieront point des réalités solides sur le territoire du Liban et dans la région ?
Serait-il nécessaire de rappeler à ceux-là que la période passée est révolue et que leur agression, oppression et abus en 2005 ne sont plus possibles à l'heure actuelle ?
Un de nos concitoyens serait-il en mesure d'expliquer à ceux-là que la position de la résistance, favorable au consensus gouvernemental, ne reflète aucun signe de faiblesse, mais constitue une véritable chance pour le pays ? Le substitut ? Une aventure de laquelle ne bénéficiera pas le courant de la résistance mais qui provoquera la paralysie de ses adversaires.
Dernier mot...
Ce tribunal ne représente pas la justice. Il représente uniquement les intérêts des oppresseurs et des pillards des populations du monde. Ce tribunal n'est point un lieu propice pour annoncer une vérité incontestable. C'est un outil au service des intérêts des ennemis de la résistance. Pour cette raison, c'est un tribunal, non pour le Liban !
Article paru samedi 18 janvier dans le quotidien libanais Al-Akhbar, traduit par l'équipe du site