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La route du Castello enterre le partage de la Syrie

La route du Castello enterre le partage de la Syrie
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   Par Samer R. Zoughaib

Le rêve turco-saoudien et le plan américain d’arracher Alep à l’Etat syrien ont été enterrés, après la fermeture de la route du Castello par l’Armée Arabe Syrienne et ses alliés. L’encerclement des quartiers est de la ville, occupés par les terroristes, aura des conséquences considérables sur la suite de la guerre.

La route du Castello enterre le partage de la Syrie

Un tournant militaire historique s’est produit dans la ville d’Alep et la province éponyme, pour la première fois depuis le 19 juillet 2012, lorsque des hordes salafistes, directement appuyées par la Turquie, ont déferlé sur la capitale économique de la Syrie.
L’Armée Arabe Syrienne (AAS) et ses alliés sont parvenus, à la fin de la semaine dernière, à couper la dernière voie de ravitaillement des groupes terroristes, qui occupent les quartiers Est d’Alep. La célèbre route du Castello, qui passe au nord de la ville, permettait d’acheminer hommes, armes, munitions, vivres et matériel militaire, directement de la Turquie, en passant par la province d’Idleb et la campagne à l’ouest d’Alep, occupées par le «Front al-Nosra», l’enseigne syrienne d’«Al-Qaïda».     
Le mouvement d’encerclement des quartiers Est d’Alep a commencé il y a un an et demi, par la prise des localités de Handarat et Bachkoy, situées au nord-est de la ville, par l’armée syrienne. Il s’est poursuivi avec la libération des villes de Nobbol et Zahraa, le 5 février dernier, par le Hezbollah et les troupes syriennes, ce qui a permis de couper la ligne d’approvisionnement directe des terroristes, venant de Turquie et passant par la localité d’Aazaz. Puis la trêve, décrétée par la Russie et les Etats-Unis, est intervenue le 27 février, freinant la progression de l’AAS. Dès lors, Moscou, qui souhaitait lancer un processus de règlement politique de la crise syrienne en collaboration avec les Américains, s’est montré prudent sur le terrain. Les Russes hésitaient à s’engager à fond dans la «Grande bataille d’Alep», de crainte de torpiller les négociations politiques, et exhortaient leurs alliés syriens, libanais et iraniens, de temporiser.

Les terroristes s’arment pendant la trêve
 
Mettant à profit la trêve, la Turquie et l’Arabie saoudite ont livré 3500 tonnes d’armes et de munitions aux terroristes, dont un millier de missiles TOW américains, prélevés sur un stock de 13 mille missiles, achetés par les Saoudiens. Ils ont également acheminé d’importants renforts pour préparer une contre-offensive, avec l’encouragement des Etats-Unis, qui espéraient inverser le rapport de force militaire. Le but final étant de négocier à partir d’une position de force.
Sous l’œil complice de Washington et la complaisance des pays occidentaux, les terroristes ont fait voler la trêve en éclat, et leur représentant aux négociations de Genève, Mohammad Allouche, a annoncé son retrait du processus politique fin mai. Ils ont ensuite lancé une vaste offensive au sud d’Alep, dans l’objectif d’encercler les quartiers ouest de la ville, contrôlés par l’Etat, où vivent 1,5 million de civils, qui ont fui les quartiers est et d’autres régions, occupées par les groupes armés. A l’est d’Alep, il ne reste plus que 250 mille civils, qui ploient sous le joug des terroristes. Après quelques succès (la prise d’al-Iss, de Khan Toumane et de Khalsa), l’offensive des terroristes s’est enlisée, et l’objectif initial de couper la route de Ramoussa, qui ravitaille les quartiers ouest, n’a pu être atteint.

La flèche du Tigre

Après avoir tenté, en vain, de convaincre les Etats-Unis de «séparer» le «Front al-Nosra» des groupes armés dits «modérés», la Russie s’est finalement résignée à se lancer dans la «Grande bataille d’Alep». Les plans ont été établis lors de la réunion, début juin à Téhéran, des ministres syrien, russe et iranien de la Défense. Ils ont été finalisés lors de plusieurs réunions de coordination et pendant la visite à Damas, le 18 juin, du ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, où il a été reçu par le président Bachar al-Assad. Entretemps, l’Iran a nommé un nouveau responsable des opérations en Syrie, l'amiral Ali Chamakhani, le premier chef des Gardiens de la révolution, devenu depuis conseiller du leader de la Révolution islamique, l’Ayatollah Ali Khamenei, pour les questions de la sécurité nationale.
C’est le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, qui a, en quelque sorte, donné le coup d’envoi du début des opérations, le 24 juin, lorsqu’il a considéré, dans un discours, que la bataille d'Alep est la plus importante de la guerre en Syrie.
La bataille a commencé par des offensives syriennes contre les fermes d’Al-Mallah, au nord de la route du Castello. Pour neutraliser les TOW américains, le colonel Souhail al-Hassan, surnommé «Le Tigre», a utilisé une stratégie qui a fait ses preuves lors de la libération, à l’automne 2015, de l’aéroport de Koweires et de sa garnison de 1300 hommes, encerclés par «Daech». Après un violent barrage d’artillerie et des dizaines de raids aériens menés par l’aviation russe, il a lancé son infanterie dans un mouvement en forme de flèche. Après avoir brisé les lignes de défense des terroristes, l’ASS et ses alliés se sont employés à élargir les flancs du couloir percé en plein territoire ennemi… On connait la suite. L’armée syrienne n’est plus qu’à 300 mètres de la route du Castello, qui est devenue impraticable pour les extrémistes.

La Turquie neutralisée politiquement

Encore une fois, les Russes ont fait preuve d’une habileté politique hors norme, en choisissant le moment opportun pour s’engager à fond dans la «Grande bataille d’Alep». En effet, la Turquie, qui s’est investie dans un processus de réconciliation avec Moscou après le mea culpa d’Erdogan, avait les bras liés sur le plan politique. Bien que son soutien militaire aux terroristes n’ait pas cessé une seconde, et s’est même intensifié les derniers jours, elle a gardé le silence politique et médiatique, de peur de compromettre la normalisation en cours avec la Russie. Même chose pour les Etats-Unis et les Occidentaux.
Si l’Armée Arabe Syrienne parvient à préserver ses acquis et à renforcer ses positions sur la route du Castello, l’encerclement des quartiers est d’Alep aura des conséquences stratégiques considérables sur la suite de la guerre. Le plan turco-saoudien de fonder une entité dans le nord de la Syrie, avec Alep comme «capitale», sera définitivement enterré, et avec lui le rêve du partage de la Syrie, qui caresse Washington. La Turquie, qui a bâti toute sa stratégie syrienne sur le fait de soustraire Alep à l’Etat syrien historique, voit son influence s’effilocher, et, d’acteur de premier plan, elle est devenue un simple figurant.
Le recul de l’influence turque s’illustre dans cette indiscrétion, publiée par le journal saoudien Ach Sharq al-Awsat, selon laquelle Ankara «accepterait» le maintien du président Bachar al-Assad au pouvoir six mois, afin d’«empêcher la création d’un Etat kurde dans le nord de la Syrie». Ces quelques mots montrent la faiblesse actuelle de la Turquie. D’abord, elle reconnait son incapacité à empêcher elle-même l’émergence d’une entité kurde en Syrie, ensuite, elle estime que le président Assad, hier encore considéré infréquentable et sur le point d’être renversé, est le seul capable de maintenir l’unité de son pays.
A bon entendeur salut…

Source: french.alahednews

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