L’assassinat de Chatah et le prix requis
L’histoire évoquera l’assassinat du martyr Mohammad Chatah comme un début d’une période dangereuse, similaire à celle qui a suivi l’assassinat de Rafic Hariri. En effet, l’homme n’était pas ordinaire dans le contexte de la crise régionale, ni le moment de l’assassinat était ordinaire dans l’histoire du Liban, ni le climat de la dissension ne permet de rendre l’assassinat comme un incident passager. Le meurtrier connait ces faits.
L’assassinat de Hariri fut le début d’un changement sérieux de l’image du Hezbollah dans le monde arabe et islamique. Il fut aussi le début du processus du retrait de l'armée syrienne du Liban. Ces deux demandes n’étaient pas alors locales. Les deux présidents, Georges w Bush et Jack Chirac n’y étaient pas étrangers.
La discorde sunnite-chiite, provoquée en Irak suite à l’invasion américano-britannique, a trouvé dans l’assassinat de Hariri une opportunité historique pour accuser le Hezbollah, jouissant d’une grande popularité chiite, comme meurtrier du nouveau symbole du sunnisme moderne dans la région, Rafic Hariri. L’accusation politique a devancé les enquêtes.
Qu’est ce qui est prévu suite à l’assassinat de Chatah?
Le discours de Saad Hariri a été concis. Celui de Fouad Siniora plus détaillé. Plus explicite. Les deux hommes ont insinué ce qui sera plus clair dans la prochaine période. «Le régime syrien a planifié l’attentat. Ses alliés au Liban, notamment le Hezbollah, ont exécuté». Siniora a exprimé dans le communiqué des forces du 14 Mars, ce qu’il avait suggéré lors de l’assassinat de Hariri. Il faut donner à l’assassinat une dimension internationale. Il est prévu donc que cette approche soit promue dans les prochaines semaines. On prévoit aussi de grandes pressions internationales sur le Hezbollah et le Liban.
Seul, le chef du Front de la Lutte nationale, Walid Joumblatt, parmi les anciens alliés du 14 Mars, a compris les périls du moment. Il a appelé à faire preuve de sagesse et de modération. Joumblatt connait parfaitement que certains veulent exploiter l’assassinat pour remporter de grands bénéfices politiques. Il sait aussi, ce qui est encore plus dangereux: l’assassinat pourrait provoquer un conflit confessionnel.
L’assassinat de Chatah est survenu dans un moment charnière de l’histoire du Liban. Le gouvernement et la présidence sont au cœur des tiraillements politiques entre le Hezbollah et ses alliés d’une part, et le camp du 14 Mars de l’autre. Derrière les deux parties, un conflit sanguinaire plus profond se déroule sur le territoire syrien.
Il est prévu donc que l’assassinat augmente les pressions afin de mettre en place un gouvernement de fait accompli et de trouver une formule adéquate à la présidentielle. Cette éventualité jouit désormais d’un soutien international, qui était hésitant avant le martyre de Chatah. Un nouvel an sanglant s’annonce.
Après cet assassinat, la voie est pavée devant d’autres, et devant des accrochages et des attentats encore plus dangereux sur la scène libanaise. Claire est la volonté de transformer le Liban en scène de conflit régional et international, comme extension à celui en cours en Syrie, en dépit de la destruction, des martyrs et des souffrances des refugiés.
Quel serait le cas si un responsable du Hezbollah ou un de ses alliés est assassiné dans les jours qui viennent? On dira que c’est une riposte à l’assassinat de Chatah. Qui empêchera alors les réactions?
Après l’assassinat, «Israël» pourrait en profiter pour mener une offensive. L’ennemi estime que l’intervention du Hezbollah en Syrie et le fossé grandissant entre ce parti et son ancienne base populaire sunnite, constituent une conjoncture exemplaire pour assener une frappe. «Israël» pourrait alors compenser au Liban, ce qu’il a été incapable de réaliser en Iran. C’est ce qu’il croit.
Après l’assassinat, le régime syrien, le Hezbollah et l’Iran seront en face du volcan des accusations et des décisions internationales. Ceci est important dans un moment décisif, avant la tenue de la conférence de Genève 2, dans le contexte des pas vers l’entente avec Téhéran et de l’approche de la date des procès du «Tribunal Spécial pour le Liban», censé découvrir la vérité sur l’assassinat de Hariri.
Mohammad Chatah n’était pas un homme ordinaire. Le général Wissam el-Hassan ne l’était non plus. L’ancien ministre jouissait de grandes expertises en matière d’économie et de politique, exactement comme l’homme de sécurité, Wissam el-Hassan. Les deux étaient un point d’intersection local, régional et international. Dans de tels assassinats, il est aisé de lancer les accusations vers une partie précise. Il est par contre difficile de prouver ces accusations par les faits. L’exploitation politique est aussi facile.
L’assassinat est sans doute un prélude à une période obscure au Liban. Il pave la voie à des changements significatifs dans le climat général.
Pire encore. Toutes les parties seront perdantes en fin de compte. Elles sont toutes incapables de trancher la bataille en leur faveur. Quel serait le cas si le Hezbollah et ses alliés sont cernés par un gouvernement de fait accompli? Comment Nasrallah mettra-t-il en œuvre les propos de son dernier discours: «Ne jouez pas avec nous». Cette fois-ci, celui qui jouera jouit d’une couverture internationale plus importante que celle qui a précédé l’assassinat.
Article paru dans le quotidien libanais Al-Akhbar traduit par l'équipe du site
L’assassinat de Hariri fut le début d’un changement sérieux de l’image du Hezbollah dans le monde arabe et islamique. Il fut aussi le début du processus du retrait de l'armée syrienne du Liban. Ces deux demandes n’étaient pas alors locales. Les deux présidents, Georges w Bush et Jack Chirac n’y étaient pas étrangers.
La discorde sunnite-chiite, provoquée en Irak suite à l’invasion américano-britannique, a trouvé dans l’assassinat de Hariri une opportunité historique pour accuser le Hezbollah, jouissant d’une grande popularité chiite, comme meurtrier du nouveau symbole du sunnisme moderne dans la région, Rafic Hariri. L’accusation politique a devancé les enquêtes.
Qu’est ce qui est prévu suite à l’assassinat de Chatah?
Le discours de Saad Hariri a été concis. Celui de Fouad Siniora plus détaillé. Plus explicite. Les deux hommes ont insinué ce qui sera plus clair dans la prochaine période. «Le régime syrien a planifié l’attentat. Ses alliés au Liban, notamment le Hezbollah, ont exécuté». Siniora a exprimé dans le communiqué des forces du 14 Mars, ce qu’il avait suggéré lors de l’assassinat de Hariri. Il faut donner à l’assassinat une dimension internationale. Il est prévu donc que cette approche soit promue dans les prochaines semaines. On prévoit aussi de grandes pressions internationales sur le Hezbollah et le Liban.
Seul, le chef du Front de la Lutte nationale, Walid Joumblatt, parmi les anciens alliés du 14 Mars, a compris les périls du moment. Il a appelé à faire preuve de sagesse et de modération. Joumblatt connait parfaitement que certains veulent exploiter l’assassinat pour remporter de grands bénéfices politiques. Il sait aussi, ce qui est encore plus dangereux: l’assassinat pourrait provoquer un conflit confessionnel.
L’assassinat de Chatah est survenu dans un moment charnière de l’histoire du Liban. Le gouvernement et la présidence sont au cœur des tiraillements politiques entre le Hezbollah et ses alliés d’une part, et le camp du 14 Mars de l’autre. Derrière les deux parties, un conflit sanguinaire plus profond se déroule sur le territoire syrien.
Il est prévu donc que l’assassinat augmente les pressions afin de mettre en place un gouvernement de fait accompli et de trouver une formule adéquate à la présidentielle. Cette éventualité jouit désormais d’un soutien international, qui était hésitant avant le martyre de Chatah. Un nouvel an sanglant s’annonce.
Après cet assassinat, la voie est pavée devant d’autres, et devant des accrochages et des attentats encore plus dangereux sur la scène libanaise. Claire est la volonté de transformer le Liban en scène de conflit régional et international, comme extension à celui en cours en Syrie, en dépit de la destruction, des martyrs et des souffrances des refugiés.
Quel serait le cas si un responsable du Hezbollah ou un de ses alliés est assassiné dans les jours qui viennent? On dira que c’est une riposte à l’assassinat de Chatah. Qui empêchera alors les réactions?
Après l’assassinat, «Israël» pourrait en profiter pour mener une offensive. L’ennemi estime que l’intervention du Hezbollah en Syrie et le fossé grandissant entre ce parti et son ancienne base populaire sunnite, constituent une conjoncture exemplaire pour assener une frappe. «Israël» pourrait alors compenser au Liban, ce qu’il a été incapable de réaliser en Iran. C’est ce qu’il croit.
Après l’assassinat, le régime syrien, le Hezbollah et l’Iran seront en face du volcan des accusations et des décisions internationales. Ceci est important dans un moment décisif, avant la tenue de la conférence de Genève 2, dans le contexte des pas vers l’entente avec Téhéran et de l’approche de la date des procès du «Tribunal Spécial pour le Liban», censé découvrir la vérité sur l’assassinat de Hariri.
Mohammad Chatah n’était pas un homme ordinaire. Le général Wissam el-Hassan ne l’était non plus. L’ancien ministre jouissait de grandes expertises en matière d’économie et de politique, exactement comme l’homme de sécurité, Wissam el-Hassan. Les deux étaient un point d’intersection local, régional et international. Dans de tels assassinats, il est aisé de lancer les accusations vers une partie précise. Il est par contre difficile de prouver ces accusations par les faits. L’exploitation politique est aussi facile.
L’assassinat est sans doute un prélude à une période obscure au Liban. Il pave la voie à des changements significatifs dans le climat général.
Pire encore. Toutes les parties seront perdantes en fin de compte. Elles sont toutes incapables de trancher la bataille en leur faveur. Quel serait le cas si le Hezbollah et ses alliés sont cernés par un gouvernement de fait accompli? Comment Nasrallah mettra-t-il en œuvre les propos de son dernier discours: «Ne jouez pas avec nous». Cette fois-ci, celui qui jouera jouit d’une couverture internationale plus importante que celle qui a précédé l’assassinat.
Article paru dans le quotidien libanais Al-Akhbar traduit par l'équipe du site